Les universités se préparent à une hausse des demandes d’admission en génie

Leïla Jolin-Dahel
Collaboration spéciale
Des étudiants dans un laboratoire à l’École Gina-Cody de génie et d’informatique de l’Université Concordia
Photo: Université Concordia Des étudiants dans un laboratoire à l’École Gina-Cody de génie et d’informatique de l’Université Concordia

Ce texte fait partie du cahier spécial Enseignement supérieur

Des universités québécoises s’attendent à une hausse des demandes d’admission en génie après l’annonce du nouveau programme de bourses étudiantes destiné à lutter contre la pénurie de main-d'œuvre. Ces établissements espèrent néanmoins que d’autres moyens seront déployés pour que les universités soient en mesure de répondre à l’appel.

La mesure va « certainement faire augmenter » le nombre de demandes d’admission dans les programmes de génie, se réjouit Mourad Debbabi, doyen de l’École Gina-Cody de génie et d’informatique de l’Université Concordia. « Les annonces du gouvernement donnent de la motivation aux étudiants à venir vers nous », observe-t-il.

De son côté, Pierre Baptiste, professeur titulaire et directeur par intérim des affaires académiques et de l’expérience étudiante de Polytechnique Montréal, estime qu’il est encore trop tôt pour dire si l’initiative attirera davantage de futurs ingénieurs. « On pense que ça va avoir un impact à terme, mais, pour le moment, on ne l’a pas mesuré », explique-t-il.

Dès l’automne prochain, Perspective Québec, pour lequel le gouvernement investira 1,7 milliard de dollars sur quatre ans, offrira des bourses à certains programmes d’études postsecondaires dans des domaines qui connaissent une pénurie de main-d’œuvre. Sont concernés, entre autres, les secteurs du génie et des technologies de l’information, de même que ceux de la santé et l’éducation. Ainsi, les étudiants de ces programmes pourront toucher jusqu’à 9000 $ en bourses au cégep, 15 000 $ pour un baccalauréat de trois ans et 20 000 $ pour un cursus de quatre ans.

1,7 milliard
C’est le montant en dollars que le gouvernement investira dans le programme de bourses étudiantes.

Cet argent améliorera « considérablement » l’expérience étudiante et la réussite, croit M. Baptiste. « L’assiduité aux études sera renforcée non pas parce que les étudiants auront peur de perdre la bourse, mais parce qu’ils n’auront pas besoin de travailler en parallèle de leurs études », souligne-t-il.

Plus de moyens réclamés

 

M. Debbabi précise que la faculté a déjà commencé à recruter du personnel et des professeurs afin de pouvoir accueillir plus d’étudiants. Toutefois, cela implique également de rendre de nouveaux locaux disponibles. « Le seul maillon qui manque à la chaîne, c’est répondre au besoin en matière d’espace. J’espère qu’on aura des annonces à cet égard », souhaite-t-il.

Du côté de Polytechnique Montréal, on prévoit d’abord de traiter les demandes d’admission avant de prendre la décision de mettre sur pied des mesures supplémentaires. « On est assez réactifs et on ouvrira des classes au besoin au moment où les étudiants seront identifiés comme arrivants », explique M. Baptiste.

Si tous les programmes de génie sont visés par les bourses à l’Université Concordia, ce n’est pas le cas à Polytechnique Montréal. Le génie biomédical, le génie aéronautique et le génie chimique sont exclus de l’initiative du gouvernement du Québec. « Dans ces trois programmes, on a à peu près 52 % de femmes, alors que, dans les neuf autres concernés par les bourses, on n’en a que 26 % », note M. Baptiste.

L’établissement s’inquiète toutefois des effets que l’exclusion de ces trois programmes aura sur le nombre d’étudiantes qui feront une demande d’admission. « C’est difficile de mesurer l’impact d’une décision avant qu’elle ait été appliquée, mais, effectivement, c’est une préoccupation, dit M. Baptiste. Si elles vont dans d’autres programmes de génie, on n’en aura pas perdu, mais ça ne semble pas forcément une stratégie gagnante pour attirer plus de femmes. »

L’établissement va jusqu’à craindre pour la survie du programme de génie chimique, si le nombre d’admissions vient à chuter. « On a déjà fait un sondage auprès d’étudiants. Et il y en a qui parlent de changer de programme et d’aller vers ceux qui seront concernés par les bourses », observe-t-il. Selon l’Ordre des ingénieurs du Québec, le génie chimique connaît d’ailleurs un déficit de 9 % de main-d’œuvre dans la province.

Retenir les talents ici

 

En vertu des règles établies par le ministère de l’Enseignement supérieur, seuls les étudiants qui sont citoyens canadiens nés au Québec et les résidents permanents qui vivent dans la province sont admissibles aux bourses. Mais une fois diplômés, demeureront-ils ici pour intégrer le marché du travail ? M. Baptiste n’a « aucun doute là-dessus ». « Les étudiants concernés resteront au Québec à coup sûr. Ils vont parfois faire une expérience à l’étranger, mais reviennent toujours », observe-t-il.

Pour M. Debbabi, les mesures annoncées par Québec combleront les besoins en matière de main-d’œuvre. Il estime d’ailleurs que la plupart des étudiants arrivent à trouver par la suite des emplois assez bien rémunérés. « Je pense que ça va continuer à retenir nos diplômés au Québec. »

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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