OGM: trois variétés de maïs Monsanto cultivées au Canada montrent des «signes de toxicité inquiétants»

Photo: Pedro Ruiz - Le Devoir

Toxiques, mais cultivés. Trois variétés de maïs génétiquement modifié largement répandues sur la planète, y compris au Canada, comportent d'importants risques de toxicité. C'est du moins ce qu'indique une étude menée par le Comité de recherche et d'information indépendant sur le génie génétique (CRIIGEN) en France. Les résultats de l'analyse viennent d'être publiés dans la dernière livraison de l'International Journal of Biological Sciences.

La révélation est d'autant plus percutante qu'elle a été faite par les scientifiques après une réévaluation des résultats d'études en laboratoire sur des rats, études fournies par la multinationale Monsanto pour l'approbation dans plusieurs pays européens des organismes génétiquement modifiés (OGM) désormais sur la sellette: le MON 810, MON 863 et le NK 603.

Or, assure le CRIIGEN, ces OGM ne sont pas sains et surtout pas assez sécuritaires «pour être commercialisés», a commenté Gilles-Éric Séralini, coauteur de l'étude et expert du Groupe d'évaluation des biotechnologies de l'Union européenne.

«Notre analyse révèle clairement, pour ces trois OGM, de nouveaux effets secondaires liés à [leur] consommation», peut-on lire dans l'étude qui évoque une toxicité perceptible sur le foie et les reins des animaux alimentés avec ces nouvelles formes de maïs. L'analyse met également en lumière d'autres effets délétères sur le coeur, les glandes surrénales, les cellules sanguines et la rate des mammifères exposés à ces organismes.

L'équipe de scientifiques s'est basée sur les études toxicologiques que Monsanto a fournies dans les dernières années aux autorités sanitaires de Suède, du Danemark et de l'Allemagne afin de démontrer l'innocuité de ces transgènes et obtenir du coup le droit de les commercialiser. Les données de ces expériences en laboratoire conduites sur les trois variétés de maïs ont été rendues publiques dans la foulée de démarches juridiques amorcées dans ces trois pays par des groupes environnementaux, dont Greenpeace. Le CRIIGEN a toujours prétendu que la méthodologie utilisée par la multinationale n'était pas la bonne.


Un recadrage méthodologique

Ces récentes découvertes, révélées aujourd'hui dans une publication scientifique reconnue, sont finalement le fait d'un recadrage méthodologique qui vient affiner «le niveau de précision» des effets sur les mammifères, précise le document. Au total, l'équipe a passé au crible 60 paramètres biochimiques mesurés sur plusieurs organes des rats nourris avec ces OGM pendant 14 semaines.

Par ailleurs, le comité de recherche estime que les «signes de toxicité inquiétants» livrés par cette contre-expertise des études de Monsanto démontrent «avec force» l'importance de poursuivre l'analyse toxicologique de ces organismes sur les êtres vivants, et ce, pendant une période plus longue, de plus de deux ans, peut-on lire dans l'étude.

À l'image de la plupart des OGM en circulation dans le monde, deux des trois maïs au coeur de cette étude ont été génétiquement améliorés afin de produire leur propre pesticide, et ce, pour se protéger seuls des parasites. Le MON 863 s'attaque par exemple à la chrysomèle, un prédateur qui s'attaque aux racines de la plante. Le MON 810, pour sa part, a été conçu pour éradiquer la pyrale du maïs. Quant au NK 603, il a été pensé pour résister au Roundup, le pesticide chimique vendu par Monsanto.

Malgré nos appels, il n'a pas été possible de parler à un représentant de la multinationale hier. Toutefois, dans un communiqué diffusé en novembre 2008, Monsanto réitère l'innocuité des maïs transgéniques MON 810 et NK 603, régulièrement montrés du doigt par des groupes opposés aux biotechnologies. Des groupes qui, «depuis des années, remettent en question la sécurité des cultures» d'OGM en faisant beaucoup d'allégations «fondées sur des données scientifiques prises hors contexte et des revues scientifiques qui manquent de rigueur», écrit l'entreprise américaine.

Le maïs MON 810 a obtenu le droit d'être commercialisé au Canada en 1997. Par la suite, en 2001 et 2003, les variétés MON 863 et NK 603 ont également reçu ce feu vert des autorités sanitaires. Cultivées un peu partout au pays, ces plantes se retrouvent principalement dans l'alimentation du bétail. Les nombreuses remises en question de leur innocuité n'ont, pour le moment, pas incité Santé Canada à revoir sa position sur ces trois transgènes commercialisés.

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