L’éducation élitiste risque de se heurter à un mur

Les systèmes d’éducation les plus performants mélangent dans les mêmes classes les élèves riches, pauvres, qui ont les meilleurs et les moins bons résultats.
Photo: Skynesher Getty Images Les systèmes d’éducation les plus performants mélangent dans les mêmes classes les élèves riches, pauvres, qui ont les meilleurs et les moins bons résultats.

Programmes particuliers qui choisissent les élèves les plus performants, écoles privées qui accueillent les enfants les mieux nantis, élèves en difficulté regroupés dans des classes très ordinaires : le système d’éducation risque de se heurter à un mur à défaut de prendre un virage vers une meilleure mixité scolaire et sociale, prévient un groupe d’experts.

Les systèmes d’éducation les plus performants mélangent dans les mêmes classes les élèves riches, pauvres, qui ont les meilleurs et les moins bons résultats, rappelle le Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ). Les élèves moyens et faibles profitent de la présence d’élèves forts dans un groupe — sans que les meilleurs élèves soient pour autant tirés vers le bas.

Le Québec, lui, s’éloigne de cet idéal d’équité mis en place lors de la création du ministère de l’Éducation, dans les années 1960. Les programmes particuliers de l’école publique — international, sports-études ou arts-études — ont beau se multiplier, ils nuisent à la réussite globale des élèves québécois, affirme un rapport du CTREQ rendu public lundi.

« Je souhaite que le ministre [de l’Éducation] accepte que cette discussion-là se fasse. Si on ne réfléchit pas, je pense qu’on va “frapper un mur” », dit Claude Lessard, professeur émérite de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal et président du CTREQ.

« Dans notre rapport, il y a certainement le refus d’un renoncement, d’un défaitisme, d’un pessimisme, ça, c’est certain. La seule éthique possible pour les gens d’action, c’est l’optimisme », ajoute-t-il.

Bons programmes pour tous

 

Les experts du CTREQ se réjouissent de l’éclosion de mouvements citoyens comme L’École ensemble ou Debout pour l'école!, qui prônent la fin des écoles publiques à projet particulier et l’élimination du financement public des écoles privées.

Claude Lessard et ses collègues proposent, eux, un maintien du financement public des écoles privées, à la condition qu’elles s’engagent à accepter des élèves en difficulté. Les écoles publiques à projet particulier devraient aussi accepter tous les élèves, peu importe leurs résultats scolaires. Ces projets mettent trop l’accent sur la performance, selon les experts.

Ils estiment que les programmes particuliers et les programmes ordinaires devraient offrir un tronc commun de la plus longue durée possible.

 

« Il faut permettre aux élèves d’explorer un éventail d’intérêts le plus large possible. Ce n’est pas mauvais non plus de commencer un projet et de l’abandonner. Il faut noter que le programme international, par exemple, n’est pas conçu à la base pour être sélectif. Il est fondé sur des valeurs comme le vivre-ensemble, le bénévolat et l’engagement citoyen. Il n’y a qu’au Québec qu’on en a fait un programme réservé aux élèves ayant les meilleurs résultats », dit Claude Lessard.

Le rapport propose de plus que les indices de défavorisation soient revus pour que des élèves en difficulté qui vont à l’école dans un quartier favorisé aient accès à des services de soutien (orthopédagogue, psychoéducateur, etc.) Les indices de défavorisation actuels prévoient davantage de budgets pour les écoles situées dans des quartiers défavorisés.
 



Une version précécente de ce texte, qui faisait référence au mouvement L'école debout, a été modifiée.

 

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