Quinze ans de prison pour un «touriste sexuel» québécois ayant agressé une fillette à Cuba

Le Canada peut sévir au pays contre ses citoyens qui vont faire du « tourisme sexuel » à l’étranger. Vendredi, un Québécois qui a agressé sexuellement une fillette d’un milieu défavorisé pendant des années à Cuba vient d’écoper d’une peine de prison de 15 ans.
Alain Vandette, âgé de 59 ans, a appris son sort vendredi après-midi. La détention préventive a été déduite de la peine prononcée, ce qui lui laisse 10 ans et demi à passer derrière les barreaux.
Il avait été arrêté à Montréal pour ses crimes en 2019 et avait plaidé coupable deux ans plus tard.
Il s’agit de l’une des peines les plus sévères imposées pour ce genre de crime, a déclaré le procureur de la Couronne Me Jérôme Laflamme.
Normalement, les procès doivent avoir lieu dans le pays où les infractions criminelles ont été commises. Mais depuis 1997, il est possible de poursuivre au Canada les citoyens qui commettent des crimes sexuels contre des enfants à l’extérieur de ses frontières. C’est pourquoi Alain Vandette a dû répondre de ses gestes abjects dans une salle de cour du palais de justice de Montréal.
Il s’agit là d’une « forme de colonialisme particulièrement ignoble », a dénoncé le juge Alexandre Dalmau, de la Cour du Québec.
« Le Canada a le bras long », a commenté Me Laflamme en sortant de la salle de cour, avec ce message pour les Canadiens qui seraient tentés de commettre des crimes sexuels à l’endroit d’enfants à l’étranger : « On va vous poursuivre. »
Vandette s’est posé en sauveur de l’enfant qu’il a agressée et de sa mère, car il subvenait à leurs besoins. Selon ses dires, la femme travaillait pour 50 cents par jour à nettoyer les toilettes d’une station-service, et l’enfant n’avait aucun jouet.
Le juge ne s’est pas laissé émouvoir par ses paroles : il y voit plutôt « une parfaite démonstration de l’exploitation sexuelle d’une enfant se trouvant dans une situation de grande pauvreté, donc de grande vulnérabilité ».
Selon Vandette, la mère est actuellement en prison à Cuba. L’avocat du quinquagénaire n’a pas voulu parler aux journalistes vendredi.
Les agressions perpétrées sur la fillette, de ses 7 ans jusqu’à l’âge de 14 ans, sont fréquentes, répétées et dégradantes — et impliquent souvent la mère de l’enfant, que Vandette a épousée en 2013. Il a ensuite pris d’innombrables photos — plus de 1000 — et quelque 500 vidéos où la petite victime est exploitée. L’homme a aussi été condamné pour possession et production de pornographie juvénile.
« Un nom et un visage »
Le magistrat a détaillé dans son jugement les crimes sexuels commis, mais leur récit sera épargné aux lecteurs.
On retient toutefois qu’il y a écrit que Vandette et la mère ont « utilisé l’enfant comme un objet, un jouet sexuel, sans aucune considération pour son humanité ».
« Ils l’ont plutôt déshumanisée pour la satisfaction sexuelle du délinquant. »
Mais pour le juge, la fillette « est une enfant avec un nom et un visage ». Il souligne qu’il l’a vue en vie, bouger, grandir et vieillir au fil des photos et des vidéos qu’il a dû regarder. Il écrit avoir pu voir et entendre la victime dans toute son humanité, cherchant vraisemblablement à lui redonner la dignité que Vandette lui a dérobée.
Le magistrat souligne qu’il a été un témoin direct des agressions en raison des vidéos qu’il a dû regarder. À cet égard, il souligne le dur, mais nécessaire travail des enquêteuses policières au dossier.
Le juge Dalmau estime qu’Alain Vandette n’a aucune empathie et qu’il tente de justifier ses gestes et de les minimiser, par exemple avec ces phrases prononcées à l’enquête pour remise en liberté : « en vacances, tu es en vacances, c’est pas pareil » , « c’est commun là-bas », ajoutant que c’est la mère de la fillette qui l’a entraîné et qu’il « s’est laissé bercer là-dedans », en faisant complètement abstraction du fait qu’il consommait de la pornographie juvénile bien avant de la rencontrer.
Après le prononcé de la peine, Me Laflamme a déclaré que « la poursuite pense beaucoup à la victime », qui a maintenant 17 ans : « On n’a pas pu la rencontrer, on ne la connaît pas, mais elle est dans nos pensées et on espère qu’elle ira bien. »
« On lui souhaite une vie paisible. »