Procès à Londres - Mia Farrow témoigne en faveur de Roman Polanski

Londres — L'actrice américaine Mia Farrow a témoigné hier devant un tribunal londonien en faveur du cinéaste Roman Polanski, qui poursuit en diffamation le groupe de presse Conde Nast pour des allégations concernant sa vie sexuelle.
Vanity Fair, un magazine du groupe, avait publié en juillet 2002 un article affirmant qu'il a fait des avances sexuelles à une «beauté suédoise» dans un restaurant de New York, en 1969, juste avant l'enterrement de sa femme, Sharon Tate, sauvagement tuée par Charles Manson.Mia Farrow, costume pantalon noir et chemise claire, longs cheveux lâchés, a indiqué qu'elle avait donné rendez-vous au cinéaste à New York après la mort de Sharon Tate et qu'elle l'avait vu rejeter les avances de deux femmes. «Nous attendions une table [au restaurant Elaine's] et je me rappelle qu'il y avait deux femmes qui semblaient vouloir flirter avec lui. Je me souviens avoir pensé que c'était particulièrement déplacé. Puis nous avons pris place à table», a dit l'ancienne épouse de Woody Allen, dont la carrière avait été lancée en 1968 par Rosemary's Baby mis en scène par Polanski. «Il n'a pas fait attention parce qu'on ne s'était pas vu depuis le meurtre de Sharon. Je pense que j'étais peut-être en train de pleurer et que je le serrais dans mes bras et il les a repoussées», a-t-elle ajouté, sans pouvoir préciser exactement la date de cette rencontre.
Durant ce dîner, il n'a cessé de parler du meurtre de sa femme, enceinte de huit mois, et «était très triste». «Il était incapable de parler de quoi que ce soit d'autre et répétait seulement: "Pourquoi?", "Qui aurait pu faire cela?" C'était avant qu'on sache qui l'avait fait», a-t-elle dit. «Ce dont je suis sûre, c'est de son état d'esprit, le sentiment de perte, de désespoir, de confusion, de choc et l'amour, l'amour qu'il avait perdu», a ajouté Mia Farrow, âgée de 60 ans.
Mia Farrow et Roman Polanski, qui a reçu l'Oscar du meilleur réalisateur en 2003 pour Le Pianiste, sont amis depuis le tournage de Rosemary's Baby.
L'article de Vanity Fair affirmait que Polanski avait fait des avances à une «beauté suédoise» au restaurant Elaine's, avant même l'enterrement de sa femme. Le magazine a depuis indiqué que les faits s'étaient produits après les funérailles, mais a maintenu l'essentiel de l'histoire. «Fasciné par son numéro, je l'ai regardé alors qu'il glissait sa main le long de sa cuisse et commençait un long baratin mielleux qui s'est terminé avec la promesse: "Je ferai de toi une nouvelle Sharon Tate"», décrivait un témoin cité par l'article.
L'avocat de Roman Polanski, John Kelsey-Fry, a déclaré devant la cour que l'article impliquait que le cinéaste utilisait le nom de sa femme décédée pour séduire des filles, ce qui témoignait d'une «conduite monstrueuse» et d'«une indifférence à la mémoire de sa femme à couper le souffle».
Français d'origine polonaise, âgé de 71 ans, Roman Polanski, qui vit en France, ne s'est pas rendu à Londres pour le procès car il craint d'être arrêté et extradé aux États-Unis, où il est recherché depuis 1977 pour avoir eu des relations sexuelles avec une mineure de treize ans. Il a témoigné lundi par lien vidéo, racontant notamment ses passades sexuelles quelques semaines seulement après la mort de sa femme.
«Je ne jugerais pas quelqu'un qui, dans cet état d'esprit, cherche du réconfort d'une manière qui ne fasse du mal à personne. Je ne vois pas ça comme un manque de respect pour Sharon», a déclaré Mia Farrow.
D'autres témoins, notamment la soeur de Sharon Tate, Debra, ou Andrew Braunsberg, un collègue de Polanski, ont témoigné de son désespoir quand il a appris la mort de sa femme. Dans les semaines qui ont suivi le meurtre, «il était en état de choc, de dépression nerveuse», a expliqué M. Braunsberg.
Le procès doit se terminer cette semaine.