Syndicalisme - Il y a 50 ans s’opérait la percée syndicale

Réginald Harvey Collaboration spéciale
Le nombre d’élèves dans les classes est plus élevé dans le secteur privé que dans le secteur public, mais les syndicats réussissent à imposer des ratios.
Photo: Source The Study Le nombre d’élèves dans les classes est plus élevé dans le secteur privé que dans le secteur public, mais les syndicats réussissent à imposer des ratios.

Ce texte fait partie du cahier spécial Éducation septembre 2013

À quelques exceptions près, les enseignants du réseau scolaire privé obtiennent les mêmes conditions salariales que ceux du réseau public. Il en va autrement sur le plan normatif, où des avancées ont été réalisées depuis que le syndicalisme a trouvé sa niche dans plusieurs établissements. Et le combat syndical se poursuit dans le but de fixer dans les conventions un certain nombre de revendications actuelles issues de l’ensemble du milieu.

 

En 2015, il y aura 50 ans que le syndicalisme s’est introduit dans les murs du prestigieux collège Jean-de-Brébeuf, là où la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ-CSN) accompagne le personnel depuis environ 40 ans. La présence syndicale ne date pas d’hier dans le secteur privé bien que les gains les plus significatifs soient survenus au cours de la décennie de 1970 (12 syndicats) et pendant les 23 dernières années (21 syndicats de 1990 à 2013), en matière d’accréditations ; aujourd’hui, une quarantaine de collèges ont joint les rangs de la Fédération.

 

Écarts

 

La FNEEQ a conduit une étude sommaire, il y a quelques années, pour voir quels sont les résultats obtenus lors de la signature d’une première convention avec un nouveau membre ; on voulait disposer d’un outil de référence pour susciter la syndicalisation auprès d’autres écoles. En remontant le cours du temps, Caroline Quesnel, vice-présidente et responsable du dossier du réseau privé au sein de ce mouvement syndical, cerne les enjeux majeurs qui sont alors ressortis. Elle pose à prime abord cette généralité : « C’est difficile de comparer des conventions collectives, mais je dirais que, pour un grand nombre de collèges privés, il y a un écart assez important entre les conditions de travail vécues dans ces derniers et celles qu’on retrouve dans le secteur public ; cet écart est défavorable au secteur privé. »

 

Ce fait persiste, bien qu’un rapprochement se soit produit : « Si on doit identifier des gains, on voit que ceux-ci touchent principalement la tâche professionnelle. Par exemple, il y a le nombre d’élèves par classe : ils sont beaucoup plus nombreux dans le secteur privé mais, sur ce plan, on réussit à réduire les ratios, et cela, de façon parfois assez imaginative. » C’est l’un des aspects de la tâche où des gains ont été réalisés.

 

Il y en a d’autres, dont celui des activités professionnelles autres que l’enseignement : « Il est reconnu que dans le secteur privé, il s’effectue beaucoup de travail découlant des rencontres de parents, des accompagnements de nature parascolaire, du nombre de journées pédagogiques et des échanges avec l’appui des nouvelles technologies. Tout comme dans le réseau public, les enseignants ont besoin de disposer de plus de temps pour alléger leurs charges. »

 

Ce constat posé, la présidente reconnaît que cette réalité a changé pour les profs dans le cadre d’un environnement syndical au cours des dernières années, que ce soit au secondaire ou au collégial.

 

Le plus souvent, les avancées se situent en fonction non seulement des salaires, qui ne sont pas quantité négligeable, mais surtout en vertu d’une amélioration de la tâche, qui tend à se rapprocher davantage de l’école publique : « Les enseignants disposent donc de plus de temps pour travailler. Il y a un moins grand nombre d’élèves par classe, qui sont mieux encadrés et qui sont susceptibles de mieux réussir ; il y a aussi des activités et des réunions moins fréquentes et on profite de plus de temps personnel en raison de la diminution des journées pédagogiques et d’une meilleure utilisation des nouvelles technologies. »

 

Résistance

 

Les communautés religieuses sont encore présentes dans bien des établissements du secteur privé ; en d’autres lieux plus nombreux, où les laïcs leur ont succédé, subsiste le souci de préserver un héritage confessionnel et humaniste hérité du passé pour attirer les parents. Cette réalité est-elle de nature à offrir une certaine résistance à la syndicalisation et à l’allégement de la tâche ?

 

Caroline Quesnel fournit alors ces explications : « Souvent, ces milieux-là, qui sont fortement imprégnés d’une tradition religieuse, ne sont pas faciles à convaincre. D’une part, c’est un peu normal, car il y a dans ces endroits le sentiment d’appartenir à une famille, à une grande institution, d’être redevable à une communauté ; on n’aime pas les chicanes auxquelles on associe les syndicats, même si cette idée est fausse et quelque peu dépassée. »

 

Elle assure toutefois que les choses se tassent une fois que le syndicat est en place et que, finalement, la négociation finit par ressembler à une autre.

 

Revendications actuelles

 

Et sur quoi portent actuellement les revendications ? Mme Quesnel préfère en premier lieu situer le combat syndical dans ce contexte : « On a près de 40 syndicats qui négocient localement, qui ont des conventions et des histoires différentes. Quand leurs représentants syndicaux se rencontrent en regroupement, le vrai défi, c’est d’élargir la solidarité locale des membres pour transmettre les bonnes informations, de façon à déterminer entre nous des objectifs de négociation communs. » Cette stratégie s’applique depuis 2008 et rapporte des dividendes.

 

Elle identifie les causes communes à tous : « Il y a en priorité les droits parentaux, pour lesquels il existait vraiment un recul dans le secteur privé par rapport au secteur public ; par exemple, tel était le cas pour le nombre de semaines du congé de maternité et pour celui des congés sociaux. En ce moment, on travaille vraiment sur les besoins des élèves à statut particulier. Pour chaque objectif identifié en groupe, on utilise un outil qui s’appelle le comparatif des conventions issues des différents établissements ; on essaie de la sorte de faire ressortir les bons coups survenus d’un endroit à l’autre. » La FNEEQ est actuellement en phase de renouvellement de ce comparatif.

 

Les comités de négociation tirent profit de cette démarche effectuée en amont : « On peut viser la lune au départ, mais, de manière réaliste, on peut voir ce qui a été accompli de bien dans un milieu, ce qui nous ressemble et ce qu’il est possible d’atteindre. Une pareille information sert à cheminer sur des bases qui sont solides. »

 

 

Collaborateur

Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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