Pour une bonne transition scolaire

Marie-Hélène Alarie Collaboration spéciale
Le projet Agir tôt reposera sur le déploiement d’une plateforme informatique qui pourra donner aux parents accès à des questionnaires offrant l’évalutation du profil développe-mental de leur enfant.
Photo: iStock Le projet Agir tôt reposera sur le déploiement d’une plateforme informatique qui pourra donner aux parents accès à des questionnaires offrant l’évalutation du profil développe-mental de leur enfant.

Ce texte fait partie du cahier spécial Éducation

Le 31 janvier dernier, François Legault, accompagné du ministre de la Santé et des Services sociaux, a annoncé la mise en place de l’initiative Agir tôt, une série de mesures qui permettront la détection et la prise en charge précoces des retards de développement chez les enfants. « Ça fait longtemps qu’on demande qu’il y ait intervention précoce, c’est un incontournable de la réussite de tous les enfants, lance Sonia Éthier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ). Toutefois, il faut que les ressources mises en place soient en nombre suffisant. »

En effet, si le nouveau programme déployé sur deux ans prévoit l’embauche de 800 professionnels, selon les calculs de la présidente de la CSQ, ce sont plutôt 1200 ressources supplémentaires qui seront nécessaires pour assumer le travail. Selon une enquête de l’Institut de la statistique menée en 2017 sur le développement des enfants, 11 % de ceux-ci âgés de moins de cinq ans présentaient des troubles de développement. « Ça représente 49 000 enfants ! Comment va-t-on arriver à les prendre tous en charge, c’est la grande question », affirme Sonia Éthier.

Trouver aujourd’hui tous ces professionnels pourrait s’avérer une tâche difficile quand on considère que le réseau de l’éducation vit déjà un manque de psychologues et d’orthophonistes. Toutefois, il est primordial aux yeux de la CSQ que lors de la prise en charge de l’enfant, celui-ci puisse avoir accès à ces services. Selon la présidente, « le seul moyen d’y parvenir est par le réseau public. Mais comment faire pour trouver ces ressources, c’est ce qui nous inquiète ».

De plus, avec les coupes qu’a déjà subies le réseau de l’éducation, Sonia Éthier est catégorique : « Il faut arrêter avec le financement en yo-yo. Pourtant, si on continue à baisser les impôts et les taxes, on risque de se retrouver encore dans un cycle d’austérité. C’est plus qu’une question de volonté et de discours, il faut que l’investissement soit garanti et non qu’il dépende des gouvernements. »

La présidente rappelle que le gouvernement précédent avait promis d’injecter 190 millions de plus en éducation entre 2018 et 2021 dans le programme de dépistage précoce Partir du bon pied au préscolaire et en première année du primaire : « Pour nous, il faut absolument que la CAQ maintienne le financement de cet engagement en milieu scolaire. Car il ne faudrait surtout pas que le projet Agir tôt […] remplace ce programme. Ceux-ci doivent s’inscrire en continuité », explique-t-elle.

Lors de l’annonce du projet Agir tôt, il a été précisé qu’il reposerait sur le déploiement d’une plateforme informatique qui donnerait aux parents accès à des questionnaires offrant l’évaluation du profil développemental de leur enfant afin que ce dernier puisse être orienté rapidement si nécessaire vers les services, et pris en charge par une équipe interdisciplinaire. Cette mesure éviterait, selon le gouvernement, les longues listes d’attente actuelles. Mais à la CSQ, on a des craintes en ce qui concerne le traitement des données personnelles des enfants : « Il faut être prudent, les dossiers des enfants sont confidentiels et il faut que les mécanismes mis en place garantissent aux parents que cette confidentialité soit conservée », explique la dirigeante syndicale.

Tout en respectant cette confidentialité, il est important que la première transition scolaire soit réussie. Pour y parvenir, la Centrale prône depuis longtemps le partage de l’information sur une base de collaboration et de coordination des actions de tous les acteurs du milieu. De plus, la création d’un poste d’intervenante pivot permettrait d’assurer le suivi du dossier de l’enfant du milieu de la petite enfance vers le milieu scolaire, tout en apportant un soutien aux parents et au personnel.

« L’éducation est une grande priorité pour notre gouvernement, mais ce l’est aussi pour moi, à titre personnel, a affirmé François Legault lors du lancement d’Agir tôt. Pour moi, ça ne fait aucun doute que l’éducation devrait être au centre des préoccupations d’un gouvernement. Je suis convaincu que c’est avec l’éducation que le Québec va réussir à saisir les occasions et à relever les défis qui nous attendent. Notre grande ambition, comme gouvernement, est de donner à tous nos enfants les moyens d’aller au bout de leur potentiel. Pour y arriver, on se doit d’agir tôt pour dépister les retards de développement et rapidement venir en aide aux enfants. »

Pour Sonia Éthier aussi, « l’important, c’est la réussite des enfants, mais celle-ci passe par une transition scolaire réussie, par la valorisation et par de bonnes conditions de travail des intervenantes afin qu’elles puissent offrir les services auxquels les enfants ont droit ».


Manifeste des intervenantes en petite enfance

Si Sonia Éthier souligne l’importance du rôle des intervenantes en petite enfance, c’est que ces dernières se sont fait malmener au cours des dernières années : « Avec la taxe famille — une modulation des tarifs en fonction des revenus instaurée par l’ancien gouvernement —, on a vu de nombreux parents fuir le réseau public au profit du privé. Depuis, les intervenantes en milieu familial et en centres de la petite enfance (CPE) doivent démontrer qu’elles ont des compétences et que leur réseau prépare bien les enfants à l’école. »

Récemment, la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec (FIPEQ-CSQ) lançait son manifeste, dont l’objectif est de mobiliser la population autour de l’importance de valoriser la profession dans un contexte où la pénurie frappe les CPE et le milieu familial public.

En septembre dernier, un sondage Léger démontrait que 56 % de la population trouvait que la profession n’était pas assez valorisée, contre 28 % qui trouvaient qu’elle l’était suffisamment.

La présidente de la FIPEQ-CSQ, Valérie Grenon, expliquait lors du lancement de la campagne J’élève la profession lancée en juin dernier que « les intervenantes tiennent à rappeler à la population qu’elles sont des professionnelles qui font partie intégrante du réseau des services publics. Il s’agit d’une profession très exigeante qui est cruciale pour le développement global des tout-petits. Nous lançons notre manifeste afin de souligner et de reconnaître leur travail essentiel ».

La présidente invite la population à signer le manifeste, et souhaite pouvoir se servir de ces bases pour construire un consensus social autour de l’importance de la profession.

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.



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