Étude: la réforme scolaire aurait nui aux garçons

Loin de donner les résultats escomptés, la réforme au secondaire aurait même nui aux élèves à risque et aux garçons, révèle une étude menée par des chercheurs de l’Université Laval. Devant ce constat d’échec, le ministre de l’Éducation Yves Bolduc a indiqué qu’il planchait actuellement sur un plan d’action qui tiendrait compte des besoins des garçons, notamment par des programmes sport-études et des projets manuels.
« Dans toutes les provinces, les filles réussissent mieux que les garçons au secondaire. Il faut s’attarder à ça pour offrir aux garçons des [programmes] plus adaptés à leur façon d’apprendre », a répondu le ministre. Il a toutefois défendu le Renouveau pédagogique, en minimisant l’étude et alléguant que l’échantillon n’est pas suffisamment grand et que les cohortes étudiées proviennent des débuts de la réforme. « Le chercheur le dit lui-même, il faut être prudent », a souligné M. Bolduc.
Dirigée par Simon Larose, professeur à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, l’étude a en effet examiné la réussite et la diplomation des élèves, en comparant des cohortes d’étudiants qui avaient été exposés à la réforme et d’autres pas. Le constat d’échec est accablant. Les élèves n’ont pas amélioré leur réussite en français, malgré l’ajout de 150 heures. Les garçons, les élèves à risque et les anglophones qui ont connu la réforme ont été moins nombreux à être diplômés.
Mais il ne faut pas pour autant « diviser les sexes » et cibler les garçons, croit M. Larose. « Il faut plutôt regarder quelles sont les méthodes et les façons d’enseigner qui conduisent à la réussite. »
Parmi les causes de l’échec de la réforme, le professeur mentionne l’ampleur du changement — tout a été changé dans le système, et trop rapidement — et le fait que son application a été à géométrie variable. Environ 50 % des écoles n’ont pas « adhéré » à la réforme. Selon lui, on aurait mieux fait de concentrer les efforts sur les élèves à risque, en augmentant les ressources et un soutien individualisé.
Une génération «scrapée»
« Ce serait facile pour moi de vous dire “on l’avait dit” », a souligné au Devoir Sylvain Mallette, président de la Fédération autonome de l’enseignement, connue pour ses positions antiréforme. « Ce qui est dommage dans toute cette aventure, c’est qu’il y a des centaines de millions de dollars dépensés, mais surtout des énergies folles dépensées par les enseignants et par une multitude de gens, dit-il. On a littéralement scrapé une génération. »
L’idée d’une réforme de l’éducation découle des états généraux tenus il y a 20 ans. Il s’agissait de mettre en oeuvre une réforme du curriculum. Mais ce fut finalement une réforme des méthodes pédagogiques — approche par compétence, disparition du bulletin chiffré et des dictées, réorganisation des cycles — qui a vu le jour et qui a été implantée quelques années plus tard par le ministre de l’Éducation François Legault.
« C’est désolant. Cette réforme s’est appuyée sur les états généraux qui disaient qu’il fallait ajuster les programmes et mettre l’accent sur l’essentiel. Ce n’est pas ce que le gouvernement a fait. Il a misé sur un changement des méthodes pédagogiques en changeant tout le système », a déploré Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement.