UQTR - «L’industrie veut obtenir des solutions extrêmement rapides»

Réginald Harvey Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Universités - Recherche

En Mauricie et à Trois-Rivières se trouve le deuxième pôle en importance de l’industrie aéronautique au Québec. Les forces vives du milieu économique de cette région ont formé un réseau qui concentre ses énergies à l’essor de l’aérospatiale, aussi bien sur les marchés locaux que sur ceux d’envergure nationale et internationale. Il y a maintenant une Chaire de recherche en gestion de projets aéronautiques qui les soutient dans leurs efforts.

 

Darli Rodrigues Vieira est professeur en gestion de projet à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) depuis août 2012 ; il a aussi enseigné, au Brésil, à l’Université fédérale du Paraná (UFPR) et à l’Institut technologique d’aéronautique (ITA). Pendant plus de 20 ans, il a eu l’occasion, à titre de consultant industriel, d’accumuler des connaissances spécifiques et d’acquérir une expérience professionnelle, notamment en aéronautique ; il a collaboré avec certaines des plus grandes entreprises de ce secteur. Il a mis à contribution son vécu professionnel et poursuivi une démarche plutôt inusitée dans la mise sur pied de cette chaire de l’UQTR, dont il est aussi le titulaire. Il dit pourquoi : « L’industrie est intéressée par la recherche, mais elle veut aussi obtenir des solutions extrêmement rapides. »

 

Il a procédé de cette façon : « Lorsqu’est venu le moment de la créer, j’ai d’abord consulté les constructeurs, les fournisseurs, les équipementiers ; de la sorte, j’ai suivi une approche autre que traditionnelle dans la proposition d’une chaire : d’habitude, on part de l’université pour aller vers l’industrie, alors que j’ai fait le contraire. J’ai développé l’idée et je l’ai validée techniquement en premier lieu auprès des gens qui avaient de véritables besoins dans le secteur de l’aéronautique. »

 

Soutien direct aux PME locales

 

L’idée d’une chaire émane donc d’une prémisse de base : l’industrie manifeste des besoins croissants de compétences spécifiques en gestion de projets. Dans ce contexte, la Ville de Trois-Rivières a accordé un montant de 400 000 $ à la Fondation de l’UQTR spécifiquement pour financer de telles activités de recherche : « La chaire a donc pour mission d’aider les entreprises de cette ville et des environs à approfondir leurs connaissances et à renforcer leur compétitivité en cette matière sur tous les marchés. »

 

Pour atteindre ses objectifs, la chaire travaillera en proche partenariat avec les plus importants centres de recherche en la matière, dont l’Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace de Toulouse (ISAE) fait partie.

 

Le professeur se penche sur l’expertise distinctive à générer : « Elle tient compte de la haute complexité dans la façon de gérer ce type de projet. Ici, la gestion est associée à des aspects bien particuliers, dont voici une énumération non exhaustive : un temps de maturation des technologies de 10 à 20 ans, une durée de développement des produits de 5 à 7 ans, une cadence de production de 1 à 10 avions par mois, une durée de vie des produits de 30 à 50 ans, des normes rigides concernant la sécurité et le système de gestion de la qualité aéronautique (AS 9100, etc.). »

 

Il en découle cette réalité : « Tout cela nécessite une façon bien singulière d’approcher les problèmes de gestion des projets sur les plans de la conception, de la fabrication, de l’assemblage, de l’utilisation et du retrait de service de chaque appareil. »

 

Deux axes de recherche

 

La chaire conduira ses travaux en fonction de deux axes de recherche, dont le premier retenu appartient à la « gestion de cycle de vie du produit (product lifecycle management ou PLM) » : « Beaucoup plus qu’une solution technologique, c’est une stratégie qui concourt au partage des données sur les produits au sein de ces entreprises et de leur chaîne de valeur. Le PLM applique des procédés communs et capitalise sur les informations de l’entreprise ; sa gestion aide les entreprises à développer ses produits, à partir de leur conception jusqu’à leur mise au rebut, tout en facilitant aussi la participation continue de toutes ses parties prenantes internes et externes. »

 

M. Vieira élabore sur ce point pour passer par la suite à l’axe « Bureau de projet (project management office ou PMO) » : « Il s’agit là d’une unité organisationnelle qui centralise et coordonne la gestion des projets qui sont sous sa responsabilité. Le PMO se concentre sur la planification, la hiérarchisation et l’exécution de projets et de sous-projets qui sont reliés aux objectifs stratégiques d’un client ou de l’entreprise mère ; il sert aussi à rendre compte du statut réel de chaque projet aux participants, aux chefs de projet et aux parties prenantes, tout en aidant à mesurer la performance des projets de façon systématique. » De telle sorte que des améliorations peuvent être apportées au cours de chaque projet en phase de réalisation.

 

À la suite de quoi, il fournit quelques exemples des travaux en cours qui génèrent des retombées pratiques : stratégie et projet de MRO (maintenance, réparation et refonte des avions), méthodes de fiabilité en projets aéronautiques et coûts en projets de conception aéronautique.

 

Le défi majeur à relever en aérospatiale pour les PME, c’est l’exportation, soulignait récemment au Devoir Aéro Montréal. Darli Rodrigues Vieira abonde-t-il dans ce sens ? Il apporte cet éclairage : « En matière de qualité des produits, de processus et de normes, le marché aéronautique est un marché global et ses exigences requises sont elles aussi globales. Ainsi, ce qui est demandé d’un fournisseur pour faire entrer son produit sur le marché canadien ou québécois l’est également pour un contrat d’exportation. » Il fournit à titre d’exemple la certification AS 9100, devenue incontournable pour accéder aux marchés aéronautiques.

 

Il enchaîne : « Le profil typique d’un tiers 2 ou d’un “fournisseur de rang 2 petit” est d’avoir un chiffre d’affaires variant entre 15 et 20 millions de dollars et de compter moins de 100 salariés. Il fait face à un défi majeur qui consiste à ne pas se contenter d’exécuter des ordres, mais à être de plus capable de participer au développement de solutions de plus en plus complexes. Pour y parvenir, il faut que les entreprises puissent régulariser le volume de commandes à moyen et à long termes. »

 

Considérant que le marché aéronautique est global, il faut chercher des commandes à l’étranger pour régulariser les volumes et réduire le risque de perte de capacité d’innovation.

 


Collaborateur

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

À voir en vidéo