Rosemont–La Petite-Patrie veut en finir avec le suremballage

Souhaitant en finir avec le gaspillage et le suremballage, Rosemont–La Petite-Patrie veut aider ses citoyens à réduire leur quantité de déchets. L’arrondissement montréalais est à la recherche de 50 foyers prêts à embarquer dans un projet-pilote qui les plongera dans un mode de vie zéro déchet pendant huit mois.
« On se rabat souvent sur le compost et le recyclage pour se déculpabiliser de notre surconsommation. Mais il faut réduire nos déchets à la source pour avoir un réel impact sur l’environnement », lance au bout du fil le maire de l’arrondissement, François Croteau, en expliquant les motivations derrière le projet.
D’octobre à mai prochain, 50 foyers du quartier seront accompagnés dans une démarche de réduction de leur production de déchets au quotidien. Trois expertes du zéro déchet — les blogueuses Laure Caillot, Amélie Côté et Mélissa de La Fontaine — leur donneront des conseils pour changer leurs habitudes de consommation et de gestion des déchets.
« Quoi apporter pour faire l’épicerie ? Où acheter des produits en vrac sans emballage ? Comment faire ses produits d’entretien ? On veut apporter une aide personnalisée et amener les gens à réfléchir en leur expliquant pourquoi c’est mieux ainsi plutôt que juste dicter quoi faire », explique Laure Caillot.
Les participants devront peser chaque mois leurs ordures et établir un objectif de réduction à atteindre. « Il faut viser quelque chose de réaliste. Si c’est trop demandant, ça va les décourager et ils n’adopteront pas de nouvelles habitudes sur le long terme », précise Mme Caillot.
Pour aller plus loin, des formations et des rencontres de groupe sont prévues. Les citoyens pourront aussi partager leurs astuces à travers un groupe Facebook.
Et tout ça, gratuitement… ou presque. En juin dernier, l’administration a prévu dans son budget près de 25 000 $ pour le projet. De l’argent qui vient donc des poches des citoyens qui payent leurs taxes.
« C’est le principal bémol du projet : seules 50 familles vont en profiter, alors que l’ensemble des citoyens paie des taxes, et donc pour ce projet, sans en bénéficier directement », souligne Marlène Hutchinson, chargée de cours en environnement et développement durable à l’Université Sherbrooke.
Elle trouve toutefois l’idée « avant-gardiste » et plus efficace que « d’envoyer un guide sur le recyclage ou le compost, que les gens ne liront pas ».
« Si on réduit à la source nos déchets, c’est moins de recyclage, de déchets et de compost à ramasser chaque mois. À grande échelle, ça coûtera moins cher pour l’arrondissement et ça permettra d’investir de l’argent dans d’autres services aux citoyens », note pour sa part François Croteau.
Projet à long terme
Les intéressés ont jusqu’au 30 septembre pour déposer leur candidature. Celles retenues seront annoncées le 11 octobre.
Célibataires, couples avec ou sans enfant, parents célibataires, jeunes étudiants ou retraités : les profils retenus seront variés. Et aucunement besoin d’être initié au zéro déchet. Cela permettra de déterminer les défis pour chaque type de ménage puisque des données seront recueillies et analysées pendant huit mois afin d’ajuster les besoins d’encadrement et d’améliorer le programme.
D’ailleurs, le projet-pilote n’a même pas commencé qu’il est déjà voué à se répéter et à grandir. « On teste le modèle pour voir comment on peut l’améliorer, car notre intention, c’est de le pérenniser en augmentant le nombre de foyers admissibles chaque année », affirme M. Croteau.
Il ne doute aucune minute du succès du projet-pilote. Et le nombre de candidatures en une semaine en témoigne : plus de 300 foyers ont déjà rempli le formulaire de participation.
« Nos citoyens sont déjà sensibilisés aux enjeux environnementaux, ils ont un désir d’apporter leur contribution », ajoute le maire. Il rappelle que Rosemont-La Petite-Patrie se place parmi les cinq arrondissements qui compostent le plus, enregistrant un taux de récupération des matières organiques de 22 % pour l’année 2016.
Son optimisme est partagé par Laure Caillot. À son avis, l’arrondissement choisi est « l’endroit par excellence à Montréal » pour commencer à changer ses habitudes et tendre vers le zéro déchet. « Il y a déjà deux épiceries zéro déchet, ça aide beaucoup pour commencer. »
Motivations à participer
De nombreuses familles ont déjà envoyé leur formulaire d’inscription au projet-pilote zéro déchet. Le Devoir a interrogé certains candidats sur leurs motivations.Installée dans le quartier depuis deux mois, Tatiana Rivera s’est inscrite avec son mari et ses trois enfants de 5, 4 et 1 an et demi. « On espère avoir des bons plans pour mieux consommer et réduire encore plus nos déchets, mais aussi donner de saines habitudes à nos enfants et leur montrer que l’on peut se passer d’un tas de choses même si la télé et les affiches disent le contraire. »
Julie Cardinal Laberge est mère monoparentale de deux garçons de 10 ans et 9 ans. Elle vit dans l’arrondissement depuis deux ans et demi. « Ce que j’attends du projet ? Qu’on me donne de nouvelles idées, des outils. Faire partie d’un projet encadrant, ça motive à garder le cap sur nos valeurs, nos objectifs. »
Céline Guérin s’est inscrite avec son conjoint David et ses deux enfants de 3 et 6 ans. « Cette année nous avons déménagé en condo et je descends les poubelles au local dédié plusieurs fois dans la semaine entre le tri, le compost et la poubelle de déchets. C’est là que je me suis vraiment rendu compte du nombre de déchets importants que notre famille produisait ! J’ai décidé que nous devions entamer une démarche de réduction des déchets. »