Baisse du nombre d’étudiants dans les universités

Les inscriptions sont à la baisse cet automne dans les universités québécoises, particulièrement au premier cycle, qui enregistre une diminution de 2,5 %. Une situation que les établissements surveillent de près et qui s’explique notamment par la pénurie de main-d’oeuvre, plusieurs préférant travailler plutôt qu’étudier. En parallèle, les inscriptions des étudiants étrangers continuent de leur côté de monter en flèche, avec des niveaux qui atteignent un sommet.
Près de 312 000 étudiants fréquentent l’université ce trimestre et, tous cycles confondus, les inscriptions ont diminué de 1,4 % par rapport à l’automne dernier, indiquent des données préliminaires en provenance des universités et compilées par le Bureau de coopération interuniversitaire (BCI). « Ce recul est attribuable essentiellement aux personnes optant pour un cheminement à temps partiel », peut-on lire dans le rapport. Le BCI n’a pas souhaité accorder d’entrevue ni répondre à nos questions.
La grande majorité des universités sont touchées. HEC Montréal est parmi les établissements qui enregistrent la plus grande baisse au Québec, avec une chute de 5,4 % au premier cycle. C’est surtout du côté des étudiants à temps partiel que le bât blesse, avec une diminution de plus de 9 % des inscriptions, explique en entrevue avec Le Devoir le directeur des études, François Bellavance.
« C’est dans les programmes de certificat que c’est un peu plus préoccupant. C’est à cause du contexte socioéconomique et de la pénurie de main-d’oeuvre, avance-t-il. En cette période de post-pandémie, les gens ont moins de difficulté à trouver un emploi à temps plein. »
Un constat partagé par l’Université de Montréal (UdeM), qui enregistre de son côté une diminution de près de 4 % au premier cycle. « Ce sont surtout les programmes non contingentés et sensibles au marché du travail qui connaissent une baisse », explique la porte-parole, Geneviève O’Meara.
« On surveille ça de près », renchérit Murielle Laberge, rectrice de l’Université du Québec en Outaouais (UQO), où il y a une baisse de 3,6 % au premier cycle.
Les employeurs font pression sur leurs employés pour qu’ils travaillent plus d’heures, constate-t-elle, ce qui leur donne moins de temps pour étudier. « Nous avons eu une baisse importante chez les étudiants à temps partiel, notamment dans le programme de sciences infirmières, souligne la rectrice. Nous ne sommes pas étonnés compte tenu de la pénurie dans le réseau de la santé et des demandes d’heures supplémentaires. »
Rebond de la pandémie
Est-ce un problème que des étudiants priorisent le travail plutôt que les études ? « C’est important que les gens continuent de se scolariser, parce que ça a des conséquences sur leur vie personnelle [comme leurs conditions de travail] et sur l’économie et le bien-être de la société », pense Murielle Laberge. La rectrice de l’UQO rappelle toutefois que les baisses d’inscription sont cycliques.
À l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), où il y a une baisse d’inscrits de 3,82 % au premier cycle, le recteur mentionne qu’il y a eu un bond d’inscriptions « atypiques » à temps partiel lors de la pandémie. La situation revient donc plus à la normale cet automne.
« Il y a des effets pandémiques dans tout ça, souligne Christian Blanchette. La formation à distance rendait les cours plus accessibles, et des personnes en ont profité pour s’inscrire. Rappelons-nous, nous ne pouvions plus aller au restaurant ou au théâtre, nous étions confinés à la maison. »
La baisse démographique a également des retombées. « C’est à la fin de la décennie en cours qu’on verra remonter le nombre de jeunes d’âge universitaire », dit-il.
À l’UQAM, la chute du nombre d’inscriptions se poursuit. L’établissement avait connu une baisse de 8 % au premier cycle l’année dernière, ce qui avait déclenché une réflexion au sein de l’institution. Cet automne, les inscriptions au baccalauréat et au certificat ont diminué de 4,6 %.
L’établissement a préféré commenter la situation par écrit plutôt que de nous accorder une entrevue. « L’UQAM étant reconnue depuis sa création pour accueillir des personnes étudiantes qui poursuivent des études à temps partiel, il est possible qu’un certain nombre d’entre elles soient retournées sur le marché du travail », souligne la porte-parole, Jenny Desrochers.
Hausse des étudiants étrangers
Les étudiants étrangers continuent de leur côté d’affluer au Québec, dans un retour en force à la suite de la disparition des restrictions sanitaires. En un an, le nombre d’inscrits tous cycles confondus a grimpé de 10,2 %. L’automne dernier, la hausse était de 12,4 % comparativement à 2020.
L’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), qui connaît une hausse de 18,9 %, parle d’un « record de tous les temps » avec plus de 2000 étudiants étrangers qui fréquentent l’établissement. « Ces chiffres dépassent les niveaux d’avant 2020 », souligne Guylaine Boivin, la directrice du Bureau de l’international.
C’est également le cas à l’UQTR, qui a enregistré une hausse de 12,41 % cette année. « Par rapport à nos données de 2019, c’est 27 % de hausse », souligne Christian Blanchette. Il explique que la croissance importante des activités de recherche de l’université a attiré des candidats étrangers aux études supérieures. « Dans bien des domaines hyperspécialisés, on ne fait pas le plein au Québec », dit-il.
À l’UQO, où il y a un bond appréciable de 30,7 % cet automne comparativement à l’année dernière, on est également dans une hausse marquée, même par rapport aux niveaux prépandémiques. « Avant la pandémie, il y avait une volonté très claire d’accroître notre recrutement, souligne la rectrice, Murielle Laberge. Aujourd’hui, nous commençons à récolter les fruits de cette stratégie. » Le recrutement se fait beaucoup par du bouche-à-oreille, ajoute-t-elle, et les demandes d’admission pour l’hiver 2023 ont augmenté de 80 % en trois ans.
Dans son rapport, le BCI souligne que la part des étudiants étrangers dans l’ensemble de la population étudiante a augmenté, passant de 15,6 % l’année dernière à 17,4 % cette année. Près d’un étudiant sur six fréquentant les universités québécoises n’est donc pas canadien ou résident permanent, souligne l’organisme.