Vente d'édifices de l'UQAM - Héritage Montréal et Mascouche s'inquiètent du «bazardage»
Les déboires financiers de l'Université du Québec à Montréal (UQAM) risquent de mener cette institution à bazarder des immeubles de grande valeur patrimoniale, craignent Héritage Montréal et la Ville de Mascouche.
Comme Le Devoir l'annonçait le week-end dernier, l'UQAM tente par tous les moyens de se renflouer alors que la crise financière de plusieurs millions perdure. Ainsi, cinq des six immeubles achetés au cours des dernières années sont mis en vente, dont trois édifices patrimoniaux: la Bibliothèque nationale Saint-Sulpice, le domaine seigneurial de Mascouche ainsi que l'édifice de La Patrie.Lundi, une réunion du comité patrimoine-aménagement d'Héritage Montréal a permis de soulever une préoccupation par rapport à la vente décrétée par l'UQAM. Pour cet organisme de protection du patrimoine architectural et urbain, ces bâtiments grossiront la liste des édifices jugés en péril.
«On craint le bazardage», a affirmé hier Dinu Bumbaru, directeur d'Héritage Montréal et secrétaire général de l'ICOMOS, l'organisme-conseil de l'ONU pour les monuments et les sites. «La Bibliothèque nationale Saint-Sulpice, ce ne sont pas seulement des pieds carrés, c'est un monument historique classé. L'intérieur et le mobilier sont protégés. Le manoir de Mascouche est aussi un monument très intéressant. [...] Quant à l'édifice de La Patrie, dont l'architecture est emblématique, il a une viabilité économique plus assurée», juge M. Bumbaru.
Lundi également, les dirigeants de Mascouche ont rencontré des porte-parole de l'UQAM pour faire le point sur la mise en vente du domaine seigneurial, qui comprend un manoir et une forêt et couvre un total de deux millions de mètres carrés. C'est «un contretemps» compte tenu du fait que la Ville avait prévu que ce site soit intégré au vaste parc public protégé par Mascouche, «le plus gros poumon vert du Montréal métropolitain», comme le désigne le maire Richard Marcotte.
«Ça nous a donné un coup de jambette inattendu. Les problèmes de l'UQAM viennent tout chambarder», a lancé M. Marcotte.
Le maire de Mascouche est d'autant plus déçu que le projet prévoyait le redéploiement de l'UQAM sur la Rive-Nord. Il souhaite donc renverser la vapeur en créant un comité qui réfléchira à la suite des choses. «On va se battre et on va trouver des solutions. On n'est pas des gens qui baissent les bras», a-t-il assuré.
M. Marcotte a souligné que ce ne sera pas une vente facile. «Il y a des restrictions. Il n'y aura pas de promoteur pour construire des condos là-dedans, pas question», a-t-il tranché.
Héritage Montréal a également des idées pour la Bibliothèque nationale Saint-Sulpice, notamment dans le contexte de la tenue du sommet culturel de Montréal, l'automne prochain. «Pourquoi ne pas y faire la maison du patrimoine de Montréal?», a lancé M. Bumbaru.
Ces inquiétudes découlent des problèmes auxquels fait face l'UQAM depuis qu'elle a décidé d'investir dans l'immobilier. La construction du Complexe des sciences s'avère une aventure dont le coût s'élève à plus de 100 millions. Quant à l'îlot Voyageur, avec ses 600 places de stationnement, une gare centrale d'autobus revampée et une tour de bureaux de 20 étages, ce projet fait l'objet d'une enquête. Le conseil d'administration de l'UQAM discutera de sa situation la semaine prochaine lors d'une séance spéciale.
Hier, d'ailleurs, un nouveau représentant des professeurs a été élu lors de l'assemblée générale syndicale. Le sociologue Jacques Beauchemin siégera comme administrateur à compter d'août prochain.