Conseil du patronat - «Ils» sont en faveur d’une augmentation asymétrique des droits de scolarité»
Le Conseil du patronat du Québec fait partie de la quarantaine d’intervenants de la société civile qui participent aux rencontres thématiques préparatoires au Sommet sur l’enseignement supérieur. Son président, Yves-Thomas Dorval, fait le point sur la position du CPQ à l’égard des enjeux soulevés.
Pour Yves-Thomas Dorval, nul doute qu’à un nouvel état des choses en éducation doit correspondre aussi un autre mode d’imposition des droits de scolarité.
En tant qu’organisation représentant les employeurs du Québec, êtes-vous satisfaits de la qualité de la formation et de l’enseignement supérieur au Québec ?
Pour ce qui est de la qualité, nous pouvons être fiers de la formation collégiale technique et universitaire dispensée par nos établissements. Cependant, nous pensons que le système est à bout de souffle et qu’une incapacité de répondre aux besoins s’installe progressivement. Cette qualité est donc menacée à court terme par le sous-financement.
D’autre part, il y a un enjeu d’adéquation entre les programmes dont sortent les diplômés et les besoins du marché du travail. Les employeurs ont besoin d’avoir accès à davantage de main-d’oeuvre dans certains domaines où l’on ne forme pas suffisamment de diplômés, tandis que dans d’autres domaines d’études, il y a une surabondance de diplômés par rapport aux besoins du marché.
Que proposez-vous pour remédier à ce que vous considérez comme un sous-financement dans les universités ?
Quand on regarde comment est partagé le financement des universités, le seul groupe qui ne contribue pas au financement de ses études à un niveau comparable au reste de l’Amérique du Nord, c’est celui des étudiants. Notre conclusion n’est pas pour autant qu’il faille atteindre un niveau équivalant à celui des autres provinces, parce que la société québécoise a le droit de faire des choix conformes à ses valeurs. Mais nous pensons qu’il ne doit plus y avoir de moratoire ou de gel des droits de scolarité. Il faut avoir, au minimum, une indexation. Cette augmentation ne doit pas se faire trop brusquement, mais elle doit être supérieure à l’inflation.
D’autre part, le Québec est le seul endroit en Amérique du Nord où les droits de scolarité ne sont pas liés aux coûts réels de formation. Pour être équitable, il faut envisager une augmentation des frais asymétrique, déterminée en fonction des domaines d’études et de leurs coûts de formation. Un étudiant en lettres paie actuellement les mêmes droits de scolarité qu’un étudiant en médecine, alors que sa formation coûte beaucoup moins cher que la sienne et qu’il gagnera plus tard un salaire moindre.
De plus, pour favoriser l’accessibilité aux études, nous sommes favorables à des mesures compensatoires, telles que l’amélioration du régime d’aide financière et un régime de remboursement proportionnel au revenu.
L’une des revendications des étudiants porte sur la gratuité scolaire. Quelle est votre position là-dessus ?
Il faut comprendre que la capacité financière des contribuables est limitée, et l’argent qu’il est possible d’injecter en éducation l’est donc également. Dans les pays où l’on offre une forme de gratuité, on retrouve différentes situations. En Argentine, il arrive que les diplômés n’arrivent pas à obtenir des postes intéressants parce que le milieu du travail considère que la qualité de leur formation est insuffisante. Les Argentins qui veulent avoir une belle carrière savent qu’il vaut mieux aller chercher une formation ailleurs. Si on prend l’exemple de la France, qui a un système public et un système privé, on sait que les diplômés des établissements privés ont de meilleures chances d’obtenir les emplois les plus intéressants. Et quand on parle de la Suède, qui a réussi à offrir la gratuité tout en maintenant la qualité de l’enseignement, on a mis en place un contingentement pour l’accès aux programmes. L’accès à l’université est donc limité de cette façon.
Que pensez-vous de la gestion et de l’administration actuelle des universités québécoises ?
Dans toute organisation, il est toujours possible d’améliorer la gestion et l’administration. Il est advenu des dérapages comme celui de l’îlot Voyageur, qu’il faut corriger et dont il faut éviter la répétition. On peut utiliser ces erreurs comme argument et dire : il y a une mauvaise administration. C’est ce que les étudiants font. Mais on ne peut pas prétendre que c’est un phénomène généralisé. L’une des meilleures façons de vérifier si une organisation est bien administrée est de la comparer à ce qui se fait ailleurs. Si l’on compare, par exemple, le coût de formation d’un médecin à l’Université de Montréal à celui d’un médecin à l’Université de Toronto, on constate que le médecin québécois a coûté 100 000 $ de moins à former. Et pourtant, nos médecins ont une excellente réputation. Cela veut dire que l’on a réussi à former un médecin ici en dépensant beaucoup moins qu’ailleurs, ce qui démontre qu’au-delà des dérapages, nos universités font, dans l’ensemble, un bon travail.
***
Collaboratrice
Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.