UQAM: le nouveau plan de redressement comporte encore un déficit

L’UQAM n’arrive pas à remplir la commande de la ministre de l’Éducation, Michelle Courchesne, de déposer un plan de redressement permettant de renouer avec l’équilibre budgétaire. Le document de la firme PricewaterhouseCoopers présenté hier au conseil d’administration de l’Université du Québec à Montréal fait toujours état d’un déficit annuel de 24,4 millions au terme de l’exercice de redressement en 2011-2012, dans le meilleur des scénarios.

La firme PWC, qui accompagnait l’UQAM dans l’élaboration de son plan de redressement, conclut que le retour à l’équilibre est impossible sans une aide supplémentaire de Québec. «L’atteinte de l’équilibre financier représente une tâche gigantesque pour l’UQAM. L’absence d’aide financière du gouvernement, en sus de celle promise pour l’îlot Voyageur pourrait compromettre non seulement la mission de l’UQAM, mais également sa survie», peut-on lire dans le rapport de PWC qui sera rendu public ce matin et dont Le Devoir a obtenu copie.
La firme comptable estime par ailleurs que des réflexions sur la formule de financement des universités, la mission et la gouvernance de l’UQAM — trois sujets exclus de son mandat d’analyse — seraient nécessaires pour réaliser les objectifs de redressement de l’université.

Si les mesures de redressement proposées par l’UQAM s’avéraient efficaces et que le gouvernement s’engageait à éponger non seulement la facture de l’îlot Voyageur, comme il l’a déjà promis, mais aussi celle du Complexe des sciences - tel que le demande sans succès le nouveau recteur depuis deux mois - l’UQAM serait toujours aux prises avec un manque à gagner de 24,4 millions.
Même ce scénario apparaît hasardeux selon la firme PWC, qui fait plutôt état d’un déficit annuel de 36,5 millions et d’un déficit accumulé de 191,4 millions en 2011-2012, dans ses données validées.

Compressions supplémentaires
Parmi les mesures proposées, l’UQAM avance un objectif de compressions supplémentaires de 11 millions, à terme en 2011-2012. La direction préconise une hausse de 3 millions des revenus provenant des frais afférents, soit une hausse de 15 $ par étudiant. Le restant de cette somme proviendrait de compressions dans les départements (4 millions) et de l’abolition de 77 postes de cadres et d’employés de soutien (4 millions).

Ces nouvelles mesures sont cependant vues avec scepticisme par les comptables de PWC. En raison de «l’absence de plan d’action détaillé et du caractère incertain de certaines mesures additionnelles, ces objectifs n’ont pas été inclus dans les mesures de redressement proposées et les projections financières», peut-on lire dans le «Rapport définitif sur la situation financière et le plan de redressement».

Outre les mesures retenues dans ses calculs, quelque 31 autres ont été analysées par l’UQAM et PWC. Si certaines ont été d’emblée écartées, d’autres feront l’objet d’analyses ultérieures. Il en va ainsi de l’avenir des propositions de «modification ou fermeture de programmes en difficulté», de la renégociation de l’organisation du travail ou encore de la vente de certains immeubles, tels le Centre Pierre-Péladeau.

PWC mentionne par ailleurs qu’un gel des salaires ou encore des hausses réduites par rapport à celles de 3 % provisionnées par l’UQAM permettraient de générer des économies substantielles. «Chaque réduction de 1 % des hausses de salaire prévues représente une économie de près de 2,5 millions par année de façon récurrente», peut-on lire dans le rapport. Soulignons que les conventions collectives de deux des trois principaux syndicats de l’UQAM sont déjà échues et qu’une troisième arrive à échéance en décembre.

Dans ses commentaires écrits, la direction de l’UQAM s’est cependant montrée peu encline à aller dans la voie tracée par PWC, affirmant viser la «protection des salaires et le maintien des effectifs à un niveau tel qu’il permet à l’université, malgré tout, de remplir sa mission». Les syndicats devraient réagir cet après-midi au document présenté hier soir.

Les étudiants sont cependant rapidement montés aux barricades en soirée. Une porte-parole de toutes les associations facultaires de l’UQAM (à l’exception de celle des sciences humaines en grève), Eve-Lyne Couturier, a vivement dénoncé la hausse des frais afférents, qui viendrait s’ajouter à celle de 160 $ déjà décrétée pour cette année et à l’augmentation de 30 % des droits de scolarité imposée par Québec. «C’est inacceptable. L’UQAM parle de négocier avec les syndicats, mais seulement d’échanger avec les étudiants».

Elle critique la vision comptable du rapport. Si on appliquait les mesures, l’UQAM «ne serait plus une institution d’enseignement supérieur ,mais une entreprise privée, où les étudiants sont vus comme des clients et les professeurs comme une masse salariale. Ce n’est pas comme cela qu’on va avoir une éducation de qualité», tonne Mme Couturier.

Le Conseil d’administration a pris acte du document hier et recommandé qu’on le transmette à la ministre et au réseau de l’Université du Québec. Les discussions devraient se poursuivre au sein de l’instance jeudi.

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