Les bonnes notes du Québec remises en question

Le boycottage d’un test international en sciences, en mathématiques et en lecture par un groupe d’écoles publiques soulève des questions sur les résultats enviables des élèves du Québec par rapport à ceux de 72 pays.
Le Canada et le Québec se classent dans le peloton de tête du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), qui a évalué en 2015 les compétences de dizaines de milliers d’élèves âgés de 15 ans partout dans le monde.
Les élèves canadiens restent parmi les meilleurs de la planète en sciences (7e rang mondial), en lecture (2e rang, ex aequo avec Hong Kong) et en mathématiques (10e rang). Les élèves du Québec suivent la tendance et font généralement mieux ou aussi bien que la moyenne canadienne, indiquent les résultats du PISA 2015, rendus publics mardi.
Le rapport, publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), soulève cependant des questions sur les résultats du Québec : à peine 51,7 % des écoles québécoises invitées à prendre part au PISA ont participé au test, ce qui est nettement moins que le taux de réponse de 85 % considéré comme la norme par l’OCDE.
Les données du Québec sont teintées par ce que le PISA décrit comme un « biais de non-réponse ». Ce biais concerne le pourcentage d’écoles anglophones, le pourcentage d’écoles publiques et la taille des écoles figurant dans l’échantillon, indique le rapport.
« À la lumière de l’analyse du biais de non-réponse, le consortium international du PISA a jugé que les données du Canada étaient globalement de qualité acceptable et pouvaient être incluses dans leur intégralité dans les ensembles de données du PISA, sans aucune restriction », indique le rapport.
« Cependant, il a été décidé que les résultats de la province de Québec doivent être traités avec circonspection, en raison d’un possible biais de non-réponse, et qu’une note à ce sujet devrait figurer dans toutes les analyses régionales internationales et dans le rapport pancanadien. »
Boycottage de protestation
Tout indique que les écoles publiques sont sous-représentées dans l’échantillon en raison du boycottage du test PISA par les écoles de 46 commissions scolaires. La Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (FQDE), qui représente 2050 directeurs et directeurs adjoints d’établissement, a confirmé au Devoir qu’elle a boycotté le PISA pour protester contre le gouvernement Couillard.
« Depuis 2014, les membres de la Fédération ont décidé de ne plus répondre à des enquêtes de ce type-là pour se concentrer sur la réussite des élèves », indique Michèle Demers, conseillère aux communications de la FQDE.
Les directions d’école protestent ainsi contre ce qu’elles considèrent comme une absence de marge de manoeuvre dans la gestion des établissements. « Depuis deux ans, on se fait dicter comment faire notre travail [par Québec] alors que les experts sont dans les écoles, dit la porte-parole. L’argent arrive dans les écoles de manière ciblée. Les équipes-écoles veulent décider comment utiliser cet argent. »
Cette surreprésentation des écoles privées dans l’échantillon québécois du PISA est « inquiétante », estime Claude Lessard, professeur associé à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal.
Les écoles privées ont généralement de meilleurs résultats que les écoles publiques car elles sélectionnent leurs élèves, qui proviennent aussi de milieux plus favorisés. « Il faut vraiment considérer les résultats du Québec avec circonspection », prévient Claude Lessard.
Le Conseil des ministres de l’Éducation du Canada (CMEC), qui supervise le PISA au pays, estime que les données du Québec sont fiables malgré le faible taux de réponse de 51,7 %. Les résultats du Québec sont similaires à ceux enregistrés dans des tests comparables en 2006, 2009 et 2012, note une source au CMEC.
Au total, quelque 2885 élèves de 93 écoles secondaires du Québec ont participé à l’examen. Au Canada, 19 604 élèves de 726 écoles ont pris part au PISA.