Un MBA de classe mondiale coûte cher, plaide McGill

Sous-financée, déficitaire, McGill a mal à son MBA. Et c'est, entre autres, pour conserver sa bonne réputation et remonter dans les classements mondiaux des écoles de gestion que l'université a décidé d'en faire un programme autofinancé à 29 500 $ par année, dès cet automne.

L'accessibilité et la qualité. C'est le credo de la principale et vice-chancelière de McGill, Heather Munroe-Blum, au nom duquel elle légitime la hausse de 1600 % des droits de scolarité de son MBA. Le programme, parmi les meilleurs au monde, est-il si mal en point? «Ça décline depuis 1995. C'était de plus en plus difficile de le développer et de maintenir une qualité de haut niveau. On a essayé de le développer différemment. On a beaucoup discuté», a dit Mme Munroe-Blum au Devoir, pour tenter de calmer la grogne qu'a provoquée cette décision.

Le doyen de la faculté de gestion, Peter Todd, a quant à lui expliqué que les quelque 12 000 $ que reçoit McGill en droits de scolarité et subventions du ministère de l'Éducation ne suffisent pas à payer les 22 000 $ que coûte la formation. «On veut donner une expérience de classe mondiale aux étudiants», a-t-il souligné. Il rappelle que les diplômés du MBA sont parmi ceux qui ont les meilleurs salaires et qui peuvent payer un tel prix pour une formation.

Jusqu'ici, le déficit était comblé par une portion de l'argent que rapportaient les étudiants en arts et sciences. «Mais nous ne pouvons plus continuer à faire payer le MBA par nos étudiants en arts et sciences, qui n'ont pas le même salaire», a insisté Mme Munroe-Blum. «Ce n'est pas équitable, ce sont nos étudiants en sciences et arts qui sont punis», a-t-elle ajouté.

Le Devoir rapportait hier que la ministre de l'Éducation avait rappelé McGill à l'ordre et lui avait donné en quelque sorte un «dernier avis» sans quoi elle allait sévir, soit lui couper les plus ou moins 10 000 $ que donne son ministère en subvention par étudiant. Avec ou sans l'aide de Québec, McGill ira de l'avant, a assuré la principale, qui a précisé qu'elle allait discuter avec la ministre pour trouver une solution. «C'est un objectif qui en vaut la peine», a-t-elle indiqué.


Un précédent

McGill se défend bien de créer un précédent. «On est une université publique, on ne crée pas de précédent», a-t-elle réitéré en évoquant l'existence d'un MBA exécutif conjoint entre l'École des HEC et McGill, qui coûte 65 000 $ pour 16 mois. Ce programme, qui ne reçoit aucun financement du ministère de l'Éducation, s'adresse à des professionnels déjà sur le marché du travail qui vont chercher un complément de formation, précise-t-on au cabinet de la ministre Michelle Courchesne.

Aussi, la principale de McGill insiste sur le fait que la décision de hausser les droits de scolarité a été prise à la demande des professeurs, du Conseil des études et de gens du milieu des affaires. Elle s'étonne d'ailleurs que sa décision ne soit pas bien accueillie de tous. «Nous avons une mission distincte. On est la première université au Québec. On est un atout pour le Québec, a insisté Mme Monroe-Blum. Pourquoi ne pas avoir le meilleur programme qui aura des retombées ici? [...] Je pense que les entreprises du Québec méritent d'avoir les meilleurs.»

Pour répondre aux critiques qui lui reprochent de créer un système pour les riches, Mme Munroe-Blum explique qu'il existe des bourses d'excellence pour les moins nantis. Quant aux étudiants étrangers, la principale se réjouit de penser qu'ils seront nombreux à venir s'installer au Québec après leur formation. «Les étudiants qui font ce programme sont à un stade de leur vie où ils s'éprennent de quelqu'un. Beaucoup d'entre eux deviennent des résidants du Québec», a-t-elle dit.

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