Rentrée universitaire: arrestations à l'UdeM, levée de cours à l'UQAM

Photo d'archive de l'Université de Montréal. Six femmes et cinq hommes y ont été interpellés ce matin pour voies de fait à l'endroit des policiers du Service de police de la Ville de Montréal.
Photo: - Le Devoir Photo d'archive de l'Université de Montréal. Six femmes et cinq hommes y ont été interpellés ce matin pour voies de fait à l'endroit des policiers du Service de police de la Ville de Montréal.

La rentrée a été perturbée pour une deuxième journée, mardi, dans les deux universités francophones montréalaises. Et, comme lundi, il y a eu levée de cours à l'Université du Québec à Montréal et, à l'Université de Montréal, la police a encore dû intervenir, en matinée et en après-midi.

À l'Université de Montréal, en matinée, il y a eu échauffourée «entre des suspects, des agents de sécurité et des constables spéciaux», a précisé Ian Lafrenière, responsable des relations avec les médias au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

C'est dans une classe de psychologie que l'échauffourée a éclaté, lorsqu'un groupe de jeunes est venu y ordonner la levée des cours. Il semble d'ailleurs s'agir d'une erreur, puisque les étudiants de psychologie n'avaient pas voté en faveur de la grève. Selon les témoignages recueillis sur place, le groupe visait plutôt la classe d'à côté, celle de cinéma, où les étudiants avaient bel et bien voté en faveur de la grève.

Devant le chahut et du «grabuge», les agents de sécurité sont intervenus. «Il y avait des agents de sécurité qui se faisaient pousser, rudoyer par des suspects», a rapporté M. Lafrenière.

Le bilan officiel était de 11 arrestations et de 10 personnes accusées — sept hommes et trois femmes — en vertu d'infractions au Code criminel, a précisé le SPVM en fin d'après-midi.

Cette fois, ce n'est pas la direction de l'université qui a appelé les policiers. M. Lafrenière a expliqué que depuis la semaine dernière, des policiers se tiennent à proximité des établissements, en prévention. À 8h45, «ce sont vraiment des gens qui sont venus nous voir. Il s'agissait d'étudiants qui nous ont dit qu'il y avait une querelle au deuxième étage. Donc, on est montés. Il n'y a pas eu de demande de l'université ce matin», a-t-il précisé.

Un étudiant qui a participé à la levée des cours donne une autre version des faits.
«On a procédé à des levées de cours, mais on s'est fait prendre en souricière par des policiers, a témoigné Charles-Philippe Casgrain. Donc, même les personnes qui avaient envie de faire leurs besoins étaient bloquées. Ce sont des méthodes sordides, en ce sens qu'ils ont relâché l'accusation et nous ont laissé sortir. Mais ils maintiennent un climat de peur, certains nous font sentir coupables ou usent d'une sorte de violence, pas verbale ni physique, mais psychologique.»

Le jeune étudie d'ailleurs à l'UQAM, mais il était venu à l'UdeM pour «prêter main-forte» à ceux qui voulaient débrayer et faire annuler certains cours. À l'UQAM, «c'est trop facile; il y a un climat bon enfant; les étudiants serrent la main des professeurs», a-t-il rapporté, pour justifier sa présence à l'UdeM.

Une autre intervention

Une seconde intervention policière à l'Université de Montréal est survenue en début d'après-midi, après que des jeunes eurent décidé d'organiser une manifestation, à 13h, pour protester contre la présence policière et les arrestations de la matinée. Là encore, les policiers et le Groupe tactique d'intervention ont dû intervenir pour déloger des manifestants qui se trouvaient à l'intérieur.

Cette fois, il y a eu cinq personnes arrêtées au troisième étage. Des accusations de voies de fait, voies de fait par intrus et entrave au travail d'un policier seront portées, a précisé le SPVM en milieu d'après-midi. L'intervention policière n'était toutefois pas encore terminée.

Un représentant syndical des professeurs, Sylvain Marois, vice-président de la Fédération nationale des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), a encore une fois dénoncé la présence policière à l'intérieur de l'université. «On trouve que c'est complètement inadmissible d'avoir la police comme ça qui charge les étudiants», s'est-il exclamé.

Mathieu Filion, porte-parole de l'Université de Montréal, a souligné pour sa part que seulement 2000 étudiants étaient encore en grève à l'UdeM, qui en compte 45 000.

À l'UQAM

À l'Université du Québec à Montréal, il y a eu levée de cours sans trop de problèmes. La police n'était pas présente dans l'établissement, mais les agents de sécurité y étaient nombreux.

Dès 8h, un groupe s'est réuni devant les bureaux d'une des associations étudiantes en grève et s'est divisé en sous-groupes de dix. Chaque sous-groupe recevait une liste de classes à visiter pour y faire annuler les cours.

Dans bien des cas, ces petits groupes se sont butés à des classes déjà vides; parfois une petite poignée d'étudiants s'y trouvait. Dans un seul cas, le cours était commencé. Et, voyant l'escouade arriver et entrer dans la classe, et affirmer que «le cours est levé», les étudiants ont refermé leur portable, rangé leurs choses et ont quitté.

Les quelques professeurs rencontrés semblaient sympathiques à la cause.

Charest veut de la retenue

Les étudiants qui manifestent dans les facultés montréalaises devraient faire preuve de plus de retenue d'ici le jour du scrutin, estime Jean Charest.

Le chef du Parti libéral du Québec (PLQ) a dit trouver «désolant» qu'à une semaine du vote, des manifestants se «prêtent à ce jeu-là».

Lors d'un bref point de presse à Sainte-Marie en Beauce organisé pour que M. Charest puisse commenter la situation, le chef libéral a soutenu que les Québécois avaient le droit de s'exprimer «paisiblement» sans verser dans «l'intimidation».

La voix la plus forte d'une démocratie est celle des urnes, a rappelé M. Charest.
La crise étudiante, qui avait pourtant été au coeur de l'actualité au moment du déclenchement des élections, avait été mise de côté au cours de la campagne. Elle a fait un retour en force depuis les deux derniers jours avec la rentrée universitaire mouvementée.

Il s'agissait là d'un thème sur lequel M. Charest estimait pouvoir gagner des points. Le chef libéral a néanmoins été catégorique sur le fait qu'il ne se réjouissait aucunement du retour des perturbations.

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