L’aide en santé mentale dans les écoles arrive un an après l’annonce

À peine 44% des écoles du Québec se trouvent dans un état jugé satisfaisant, comparé à 46% l’an dernier, ce que le ministre Jean-François Roberge juge «gênant».
Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne À peine 44% des écoles du Québec se trouvent dans un état jugé satisfaisant, comparé à 46% l’an dernier, ce que le ministre Jean-François Roberge juge «gênant».

Un programme d’urgence de 30 millions de dollars pour soutenir la santé mentale des élèves éprouvés par la pandémie, annoncé en octobre dernier, arrivera dans les écoles près d’un an plus tard, à la rentrée scolaire de septembre prochain.

La députée péquiste Véronique Hivon a talonné mercredi le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, sur ce délai de presque un an pour embaucher des intervenants en santé mentale et en dépendance dans les écoles. Les jeunes ont besoin d’aide dès maintenant pour affronter cette crise sans précédent, a-t-elle fait valoir lors de l’étude des crédits en éducation.

« Le ministre était-il au courant que le programme serait déployé un an plus tard ? Ç’a été annoncé le 1er octobre, en pleine deuxième vague, [parce que] c’était urgent d’intervenir avant que les choses s’aggravent encore plus, et ça va être déployé un an plus tard. Je trouve ça absolument insoutenable, intolérable, grave », a lancé Véronique Hivon lors d’une commission parlementaire de quatre heures où le ministre Roberge a dû défendre ses priorités pour la prochaine année.

Ce programme de 30 millions pour soutenir les jeunes avait été annoncé l’automne dernier par le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant. Celui-ci a admis en commission parlementaire, la semaine dernière, que les premiers intervenants entreraient en fonction pour l’année scolaire 2021-2022.

« Le programme et les intervenants [en dépendance et en santé mentale] vont arriver dans les écoles en septembre 2021. La formation a commencé. Il va y en avoir dans toutes les écoles », a expliqué le ministre Carmant en réponse à une question du député péquiste Joël Arseneau.

Le ministre de l’Éducation a indiqué qu’il trouve « urgent que ces sommes-là soient engagées pour que les renforts arrivent dans les écoles ». Il doit d’ailleurs annoncer ce jeudi une série de mesures pour la réussite des élèves en temps de pandémie, pour faire suite à son sommet tenu au cours du printemps.

Le ministre Roberge a expliqué mercredi que le réseau scolaire « n’a pas attendu » les intervenants en santé mentale du programme de 30 millions de dollars pour soutenir les élèves. « Les centres de services scolaires se sont mobilisés » pour offrir une série d’initiatives en soutien aux élèves et au personnel. Il a aussi précisé que 133 intervenants ont été embauchés ou sont en voie de l’être dans toutes les régions, en vertu du programme École en forme et en santé.

Des écoles en mauvais état

 

L’étude des crédits a aussi révélé que l’état des écoles s’est dégradé malgré des investissements records dans l’entretien des bâtiments. À peine 44 % des écoles du Québec se trouvent dans un état jugé satisfaisant, comparé à 46 % l’an dernier, ce que le ministre Jean-François Roberge juge « gênant ».

« Il reste encore beaucoup, beaucoup de travail à faire, je le reconnais. C’est un petit peu gênant […], il faut s’y attaquer », a lancé le ministre de l’Éducation.

La députée Christine Labrie, de Québec solidaire, a rappelé que le ministère cherchait à ce que 85 % des immeubles scolaires soient dans un état jugé satisfaisant pour 2021-2022. Il y a urgence d’agir : des enseignants rapportent la présence de souris, de coquerelles et de toits qui coulent dans les écoles, a-t-elle rappelé.

Le gouvernement Legault investit pourtant des sommes records pour rénover des écoles — 8,32 milliards de dollars en trois ans —, mais le déficit d’entretien est considérable à cause de la négligence des gouvernements depuis des décennies, a plaidé le ministre Roberge.

La députée solidaire reproche au gouvernement d’avoir réduit la taxe scolaire de 1,5 milliard par année, ce qui réduit la marge de manœuvre pour investir dans les écoles. Mais Québec a compensé entièrement cette baisse de revenus dans le budget de l’éducation, rappelle Jean-François Roberge. La surchauffe de l’industrie de la construction et la pénurie de travailleurs limitent les projets de rénovation d’école, et non le manque de fonds, selon lui.

Gouvernance scolaire

 

De son côté, la députée Marwah Rizqy a questionné le ministre Roberge sur le moment où la Santé publique a informé le cabinet de son inconfort face aux prétentions qu’elle avait prétendument approuvé les protocoles pour tester la qualité de l’air dans les écoles. Le ministre a rappelé ses explications : « Les protocoles du ministère n’avaient pas été formellement validés par la Santé publique, j’avais utilisé ce terme-là alors qu’ils avaient été faits en concertation avec eux. »

La députée libérale a notamment posé des questions sur la pénurie de personnel (y compris les directions d’école), sur les maternelles 4 ans et sur la gouvernance scolaire. Mme Rizqy a soulevé le cas de l’école Saint-Donat, du Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), où le conseil d’établissement a été suspendu en raison d’une mésentente entre les parents et le personnel scolaire. Les parents ont déploré cette tactique visant à les faire taire — tandis que la nouvelle gouvernance vise justement à leur donner plus de pouvoir.

Le ministre a demandé à son cabinet de s’informer au sujet de ce nouvel accrochage au sein du plus important centre de services scolaire du Québec. Il dit être « préoccupé » par la démission de huit membres du conseil d’administration et par les difficultés à nommer une nouvelle direction générale, après le départ à la retraite du directeur Robert Gendron.

« On doit régler la situation très rapidement. On suit ça de jour en jour », a dit le ministre Roberge. Il n’envisage pas de mettre le CSSDM sous tutelle pour l’instant.

La députée Véronique Hivon a déploré le projet de code d’éthique qui impose un devoir de « loyauté » et de « solidarité » aux administrateurs. « La réforme des commissions scolaires est vraiment un échec, a-t-elle dit. On a complètement enlevé aux parents la capacité de jouer un rôle actif. » Le ministre Roberge a rappelé que les anciens commissaires scolaires avaient aussi un devoir de loyauté.

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