Sommet sur l'éducation supérieure - Les recteurs entendent renflouer leurs coffres

À dix jours du Sommet, les recteurs ont montré leur jeu : ils seront présents au Sommet, mais refuseront de s’associer à une solution qui ne permettra pas de renflouer leurs coffres. Le choix des moyens revient au gouvernement, ont-ils soutenu vendredi lors d’une conférence de presse.
« On s’attend des universités québécoises qu’elles soient aussi performantes que les universités du reste du Canada, mais année après année, depuis 15 ans, on leur donne moins d’argent par étudiant », a déclaré Luce Samoisette, présidente de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ).
« On ne souscrira pas à un faux consensus », a averti pour sa part Guy Breton, le recteur de l’Université de Montréal. Selon lui, l’indexation n’est pas une « solution suffisante », rappelant que les coûts de système sont au moins de 4 %. Il soutient que les divers scénarios sont des choix politiques qui reviennent au gouvernement. « Moi, ce que je veux, c’est mon bottom line », a-t-il dit.
M. Breton s’est montré très inquiet de la qualité de l’enseignement universitaire à long terme. « Je suis en compétition avec l’UBC [Université de la Colombie-Britannique] et j’ai 25 % de moins. Ce n’est pas vrai que je vais pouvoir continuer à avoir le même succès et à continuer à former des dentistes et des avocats de qualité », a-t-il déploré.
1400 postes en péril
Les membres de l’exécutif de la CREPUQ en ont aussi profité pour répéter que les universités « ne sont pas en mesure d’absorber » les compressions de 250 millions imposées par le gouvernement. D’après leurs calculs, c’est 1400 postes qui seront reportés ou supprimés dans tout le réseau. L’argent en moins se traduira aussi par des réductions de l’offre de cours et de services, et par moins de livres dans les bibliothèques.
Au Sommet sur l’enseignement supérieur, les 25 et 26 février prochains, les recteurs défendront leurs positions, qu’ils ont déjà fait connaître : oui à un organisme indépendant de réflexion et d’analyse du réseau, mais non à un mécanisme de contrôle de leurs dépenses. Par ailleurs, ils ne croient pas qu’un changement de formule réglerait le problème. Guy Breton souhaite un financement différencié des universités, adapté à leur rôle spécifique. « La formule actuelle du one size fits all, c’est probablement pas la meilleure », a-t-il noté.
Position maintenant unanime
Luce Samoisette n’a pas voulu commenter le boycottage du Sommet par l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE), se contentant de dire qu’elle n’avait pas à juger leur décision. Au sujet des déclarations de la principale de McGill, Heather Munroe-Blum, qui avait dit en entrevue au Devoir que le Sommet était une véritable « farce », Mme Samoisette a soutenu que les recteurs ont maintenant tous une position unanime. « [Mme Munroe-Blum] s’est ralliée à la déclaration que nous faisons aujourd’hui. Pour nous, l’importance du Sommet est là pour tous les chefs d’établissement. »
Pour diminuer l’impact des compressions de 250 millions, la CREPUQ propose au gouvernement une solution qui lui permettrait quand même d’atteindre l’équilibre budgétaire, en jouant notamment sur les années financières - en mars pour l’État et en avril pour les universités, et en utilisant les crédits gouvernementaux de 2014-2015 pour combler les compressions de l’année qui précède. Le gouvernement étudie actuellement la proposition.
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800 millions seront réinvestis, promet Marois
La première ministre Pauline Marois promet un réinvestissement de 800 millions de dollars dans les universités d’ici 2018. « Je prends un engagement devant vous aujourd’hui : au cours des prochaines années, le gouvernement va réinvestir massivement dans nos universités », a déclaré Mme Marois, à l’occasion d’un dîner d’affaires. « C’est 200 millions de dollars de plus que ce qui était prévu par l’ancien gouvernement », a-t-elle par ailleurs fait remarquer. Le gouvernement péquiste « prévoit » une hausse du financement accordé aux universités québécoises de 3,3 % en 2014 et de 8,5 % en 2015. À quelques jours de la tenue du Sommet sur l’enseignement supérieur, Pauline Marois a insisté pour que « chacun fasse des compromis ». « Nous pourrions débattre indéfiniment de la hauteur du financement des universités », a-t-elle lancé.