Québec tiendra le très attendu Forum sur l'avenir de l'enseignement collégial à Québec les 9 et 10 juin, au moment même où les étudiants n'occuperont plus les bancs des cégeps et où des centaines d'enseignants, de professionnels et de gestionnaires des collèges participeront à un colloque annuel au cégep de Saint-Hyacinthe.

Tout est sur la table en vue de ces consultations, exception faite de l'abolition pure et simple des cégeps et de l'imposition de droits de scolarité aux étudiants à temps plein. Le document de consultation rendu public hier propose une réflexion en profondeur — voire une remise en question complète — de l'enseignement collégial.

«De simples ajustements au système seront peut-être suffisants, mais il n'est pas exclu que des changements plus importants soient nécessaires. Je veux que toutes les questions soient posées, et je peux vous assurer qu'aucune réponse ne sera écartée sans examen», a affirmé le ministre de l'Éducation, Pierre Reid, en conférence de presse hier.

Quatre thèmes sont abordés dans le document de consultation et figureront au programme du forum: le modèle de l'enseignement collégial, le cheminement des étudiants, la contribution des collèges au développement des régions et le financement des cégeps. Sous forme de questions, le document de consultation ouvre la porte à des changements majeurs. Le modèle de régie des collèges est-il adéquat? Doit-on maintenir ou modifier le contenu actuel de la formation générale? Quels nouveaux partenariats pourraient être envisagés entre collèges et universités? Quels rapprochements plus serrés devrait-on réaliser entre les formations professionnelle et technique? Quelles autres sources de financement serait-il réaliste d'envisager pour appuyer l'action des collèges?

Pierre Reid envisage d'ailleurs une plus grande participation du secteur privé, sauf en pédagogie. Autrement, le ministre n'a pas voulu préciser le type de changements qu'il privilégie. «Si je ferme des portes ou si je donne des idées, c'est comme dire de ne pas participer parce que j'ai tout décidé», a-t-il expliqué.

À compter d'aujourd'hui et jusqu'au 21 mai, toute personne pourra se prononcer sur l'avenir de l'enseignement collégial grâce à un forum en ligne (www.forumcollegial.org). Les groupes concernés pourront déposer un mémoire jusqu'au 17 mai. Ces mémoires seront accessibles au public sur Internet.

Quelque 350 personnes seront invitées au forum public les 9 et 10 juin à Québec. Chaque collège pourra déléguer quatre personnes choisies par son conseil d'administration. Les syndicats, les associations étudiantes, les commissions scolaires, les universités et autres groupes interpellés par le sujet pourront aussi participer à l'événement.

Or la tenue du forum coïncide avec le début des vacances des étudiants. Qui plus est, l'Association québécoise de pédagogie collégiale tient son colloque annuel à Saint-Hyacinthe les 8, 9 et 10 juin. Des centaines d'enseignants, de professionnels et de gestionnaires des collèges seront sur place. Plusieurs personnes interpellées par le thème du forum brilleront donc par leur absence. Pierre Reid estime pouvoir tenir son forum en dépit de ces inconvénients.

«Il y a un problème d'agenda. Ça heurte de plein fouet le réseau», a affirmé Ronald Cameron, président de la FNEEQ-CSN, qui représente 12 500 enseignants. Le syndicat craint les consultations. «Quand on voit tous les chantiers qu'il veut ouvrir, toutes les remises en question que ça peut susciter, on est très inquiet», a-t-il dit. La CSQ et la Coalition-Cégeps ont aussi manifesté leur inquiétude hier.

La Fédération étudiante collégiale du Québec déplore que le forum se tienne alors que les étudiants seront en vacances. «On n'a pas confiance dans le ministre», a dit la présidente de cette fédération, Geneviève Hardy. Elle a souligné que le ministre annonce la tenue d'un forum une semaine après avoir réalisé des compressions de 63 millions de dollars dans l'aide financière aux études, ce qui provoquera un endettement étudiant plus important. Des étudiants de la Fédération étudiante universitaire ont d'ailleurs perturbé la conférence de presse du ministre Reid afin de manifester leur colère contre cette décision du gouvernement.

«J'envisage les consultations avec beaucoup d'enthousiasme et d'optimisme», a pour sa part lancé le président de la Fédération des cégeps, Gaëtan Boucher. Il rendra public ses propositions la semaine prochaine. La Fédération des commissions scolaires a déjà annoncé ses couleurs: la mise en place d'un cheminement scolaire comptant six années au secondaire, des baccalauréats de quatre ou cinq ans et la création de collèges d'enseignement professionnel et technique en lieu et place des cégeps.