Malgré un répit, le combat contre les feux s’annonce encore long

« Il n’y a pas d’autres évacuations prévues à court terme », a indiqué le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, au cours d’un point de presse tenu à Roberval. « Mais cela, a-t-il ajouté, peut évoluer. »
Francis Vachon Le Devoir « Il n’y a pas d’autres évacuations prévues à court terme », a indiqué le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, au cours d’un point de presse tenu à Roberval. « Mais cela, a-t-il ajouté, peut évoluer. »

Malgré une météo qui accorde un peu de répit sur le front des feux de forêt, le Québec reste encore loin d’être tiré d’affaire. Plus de 12 600 évacués demeurent, jeudi, sans espoir de retrouver leur domicile à court terme, l’absence de pluie prolongée, conjuguée à des températures élevées attendues en fin de semaine, risquant de compliquer le combat contre les 136 brasiers encore allumés dans la province.

Les flammes menacent toujours Normétal, Lebel-sur-Quévillon et Chibougamau, mais des vents favorables et les défenses érigées par les troupes de la SOPFEU ont permis de freiner leur avancée au cours des dernières 24 heures. « Il n’y a pas d’autres évacuations prévues à court terme », a indiqué le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, au cours d’un point de presse tenu à Roberval. « Mais cela, a-t-il ajouté, peut évoluer. »

Le danger le plus imminent se trouve à Normétal, où le feu se trouve, immobile, à seulement 500 m de la communauté. À Lebel-sur-Quévillon et à Chibougamau, une température basse et une humidité plus importante ont contribué à tenir les incendies à une distance de 15 km des villes. Conclure que ces zones sont sous contrôle, avertit le gouvernement, « est un grand mot. »

« Dans les prochains jours, nous n’attendons pas d’accumulation d’eau importante, sinon des températures plus chaudes à partir de dimanche et lundi qui risquent d’entraîner un niveau d’alerte encore plus important », a prévenu le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, dans un portrait de la situation donné à Roberval, ville refuge de plusieurs évacués de Chibougamau.

« Et pas d’eau, pas d’eau, a-t-il insisté avec découragement, attendue au cours des prochaines journées. »

Du renfort attendu

 

Le Québec attend des renforts d’Europe et des États-Unis « au cours des prochains jours », a souligné le ministre. Une aide bienvenue au moment où 136 feux brûlent alors que les troupes en place permettent d’en combattre une trentaine.

Une quarantaine de soldats doivent se déployer à Chapais vendredi, une ville où l’évacuation demeure volontaire, mais « fortement recommandée » pour les personnes à la santé précaire. D’autres iront à Normétal pour, là aussi, porter secours aux pompiers forestiers.

Le gouvernement est en pourparlers pour obtenir une aide accrue des Américains, enfumés par les incendies qui ravagent la forêt canadienne et « eux aussi préoccupés par ce qui se passe ». L’aide américaine arriverait à point, a précisé le ministre Bonnardel, au moment où le manque de pilotes pourrait clouer deux avions-citernes au sol dès les « prochains jours ».

« La majorité des pilotes font 100 heures de vol par saison. Là, ils vont faire 100 heures de vol en 30 jours et ils ne peuvent pas en faire plus ». Les règles permettent de réaliser 20 heures supplémentaires à titre volontaire : néanmoins, les troupes sollicitées par une saison des feux aussi précoce qu’intense doivent se reposer.

Le ministre a souligné que le Québec ne déplorait aucun blessé, ni décès, ni même une seule résidence brûlée malgré les brasiers hors de contrôle qui ravagent le territoire depuis deux semaines. « C’est un travail colossal », a-t-il tenu à saluer. Tout autour de Chibougamau, d’Oujé-Bougoumou et de Mistissini, les pompiers ont créé des tranchées de 40 m de largeur pour freiner l’avancée du feu si le vent venait à le pousser vers ces communautés.

Le gouvernement promet de présenter, « au cours des prochains jours », un plan d’indemnisation pour les municipalités et les personnes affectées. « On ne va pas abandonner personne, a martelé le ministre de la Sécurité publique. Nous sommes conscients des difficultés que plusieurs personnes ont, celles d’avoir perdu leur emploi minier ou forestier. Nous sommes aussi conscients des dépenses extraordinaires que les municipalités doivent assumer présentement. Je le répète : on n’abandonnera personne. »

Chibougamau, les yeux rivés au ciel

 

À Chibougamau, les deux prochains jours se révéleront cruciaux, selon la mairesse Manon Cyr. Les autorités surveillent la direction des vents, jusqu’ici favorable au travail des pompiers, et implorent surtout le ciel de leur envoyer rapidement de la pluie.

Jeudi matin, le soleil brillait au-dessus de Chibougamau, dans un ciel presque sans nuage. Pendant que l’est des États-Unis suffoque, nulle trace des immenses feux qui brûlent en Jamésie dans la ville qui se trouve à quelques kilomètres des brasiers.

Le portrait est toutefois trompeur, indique la mairesse Manon Cyr. La situation va bien pour le moment, mais Dame Nature contrôle encore la partie : aucun retour à la maison n’est envisageable avant samedi.

En attendant, les évacués de Chibougamau ont les yeux rivés au ciel.

 

« Il faut qu’il pleuve, insiste la mairesse. Le problème, c’est qu’il n’y en a pas plus d’annoncé. »

Environnement Canada prédit que les prochaines précipitations en Jamésie tomberont au plus tôt mardi. D’ici là, la SOPFEU crée des tranchées autour des infrastructures cruciales de la ville, érigeant des défenses dans l’espoir qu’elles freineront l’avancée des flammes si la situation devait soudainement empirer.

Malgré le temps sec attendu au cours des prochains jours, la mairesse, qui était de passage à Roberval, jeudi matin, pour rencontrer les évacués et, surtout, rassasier la bête médiatique qui la sollicite de toutes parts depuis deux jours, avait des nouvelles encourageantes à partager.

« Nous avons assez d’équipes en termes de mesures d’urgence. Nous avons des équipes de nuit et des mesures de jour », a-t-elle indiqué depuis le centre d’accueil d’urgence érigé dans l’aréna de Roberval.

Mercredi, les interventions de la SOPFEU ont porté fruit, précise-t-elle, permettant de renforcer les remparts qui doivent protéger Chibougamau des brasiers. Le vent peut toutefois tourner, avertit Manon Cyr, et la menace réapparaître subitement aux portes de la ville.

 

La mairesse a discuté avec son homologue de Sept-Îles, jeudi matin. Lui-même ressort d’un épisode où les feux de forêt qui font rage ont, pendant un moment, menacé d’avaler des quartiers.

« J’ai parlé au maire de Sept-Îles plus tôt ce matin », a raconté la mairesse. Steeve Beaupré a lui-même dû gérer un incendie qui menaçait, la semaine passée, d’avaler certains quartiers.

« Il m’a dit : “Tu vas voir Manon, tu vas combattre un feu et tu vas penser que c’est réglé, mais le temps de te revirer de bord, tu vas peut-être t’apercevoir qu’il y en a un autre qui avance de l’autre côté.” »



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