Des psychoéducateurs très occupés
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial École publique
Nous avons tous dû nous adapter à des changements perturbants depuis le début de la pandémie. Enfants, adolescents et jeunes adultes ont d’abord tous été privés d’habitudes essentielles, puis, ils ont renoué avec un quotidien qui ressemble à leur vie d’avant, sans la retrouver complètement. Leurs habiletés d’adaptation ont été mises à rude épreuve. L’adaptation est précisément au cœur de la mission des psychoéducateurs, qui font face à un afflux de cas d’anxiété dans le milieu scolaire.
Ils sont environ 1500 à accompagner les élèves au quotidien pour les aider à surmonter leurs difficultés, soit près d’un tiers des membres de l’Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec (OPPQ). « Ils peuvent intervenir auprès d’élèves en difficulté — troubles d’apprentissage ou de comportement, anxiété ou autre — et faire le lien avec les parents ou des intervenants dans le domaine médical ou psychosocial notamment », explique le président de l’OPPQ, Denis Leclerc.
Ces experts ont également un rôle de conseil et de prévention à l’école. « Ils peuvent aider les enseignants à gérer leur classe et travaillent également avec des approches plus globales. La gestion de la cour d’école pour éviter ou gérer les conflits, les stratégies face aux situations d’intimidation ou les activités en classe sur des problématiques (des habiletés sociales de base au primaire à la gestion de la délinquance ou la consommation de drogue au secondaire) sont autant d’exemples d’activités préventives qui touchent l’ensemble des élèves », énumère le président.
De leur bureau à la cour d’école, les psychoéducateurs travaillent à développer un milieu bienveillant. « Une situation d’intimidation sera par exemple gérée davantage par une éducation à la tolérance que par une sanction. Cette approche a un impact sur les habiletés sociales et l’acceptation des différences, et les écoles qui vont le plus loin dans cette direction ont moins de conflits à gérer », observe M. Leclerc. Les psychoéducateurs travaillent en collaboration avec les directions d’établissements, les enseignants, surveillants et autres intervenants (éducateurs, orthopédagogues, orthophonistes, psychologues, etc.), les élèves et les parents, qu’ils conseillent, orientent, informent et soutiennent.
Des experts en adaptation
S’il y a un mot-clé dans la trousse à outils du psychoéducateur, c’est bien l’adaptation. « Le psychoéducateur a une expertise dans les capacités et difficultés d’adaptation des personnes », explique Denis Leclerc, pour qui cette habileté recouvre deux angles complémentaires. Le psychoéducateur évalue les capacités d’adaptation de l’élève, les défis adaptatifs de son environnement (école, amis, famille) et l’interaction entre ces deux réalités, pour proposer des solutions.
Les défis ne manquent pas à l’école pour ces experts qui peuvent par exemple intervenir auprès d’un jeune suicidaire ou dépressif pour l’orienter vers les bons services, expliquer aux parents que leur enfant n’est pas « têtu mais a des difficultés d’apprentissage, ou organiser une activité au cours de laquelle les enfants apprendront des habiletés. Les parents des élèves, notamment ceux en difficulté, sont précieux dans la réussite de leur travail.
C’est la hausse du nombre de Québécois de 12 à 17 ans qui ont été admis à l’Hôpital de Montréal pour enfants pour des raisons de santé mentale à la suite d’une visite aux urgences en janvier et février 2021, par rapport à la même période l’année précédente.
« Les intervenants en milieu scolaire recherchent avant tout le bien-être de l’enfant, et le meilleur niveau de communication et de collaboration avec les parents est toujours gagnant », souligne M. Leclerc.
Les nouveaux défis de la pandémie
Ces experts en adaptation sont très sollicités depuis le début de la crise sanitaire. « Les élèves ont dû s’adapter aux fermetures d’écoles, à l’apprentissage en ligne, au port du masque, au manque de socialisation etc., ce qui a entraîné des impacts importants pour les plus fragiles, comme de l’anxiété, des problèmes de santé mentale ou de la détresse psychologique »,constate Denis Leclerc. Avec des manifestations allant du jeune devenu violent et agressif à celui qui se referme au contraire sur lui-même.
« La réouverture des écoles peut relancer de l’anxiété ou une phobie scolaire. L’anxiété peut aussi être liée aux vaccins, à la peur d’attraper la maladie ou aux résultats scolaires », dit le président de l’OPPQ.
En janvier et février 2021, le nombre de Québécois âgés de 12 à 17 ans admis à l’Hôpital de Montréal pour enfants pour des raisons de santé mentale à la suite d’une visite aux urgences a augmenté de 40 % par rapport à la même période l’année précédente. Le D Martin Gignac, directeur médical du service de psychiatrie de l’hôpital, rapportait en mai 2021 un nombre alarmant de jeunes en détresse.
Denis Leclerc est particulièrement préoccupé par les adolescents, qui ont perdu leurs repères à une période importante de leur vie. « Cela fait presque deux ans qu’ils n’ont pas la possibilité de se côtoyer autant qu’ils le souhaitent alors que cela fait partie de leurs besoins fondamentaux. Parfois, les adultes ont tendance à relativiser ces problèmes en comparaison avec des soucis financiers ou de santé qui peuvent paraître objectivement plus grands. Mais il faut être conscient des défis que ces jeunes rencontrent par rapport à leur âge et leur développement. Ne pas les culpabiliser ni banaliser ou au contraire dramatiser la situation, en restant à l’écoute. »
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