Québec retire sa liste des écoles touchées par la COVID-19

Plusieurs écoles touchées ne sont jamais apparues dans les listes, alors que d’autres y ont été mises par erreur.
Photo: Annik MH de Carurel Archives Le Devoir Plusieurs écoles touchées ne sont jamais apparues dans les listes, alors que d’autres y ont été mises par erreur.

Source de vives critiques, « truffée d’erreurs » ou simplement très en retard sur la réalité du terrain, la liste des écoles touchées par des cas de COVID-19 a été retirée jeudi du site Internet du gouvernement. Il n’y a ainsi rien qui permette aujourd’hui d’avoir un état des lieux complet de la propagation du virus au sein du réseau scolaire québécois.

« Le système de cueillette des données relatives à la COVID-19 dans les établissements scolaires, en implantation depuis peu, fait présentement l’objet d’ajustements », indiquait en fin de journée le site officiel sur la situation du coronavirus au Québec.

« La mise à jour des documents présentant le portrait global de la situation dans les établissements scolaires est temporairement suspendue », mentionnait-on.

Vendredi matin, le ministère de la Santé a précisé que, « comme le système de cueillette des données relatives à la COVID‑19 présentait des disparités avec l’information véhiculée sur le terrain, des travaux d’amélioration au processus ont été entrepris ». Une nouvelle liste sera publiée quand les « travaux » seront terminés, assure-t-on.

La semaine dernière, le ministre Christian Dubé promettait de « présenter quotidiennement [à compter de cette semaine] les données des cas rapportés dans l’ensemble des établissements scolaires. » Il avait dit souhaiter « que cet outil permette à la population, et plus particulièrement aux parents, d’obtenir un portrait actuel de la situation. »

Son collègue de l’Éducation, Jean-François Roberge, avait ajouté que « la transparence et la libre circulation des renseignements sont primordiales ». Les cabinets de MM. Roberge et Dubé n’ont pas voulu faire de commentaires jeudi.

Décalage

 

Les dernières données affichées en ligne dataient du 4 septembre. Au moins 70 établissements déclaraient alors des cas parmi les élèves ou le personnel, et 50 autres établissements avaient signalé un cas potentiel. Une compilation du nombre de cas rapportés par région et par centre de services scolaire était aussi disponible.

Mais depuis, plusieurs écoles avaient signalé des cas aux parents de leurs élèves, sans que leur nom ait jamais été intégré à une liste-repère.

Jeudi, le Centre de services scolaire Marie-Victorin, sur la Rive-Sud de Montréal, confirmait par exemple 20 cas parmi ses établissements : la liste gouvernementale n’en faisait pas mention. Même chose pour le Centre de services scolaire de Montréal, qui comptabilisait 24 cas (mais zéro selon la liste du gouvernement).

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De plus, le nom de certaines écoles s’était retrouvé dans la liste alors qu’aucun cas n’y avait été déclaré.

Avant de retirer la liste de l’espace public, le ministère de la Santé avait indiqué au Devoir être « conscient que [celle-ci] est perfectible ». Le ministère disait avoir « travaillé pour mettre rapidement en ligne [la liste] la semaine dernière ».

Il rappelait aussi « qu’il ne s’agit pas d’une ressource pour les parents qui souhaitent savoir s’il y a un cas positif à l’école de leur enfant. Les écoles où un cas positif de COVID est déclaré communiquent directement avec les parents ».

Mais à quoi servait donc une liste qui n’était pas à jour et à laquelle les parents ne pouvaient pas se fier ? « Avoir une bonne liste, c’est pertinent et essentiel, mais celle du gouvernement est beaucoup trop erronée pour être utile », répondait jeudi après-midi la porte-parole de l’opposition en matière d’éducation, Marwah Rizqy. « Ça sème surtout la confusion », disait-elle.

Mme Rizqy rappelait que ce n’est pas la première fois que les informations transmises par Québec sont en décalage avec la réalité du terrain. La situation dans les CHSLD en début de pandémie de même que les problèmes d’approvisionnement en équipement de protection individuelle souffraient de carences similaires.

Aux yeux de la députée libérale, le fait que les parents et les élèves directement concernés sont prévenus par l’école si un cas survient — peu importe ce que disait la liste de Québec — ne changeait rien au fond du problème.

« D’une part, si les parents voient des contradictions entre ce que l’école dit et ce que le gouvernement dit, ils se posent des questions. Mais d’autre part, la situation dans les écoles n’intéresse pas seulement les parents, mais l’ensemble des Québécois. Tout le monde veut avoir l’heure juste. »

Pour y arriver, le président de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement, Nicolas Prévost, suggère au gouvernement de « simplifier le questionnaire » que chaque établissement doit transmettre quotidiennement à Québec. « On l’a déjà beaucoup allégé par rapport à la semaine dernière, dit-il, mais il faut encore [rapporter] chaque absence, même si elle n’est pas liée à la COVID. »

« Le ministère demande à avoir le motif : ça implique qu’on doit souvent faire la recherche, rappeler les parents, souligne M. Prévost. Il faut que les ministères de l’Éducation et de la Santé soient conscients du travail que ça demande pour arriver à transmettre l’information. »

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