Alliance des professeures et des professeurs de Montréal: bientôt un ministre à l’écoute ?

André Lavoie
Collaboration spéciale
Certaines écoles de Montréal sont vraiment vétustes. Un problème que le nouveau ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, se dit prêt à constater de ses propres yeux.
JACQUES NADEAU Archives LE DEVOIR Certaines écoles de Montréal sont vraiment vétustes. Un problème que le nouveau ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, se dit prêt à constater de ses propres yeux.

Ce texte fait partie du cahier spécial Syndicalisme

La nomination de Bernard Drainville à la tête de l’Éducation suscite un espoir modéré.

Dans les milieux syndicaux liés au secteur de l’éducation, quelques noms circulaient, de même que des rumeurs sur celui ou celle qui allait remplacer Jean-François Roberge au poste de ministre après l’élection du 3 octobre. Certains voyaient déjà Sonia Lebel, depuis reconduite dans ses fonctions de présidente du Conseil du trésor. Et si tous s’entendaient pour dire que l’animateur de radio Bernard Drainville ne serait pas que simple député, son arrivée au ministère de l’Éducation en a surpris plus d’un.

« On ne l’avait pas vu venir ! » confesse Catherine Beauvais-St-Pierre, présidente de l’Alliance des professeures et des professeurs de Montréal. Mais une fois l’étonnement dissipé, la syndicaliste reconnaît qu’il faut à la fois tirer des leçons du précédent mandat caquiste… et donner la chance au coureur.

« Nous demandions depuis un bon moment un changement de ministre et, là, on en a un nouveau, résume, philosophiquement, celle qui a enseigné plusieurs années au niveau primaire à Montréal. D’autant plus que l’on ne cessait de nous répéter qu’on n’avait jamais eu un ministre qui avait duré aussi longtemps à ce poste. Désolée, mais ce n’est pas un marathon ! » Ce changement était devenu impératif tant les attentes à l’égard de Jean-François Roberge étaient hautes — enseignant pendant 17 ans, en plus de signer l’essai Et si on réinventait l’école ? — et furent souvent déçues. L’implantation de la maternelle 4 ans et la fin des commissions scolaires pour les remplacer par des centres de services, et ce, quelques mois à peine avant le début de la pandémie en 2020, ont laissé des traces.

Désertion et vétusté

 

L’ancien ministre était porteur d’une vision, posture fort louable, mais celle-ci peut parfois s’avérer étouffante. « On a vu la même chose avec des ministres de la Santé qui arrivaient avec leurs interprétations, rappelle Catherine Beauvais-St-Pierre. Ils les défendaient… Sans écouter ce que les autres avaient à dire. Alors, la première chose que l’on souhaite avec l’arrivée de Bernard Drainville, c’est qu’il écoute les professeurs. Et particulièrement ceux de Montréal. »

En effet, il y a presque toujours eu une « déconnexion » avec le milieu scolaire montréalais, déplore la présidente de l’Alliance. Un milieu qui fait bien sûr face à des enjeux que l’on retrouve un peu partout au Québec, mais qui sont beaucoup plus criants dans la métropole. À commencer par la compétition féroce des écoles privées et la pénurie de main-d’oeuvre. « Le problème persiste depuis plusieurs années, et ce, bien avant la pandémie. Ce n’est pas normal de voir des enseignants déserter la profession après quatre ans d’université et cinq ans de pratique. N’importe quelle entreprise voyant 25 % de son personnel quitter dans les premières années fait son examen de conscience. »

Ce n’est d’ailleurs pas le seul défi qui attend le ministre Drainville. Catherine Beauvais-St-Pierre l’invite à constater par lui-même la vétusté avancée des écoles montréalaises ; une invitation pressante à laquelle Jean-François Roberge faisait la sourde oreille, de même que le premier ministre. « J’ai croisé François Legault le printemps dernier dans une belle école rénovée, et je lui ai dit de venir faire un tour dans une typique école montréalaise ; celles où des lavabos sont condamnés et des morceaux de briques nous tombent sur la tête. Il a répondu que ce n’était pas nécessaire, qu’il connaissait la situation… »

L’école, une priorité ?

Or, celle-ci n’a pas beaucoup changé, selon la présidente de l’Alliance, fondant certains espoirs en Bernard Drainville, qui se dit prêt à effectuer plusieurs visites pour constater de visu l’état des lieux et évaluer le moral des troupes. Car si le gouvernement Legault affirmait en 2018 que l’éducation était une priorité, renouvelant cette promesse en octobre dernier, Catherine Beauvais-St-Pierre cherche encore la véritable volonté politique. Celle, par exemple, de freiner les disparités engendrées par le phénomène de l’école à trois vitesses (l’école privée, l’école publique avec programmes particuliers et l’école ordinaire) et d’améliorer les conditions d’enseignement.

« Les professeurs n’arrivent pas à faire leur travail, déplore la présidente de l’Alliance. Là est le véritable problème de pénurie de main-d’oeuvre, et ce n’est pas en ramenant des retraités ou des enseignants qui ont quitté la profession qu’on va le régler. Avec Bernard Drainville, nous sommes prêts à discuter des problèmes, mais aussi des solutions, car nous en avons. » L’heure est donc à tendre la main… et l’oreille.

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