Un Montréalais réclame 125 000$ pour une intervention policière «brutale»

Brice Dossa affirme avoir subi notamment du profilage racial et un trouble de stress post-traumatique associé à une intervention policière « brutale ».
Graham Hughes La Presse canadienne Brice Dossa affirme avoir subi notamment du profilage racial et un trouble de stress post-traumatique associé à une intervention policière « brutale ».

Un homme noir de 44 ans poursuit la Ville de Montréal et deux agents de son corps de police dans l’espoir d’obtenir un dédommagement de 125 000 $ à la suite d’une arrestation « brutale » qu’il associe à un cas de profilage racial.

Le 3 novembre dernier, Brice Dossa, un préposé aux bénéficiaires originaire du Bénin, se dirige à pied vers sa voiture après s’être rendu dans un restaurant du Marché central, dans Ahuntsic-Cartierville, lorsqu’il remarque un véhicule immobilisé derrière le sien.

« Alors qu’il s’apprête à toucher la poignée de sa portière, il sent quelqu’un derrière lui tirer brutalement son bras droit pour le ramener en arrière », détaille une demande introductive d’instance déposée mardi à la Cour supérieure du Québec. Le Montréalais est représenté par l’avocat Fernando Belton, qui se spécialise dans les dossiers de profilage racial.

Un autre policier en civil vient alors prêter main-forte à son collègue pour maîtriser M. Dossa, qui craint d’être victime d’une « attaque gratuite ou à dessein de deux civils », les agents de la paix n’ayant pas encore précisé être de la police. « Ne comprenant pas ce qui se passe, il a très peur », indique la poursuite.

Les deux policiers passent alors les menottes aux poignets de l’homme, qui demande pour quelles raisons il a ainsi été mis en état d’arrestation. « À la suite des questionnements de M. Dossa concernant l’intervention, les deux individus en civil s’identifient comme étant des policiers et lui mentionnent que son véhicule Honda CR-V a été identifié comme un bien volé », indique la poursuite.

Erreur

Or, les policiers ne demandent aucune pièce d’identité à M. Dossa, et effectuent plutôt une vérification téléphonique d’une durée de 10 à 15 minutes après avoir menotté le père de famille. Les deux policiers constatent alors qu’ils ont commis une erreur : le véhicule en question appartient bel et bien à Brice Dossa, qui a acquis celui-ci légalement.

M. Dossa demande alors aux policiers de lui retirer les menottes, qui lui ont blessé les poignets. C’est alors que les policiers constatent qu’ils n’ont pas les clés de celles-ci en leur possession.

« Indigné, M. Dossa demande aux deux policiers du SPVM [Service de police de la Ville de Montréal] s’il a ce traitement-là parce qu’il a la peau noire, puisque les policiers du SPVM lui ont mentionné que le véhicule était volé alors qu’il n’y avait pas eu d’enquête avant de l’arrêter », mentionne la poursuite. Pourtant, « une simple vérification dans leur système », de la part des policiers, « aurait permis de ne pas user de force excessive ou d’intervenir illégalement auprès de M. Dossa », ajoute le document.

Cette intervention policière, au terme de laquelle Brice Dossa a finalement été libéré de ses menottes, avait d’ailleurs attiré une foule de piétons intrigués par cet événement. Une vidéo de la scène a ensuite été diffusée sur les réseaux sociaux et vue à des milliers de reprises. Devant l’indignation populaire qu’a soulevée cette arrestation, le SPVM a annoncé quelques jours plus tard avoir ouvert une enquête pour faire la lumière sur cette affaire.

Or, depuis, « au moins une plainte » a été déposée devant le Commissaire à la déontologie policière, qui a entamé sa propre enquête en lien avec cet événement, a indiqué le SPVM mercredi dans un courriel adressé au Devoir. Cette enquête a préséance sur celle menée à l’interne par le corps de police. « Si, au terme de l’enquête, le dossier est soumis au comité à la déontologie policière et que des sanctions sont imposées, le SPVM a, comme tout corps policier au Québec, une obligation légale de les appliquer », ajoute la déclaration écrite.

Le cabinet de la mairesse Valérie Plante et la Ville se sont quant à eux abstenus de commenter cette poursuite. Brice Dossa, pour sa part, réclame une somme totalisant 125 000 $ à la Ville, à titre d’employeur du SPVM, et aux deux agents de la paix impliqués dans cette affaire.

L’homme affirme avoir subi notamment du profilage racial ainsi qu’un trouble de stress post-traumatique associé à cette intervention policière, qui l’a forcé à s’absenter du travail pendant deux mois, sur recommandation d’un médecin. Il a alors subi des pertes financières importantes qui l’ont empêché de remplir ses obligations financières auprès de ses parents et de sa fille de 15 ans, mentionne la poursuite.

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