La TELUQ veut transmettre son expertise

Charlotte Mercille Collaboration spéciale
À l’origine, et aujourd’hui encore, la téléuniversité se voulait un lieu où éduquer des étudiants qui ne cadrent pas dans le mode traditionnel de l’enseignement universitaire.
Illustration: Tiffet À l’origine, et aujourd’hui encore, la téléuniversité se voulait un lieu où éduquer des étudiants qui ne cadrent pas dans le mode traditionnel de l’enseignement universitaire.

Ce texte fait partie du cahier spécial Enseignement supérieur

De l’enregistrement par cassette aux webinaires, l’Université TELUQ trace le chemin de l’enseignement à distance depuis 48 ans. L’établissement aide présentement les enseignants à faire davantage que simplement transporter leur contenu en classe vers la salle de réunion Zoom. Or, les universités se montrent réticentes à collaborer.

Longtemps le parent pauvre de l’éducation, l’enseignement à distance est devenu cette année un art nécessaire. Il demande toute une ingénierie pédagogique différente de son cousin présentiel. « Ce sont comme des voitures différentes : les deux roulent, mais c’est sous le capot que ça se passe », illustre Lucie Laflamme, directrice de l’Université TELUQ. L’expertise de son établissement réside dans le soin apporté à la conception sur mesure de formations virtuelles.

À l’origine, et aujourd’hui encore, la téléuniversité se voulait un lieu où éduquer des étudiants qui ne cadrent pas dans le mode traditionnel de l’enseignement universitaire. La plupart ont déjà décroché un emploi ou fondé une famille et désirent pouvoir suivre les cours en format asynchrone. Les études ne forment donc pas leur projet principal. Cette adaptabilité attire énormément cette portion de la population étudiante, qui n’aurait probablement pas entamé d’études sans cette offre en ligne.

Ainsi, le concept de session à la TELUQ se veut éclaté, parce que l’individu passe avant la cohorte, et que le curriculum s’adapte autant à son parcours d’étudiant qu’à ses expériences professionnelles. De plus, chaque élève est accompagné par un professeur ou un tuteur individuellement. Un étudiant de la TELUQ peut donc condenser son parcours en six mois, ou bien étaler le tout sur six ans. « C’est lui qui choisit le moment où il veut étudier en fonction de sa propre réalité », résume Lucie Laflamme.

La TELUQ détient aussi l’avantage de l’agilité, une qualité convoitée en temps de pandémie. Avec seulement une centaine de professeurs, il est plus facile d’atteindre le consensus au moment d’adapter le contenu d’un cours. Enfin, l’établissement abrite le plus grand département consacré à la formation à distance. Six professeurs se consacrent à l’enseignement des rouages de l’éducation en ligne.

Cela dit, la directrice indique que l’enseignement à distance exige une bonne préparation, autant technologique que psychologique, ce qui n’a malheureusement pas été possible dans le cadre urgent de la pandémie. « Les universités ont beaucoup d’outils technologiques, mais il existe un monde entre subir et suivre une formation à distance », dit-elle.

Numérique 2020 et J’Enseigne à distance

Le savoir-faire de la TELUQ voyage à travers le réseau des universités du Québec et ailleurs dans le monde, notamment, grâce au colloque Numérique 2020 qui s’est tenu au début du mois de novembre. Le ministère de l’Éducation a mandaté l’établissement pour qu’il transmette ses connaissances à ses pairs.

Le petit congrès, qui devait rassembler 300 personnes, a finalement explosé dans l’espace numérique pour accueillir 1000 participants venant du Québec, du Canada et de l’étranger. Au fil des discussions, les experts ont par exemple proposé de découper la durée classique de trois heures propres aux cours magistraux en tranches d’une heure. Cette formule donnerait plus de pauses au cerveau malmené par les temps d’écrans astronomiques actuels.

Au courant de l’été, toujours à l’invitation du ministère, la TELUQ a enseigné les rudiments de l’enseignement à distance aux pédagogues œuvrant tant au primaire qu’à l’université. Le microprogramme J’enseigne à distance a enregistré près d’un million de visites et délivré des milliers d’attestations, selon Lucie Laflamme.

Une collaboration boiteuse

 

Serge Gérin-Lajoie, professeur spécialiste en formation à distance à la TELUQ et organisateur du colloque Numérique 2020, estime toutefois que la collaboration entre établissements n’est pas suffisante. Les pédagogues déjà formés en la matière brassent leurs bonnes pratiques à titre informel, au même titre que les comptables ou les avocats le font, mais la direction n’emboîte pas le pas.

Le travail en vase clos est encouragé par la compétition pour le financement. Si les universités envoient leurs étudiants du côté de la TELUQ, le temps d’adapter leur curriculum à la nouvelle réalité numérique, elles courent le risque de perdre le financement des inscriptions. Serge Gérin-Lajoie propose de revoir le modèle de financement, en instaurant par exemple une ristourne financière pour l’université qui choisirait d’envoyer des cohortes bénéficiant de l’expertise de la TELUQ ou d’autres organisations mieux outillées.

« Il faut trouver une situation profitable à tous pour mutualiser les étudiants, en divisant entre autres les coûts de développement et les revenus. Et le tout se planifie », insiste-t-il. La proposition vaut pour les autres universités, où les facultés de médecine, par exemple, pourraient partager autant les élèves que les infrastructures numériques. Il reste à voir si le contexte de concurrence actuel pourra s’amenuiser devant l’impératif de mieux transmettre le savoir dans la nouvelle arène virtuelle.

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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