Cité-des-Hospitalières: prendre soin des Montréalais et de Montréal
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Commémoration de Jeanne Mance
Si, aujourd’hui, la Cité-des-Hospitalières n’appartient plus aux Religieuses hospitalières de Saint-Joseph, le voeu de ces dernières, qui y résident encore, demeure toujours le même : que ce site patrimonial conserve sa vocation de prodiguer des soins à l’autre.
En pleine pandémie, alors que les autorités cherchaient un lieu pour loger une centaine d’itinérants, le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, avec d’autres partenaires, décide de réoccuper le pavillon Le Royer de l’ancien Hôtel-Dieu, qui est l’un des principaux bâtiments du complexe patrimonial de la Cité-des-Hospitalières.
« Au ministère, ils étaient plusieurs à croire que les soeurs résisteraient à cette proposition, d’autant que le voisinage avait des préoccupations », raconte Danielle Fleury, p.-d.g. adjointe du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) et administratrice du Musée des Hospitalières. « Or, c’est tout le contraire qui s’est passé. Les soeurs ont spontanément accepté ce projet parce qu’il s’inscrivait parfaitement dans leur oeuvre. »
Pour soeur Nicole Gaudet, supérieure générale des Religieuses hospitalières de Saint-Joseph (RHSJ), ce consentement était tout naturel. « L’Hôtel-Dieu ne nous appartient plus, mais ce n’est pas encore entré dans les mentalités », explique l’infirmière de formation et dernière religieuse à travailler pour l’Hôtel-Dieu. « Nous avons choisi de demeurer dans les lieux comme locataires, mais nous les avons effectivement donnés. Nous avons seulement exprimé le voeu que le projet de la Cité-des-Hospitalières soit ouvert à la collectivité pour répondre à ses besoins. »
Prodiguer des soins à l’autre
Les 34 religieuses qui y résident, explique la supérieure générale, occupent encore la Cité-des-Hospitalières, dans une aile. L’hôpital, le monastère, la chapelle, le musée appartiennent désormais à la Ville.
« Nous avons vendu pour nous libérer de la gestion. Nous sommes devenues un groupe de personnes âgées qui n’est plus dans l’action, dit-elle. Notre maison est une RPA [résidence pour aînées] dont la gestion relève d’une firme spécialisée. Notre mission, en tant que communauté religieuse, est désormais d’assurer une vie en congrégation dans la contemplation et la prière. »
Soeur Nicole Bussières, archiviste des Religieuses hospitalières de Saint-Joseph, explique que les mêmes décisions ont été prises pour toutes les branches de la communauté. « Les activités américaines sont désormais fermées. Les trois couvents du Nouveau-Brunswick sont devenus des RPA comme le nôtre. Au Mexique, dans le Chiapas, nous avons une soeur qui agit comme infirmière et qui fait la pastorale. Au Pérou, c’est une garderie pour enfants de familles monoparentales. »
Les deux religieuses expliquent que la congrégation a souhaité demeurer sur place comme locataire dans l’optique de transmettre ses valeurs dans la recherche de la nouvelle vocation du complexe patrimonial, actuellement en phase transitoire.
Soeur Nicole Gaudet illustre son dessein en montrant sa lecture de chevet, Diriger avec son âme, qui fait valoir que le leadership est indissociable de la spiritualité. « Diriger avec son âme, ça veut dire quoi ? Jeanne Mance faisait plus que de voir à la santé et au bien-être des malades. Elle donnait son argent pour sauver la colonie, collaborer avec Maisonneuve. Les vrais leaders s’épanouissent dans le service aux autres. Les gens ont tellement de complexes à l’égard de la religion qu’ils en oublient leur âme. Des femmes comme Valérie Plante, comme Sophie Brochu, comme Geneviève Guilbault dirigent avec leur tête et leur coeur, bref, avec la totalité de leur personne. C’est ça, l’âme. »
Pour Danielle Fleury, Jeanne Mance et ses héritières ont su assumer une forme de leadership non pas écrasant, mais qui savait susciter l’adhésion. « Son talent réel de gestionnaire se mêlait à un charisme indubitable. »
Projet en cours
Soeur Nicole Bussières raconte que dans les négociations complexes pour la cession de la Cité-des-Hospitalières, la Ville a tout de suite accédé au souhait des religieuses de demeurer sur le site. « Soeur Choquette, qui était une vraie Montréalaise, a dit : “Jeanne Mance était venue pour Montréal, et nous avons rendu la Cité-des-Hospitalières à Montréal. Je peux mourir en paix.” »
Lorsqu’on évoque le devenir de la Cité-des-Hospitalières, les deux religieuses ne peuvent s’empêcher de laisser transparaître une vague inquiétude, vite réprimée. Depuis 2017, la Ville n’a pas encore décidé de ce qu’elle ferait de ce grand ensemble, mais la supérieure générale rappelle la nécessité d’être créatifs, courageux et patients. « Il ne faut pas non plus se tromper », convient-elle.
« Ce qu’on veut faire avec la Cité-des-Hospitalières est encore en développement, mais on veut que ce soit un lieu d’innovation, dans l’esprit même des Hospitalières, affirme la mairesse de Montréal, Valérie Plante. Mais je dois admettre que c’est encore en devenir. Comme c’est un édifice patrimonial, on ne peut pas faire n’importe quoi et il faut tenir compte des coûts de rénovation et de mise aux normes, mais je veux que les soeurs sachent que nous allons en prendre soin. Nous en sommes très fiers. »
Selon Danielle Fleury, des discussions seraient en cours pour que la Cité serve d’unité de soins palliatifs. « Ce serait parfait. Une autre mission serait qu’elle soit consacrée à la santé psychosociale. Ça aussi, ce serait idéal. »
À l’évocation de ces deux avenues, le visage des deux religieuses s’éclaire. « On souhaite que la Cité réponde aux besoins des Montréalais en quête de sens, pour les gens en mal de vivre, au-delà de la religion. La Cité est un lieu unique de silence, de paix et de beauté, conclut soeur Nicole Gaudet. Tout ça doit prendre un sens aujourd’hui. »
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