La CSQ demande une réforme de la réforme

Pour «réformer la réforme», les 57 000 enseignants membres de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) demandent au ministre de l'Éducation de mieux encadrer les élèves en difficulté. Ils exigent en outre une commission indépendante pour faire le point sur la réforme.

Ces enseignants jugent que le mariage explosif d'une réforme chancelante et de «l'intégration sauvage» des élèves handicapés et en difficulté dans les classes ordinaires cause tout l'émoi qui alimente ces jours-ci la manchette. «La réforme a le dos large, a expliqué hier Johanne Fortier, présidente de la FSE. Dans certains milieux, on invoque la réforme pour expliquer l'arrêt des mesures destinées aux clientèles fragilisées. Ça n'a pas de bon sens!»

Interpellé par les deux syndicats lundi, au cours d'un entretien privé, le ministre de l'Éducation, Jean-Marc Fournier, a réagi hier en soulignant sa grande satisfaction à l'égard du passage syndical du «mode combat au mode partenariat». Confiant qu'il n'était «pas chaud» à l'idée d'une commission indépendante, M. Fournier s'en est plutôt remis à la table de pilotage du renouveau pédagogique, qui est composée de tous les acteurs du primaire et du secondaire. Ce groupe doit se pencher sur un nouveau bilan de la réforme à la mi-décembre.

«Si les réponses du ministre ne sont pas suffisantes, s'il n'accepte pas de se commettre publiquement plutôt que de s'en remettre tout le temps à la table de pilotage, ça ne passera pas chez nous», a déclaré Mme Fortier. La FSE pourrait quitter cette table de pilotage si la réplique ministérielle lui semble trop fade, a précisé Mme Fortier.

«Le retour à la case départ est utopique» pour la FSE et la CSQ, mais elles ont tout de même exposé six demandes au ministre: entre autres, renoncer à l'évaluation des compétences transversales, permettre le retour des classes spéciales (destinées seulement aux élèves handicapés et en difficulté) et autoriser le redoublement.

«On adresse un message clair au ministre: on ne va pas jusqu'à dire qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain, mais l'eau du bain est pas mal sale, il faudrait s'en débarrasser, a expliqué hier le président de la CSQ, Réjean Parent. Il y a sûrement de bonnes idées dans la réforme, on ne veut pas tout effacer, mais certains éléments doivent être interrogés.»

Le ministre Fournier a d'ailleurs plusieurs fois répété hier qu'il appréciait cette politique de «la main tendue». «Je trouve ça très positif, très encourageant pour la suite des choses», a-t-il dit.

Cette réponse à la main tendue du ministre n'adoucit pas les demandes syndicales, a précisé M. Parent, de la CSQ. «Si le ministre ne bouge pas suffisamment sur la réforme, il se tire dans le pied, parce que, dans les écoles, les choses n'iront pas en s'améliorant.»

Pour les 27 000 enseignants qui ont claqué la porte de la CSQ au printemps, désormais regroupés sous la bannière de la FAE (Fédération autonome de l'enseignement), les propositions mises en avant par leur ancien syndicat ont été «accueillies positivement», a indiqué Nicole Frascadore, présidente de la FAE.

La FAE décode un message qui s'apparente au leur, soit l'arrêt de l'implantation de la réforme au secondaire. «Si le ministre accepte leurs demandes, c'est une remise en question de la réforme, ni plus ni moins, c'est comme un arrêt de la réforme, ne jouons pas sur les mots», a-t-elle dit.

La FAE estime en outre qu'on lui attribue généralement des positions plus cassantes que celles qu'elle met réellement en avant. «Nous n'avons jamais demandé de faire tabula rasa pour revenir sept ans en arrière, nous avons toujours parler d'arrêter l'implantation pour la corriger», a ajouté Mme Frascadore.

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