Cégep - Place à l’«histoire du Québec contemporain»

Le nouveau cours d’histoire obligatoire au cégep s’appellera « Histoire du Québec contemporain » et remplacera vraisemblablement l’un des deux cours complémentaires de la formation générale, a appris Le Devoir. C’est, du moins, le scénario recommandé par le comité-conseil chargé de réfléchir à l’implantation du cours qui sera soumis prochainement à la consultation.
Quant au contenu, sans écarter les références multidisciplinaires (aux mouvements sociaux et à la politique nationale), le projet de devis du cours d’histoire montre qu’il fait une large place au contenu historique, ayant notamment comme objectif d’« expliquer des grands repères historiques du Québec contemporain ». Ce projet de devis, élaboré par un comité formé de sept historiens sur un total de 11 membres, devrait être envoyé « incessamment » aux collèges pour consultation dès janvier, selon le cabinet du ministre Pierre Duchesne.
Objectif 2014
Rappelons que l’objectif est de l’implanter le plus vite possible afin que les cégépiens débutant à l’automne 2014 puissent avoir suivi le cours à la fin de leur parcours.
Mais mettre sur pied un tel cours n’est pas chose simple. Il devra cheminer à travers toute une série d’étapes comprenant des consultations internes et publiques. Le Règlement sur le régime d’études collégiales devra également être modifié pour pouvoir inclure officiellement le cours d’histoire.
Concrètement, la formation générale commune et obligatoire, avec ses quatre cours de français, ses trois de philosophie, ses deux d’anglais et ses trois d’éducation physique, demeurera intacte. Un nouvel item sera ajouté à la formation générale pour permettre d’inclure le nouveau cours d’histoire, soit « Études sur le Québec ». Toutefois, contrairement au français, à la philo, etc., le libellé ne renvoie cette fois à aucune discipline en particulier.
Enfin, on réduira de 4 à 2 le nombre d’unités requises en formation complémentaire, formation qui ne sera désormais constituée que d’un seul cours choisi à même les cours offerts dans les six domaines habituels, soit sciences humaines, culture scientifique et technologique, langue moderne, langage mathématique et informatique, art et esthétique et problématiques contemporaines. Selon nos informations, le comité-conseil de la formation générale a décidé d’inclure deux autres domaines, soit langue seconde et langue d’enseignement, où l’étudiant pourra suivre, par exemple, un cours de grammaire.
Quant au titre du cours, après discussions au ministère, il a été décidé de ne pas nommer le cours « histoire nationale » du Québec contemporain, mais plutôt simplement « histoire », pour éviter le caractère « explosif » du débat sur la nation qui pourrait en découler.
Réactions du milieu
Les deux grands syndicats représentant les enseignants des cégeps continuent de s’opposer à la suppression d’un cours complémentaire pour faire de la place au cours d’histoire. « C’est notre position depuis notre congrès en juin dernier […] les enseignants croient qu’il est primordial que les étudiants puissent se frotter à un domaine de connaissances autre que celui dans lequel ils étudient », a dit Mario Beauchemin, le président de la Fédération des enseignants de cégep (FEC-CSQ). « Ça bouleverse aussi l’emploi de beaucoup d’enseignants précaires qui peuvent normalement compléter ou avoir une tâche avec ce type de cours. Il y a de nos collègues qui vont perdre leur emploi, carrément. »
Même son de cloche à la Fédération nationale des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), où on souligne l’importance de la formation complémentaire. Le syndicat réitère aussi qu’il est important qu’un cours d’histoire soit donné par un professeur d’histoire. « Si le ministre veut un cours d’histoire, ça ne pourra pas être des enseignants de sciences politiques. On ne peut pas mêler les genres. Ce sont des spécialistes des disciplines », a indiqué Micheline Thibodeau, vice-présidente à la FNEEQ.
Le président de l’Association des professeurs d’histoire des collèges du Québec, Vincent Duhaime, abonde en ce sens. Selon lui, si les « objectifs et standards », qui déclinent les objectifs du cours et les moyens d’y arriver, font référence à une discipline en particulier, il devient difficile pour des non-historiens de revendiquer le droit de pouvoir donner ce cours.
Le Réseau des sciences humaines des collèges du Québec (RSHCQ) estime qu’au contraire, le cours d’histoire pourrait parfaitement être donné par un spécialiste d’une autre discipline, comme la sociologie ou la politique. « L’histoire s’intègre dans les différents types d’analyses au niveau collégial. C’est rare qu’on ne doive pas faire un peu d’histoire. Je suis sociologue et ça relève de l’évidence dans mon cas », a dit Claire Denis, enseignante au Cégep de Sherbrooke et présidente du conseil d’administration du RSHCQ. « Le cours serait tout aussi pertinent s’il était donné par des enseignants d’autres disciplines. »