Intégration des nouveaux arrivants - Les commissions scolaires revendiquent le droit des immigrants de choisir

Le message des commissions scolaires est clair: «On ne veut pas d'argent du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles. On veut que la personne immigrante puisse avoir le choix d'aller là où elle veut apprendre le français.»

La Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ) et les commissions scolaires qu'elle représente se sentent concernées par les défis en matière d'accueil et d'intégration formulés par le gouvernement du Québec, plus précisément par les défis liés à la francisation, à l'intégration des immigrants au marché du travail et à la régionalisation. C'est notamment ce qui se dégage du mémoire de la FCSQ déposé récemment dans le cadre de la consultation sur la planification de l'immigration au Québec pour la période 2008-10 du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (MICC).

«Le but principal de l'élaboration et de la présentation de ce mémoire, c'est que le rôle des commissions scolaires sur le plan de l'intégration des immigrations dans notre société soit mieux connu et reconnu», souligne Isabelle-Line Hurtubise, auteure du mémoire et conseillère à la formation professionnelle et à l'éducation des adultes au sein de la FCSQ.

Le besoin de reconnaissance

Reconnaissance? La francisation des immigrants, qui va de pair avec leur intégration au marché du travail, est un enjeu que les commissions scolaires prennent très au sérieux. En ce sens, le message paraphé dans le mémoire de Mme Hurtubise est clair. «Nous sommes étonnés de constater l'absence de reconnaissance de plus de 20 ans de partenariat en matière de francisation. Pourtant, nous comptons près de 80 000 inscriptions dans les commissions scolaires en francisation à l'éducation des adultes au cours des cinq dernières années. Les commissions scolaires ont ajusté au fil des ans leur offre de services pour répondre aux besoins des immigrants, parents, étudiants ou travailleurs. Elles offrent des horaires adaptés pour les cours de francisation, soit de soir, de jour, à temps plein ou à temps partiel. La structure des centres d'éducation des adultes permet de recevoir des adultes toutes les semaines, et ce, 12 mois [par an]. La francisation est aussi offerte en concomitance dans plusieurs commissions scolaires. Un adulte peut donc suivre des cours de francisation en même temps que des cours en formation professionnelle.»

En 2005-06, des 16 800 personnes immigrantes inscrites à des cours de français dans les commissions scolaires, 12 705 l'étaient dans la seule région de Montréal. Dans ce cadre, c'est l'enveloppe fermée du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) qui finance entièrement le programme de francisation. «Nous, on ne veut pas d'argent du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles. On veut que la personne immigrante puisse avoir le choix d'aller là où elle veut apprendre le français», rappelle Mme Hurtubise.

Petit problème

Bienvenue au coeur du problème. Il faut en effet savoir que, une fois arrivée en terre québécoise, une personne immigrante est de facto prise en charge par le MICC. Sur une base volontaire, cette personne peut s'inscrire à un cours de francisation à l'un des bureaux de service de ce ministère. Dans cette optique, le MICC a conclu des ententes avec les universités, les cégeps et les groupes communautaires auprès desquels il loue des locaux où enseignent des professeurs liés au Syndicat des professeurs de l'État du Québec (SPEQ). «À quelques exceptions près, le MICC achète des services dans les commissions scolaires dans une région où il n'y a ni université, ni cégep, ou encore de groupes communautaires», note Claude Fradette, le porte-parole du MICC.

Cependant, explique Mme Hurtubise, plusieurs immigrants choisissent de s'inscrire à un cours de francisation dans une commission scolaire située à proximité de leur domicile ou de l'école de leur enfant, plutôt que d'attendre d'être appelés par le MICC conformément à la liste d'attente. «Or, quand ils reçoivent une lettre du MICC confirmant qu'une place est disponible ainsi que l'allocation hebdomadaire qui vient avec, ces gens sont déchirés parce qu'ils ont créé des liens importants avec la commission scolaire, et leur enfant fréquente aussi cette commission scolaire. Et quand ils choisissent d'aller vers le MICC, ils doivent souvent recommencer à zéro. Certains font le choix de rester, mais d'autres, pour des raisons financières, décident de nous quitter.»

En clair, toute personne immigrante qui accepte de recevoir cette allocation de dépenses — allant de 26 $ à 115 $ par semaine, d'après le MICC — dans le cadre du programme de francisation est tenue de fréquenter les institutions qui ont des ententes avec le MICC, soit les universités, les cégeps et les groupes communautaires.

La version de Québec

Bruno-Serge Boucher, l'attaché de presse de la ministre du MICC, Yolande James, prend acte de la situation, mais il demeure tout de même prudent quant à la recommandation de la FCSQ d'offrir aux personnes immigrantes le choix d'apprendre le français là où elles le désirent tout en profitant des allocations du MICC. «Madame la ministre Yolande James a mandaté ses fonctionnaires pour revoir tout ça, toute l'organisation. On a quelques mois pour le faire et voir de quelle façon ça devrait fonctionner. Le MICC va ensuite conclure des ententes de service avec les autres ministères, dont le ministère de l'Éducation.»

Collaborateur du Devoir

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