Deux nouveaux corps retrouvés près d’Akwesasne

Deux autres corps, ceux d’un enfant et d’une femme, ont été retrouvés près d’Akwesasne, ont annoncé les autorités locales vendredi après-midi. Ils s’ajoutent aux six autres personnes retrouvées mortes jeudi. Selon la police, ces huit personnes cherchaient à entrer aux États-Unis de manière irrégulière à partir du Canada.
D’après le service de police mohawk d’Akwesasne, les six premières personnes retrouvées venaient de deux familles d’origines différentes : l’une indienne, l’autre roumaine.
Les Forces armées canadiennes, qui sont venues en aide à la police locale jeudi, ont affirmé que quatre corps avaient été repérés vers 15 h 30 par une équipe de sauvetage venue dans la région en hélicoptère. L’équipage a par la suite atterri à Cornwall pour faire le plein, puis est retourné dans la région où il avait trouvé les premiers corps. Il en a alors découvert deux autres. Sur son compte Facebook, la police d’Akwesasne dit plutôt que le premier corps a été trouvé à 17 h.
Le service de police affirme qu’il attend encore les résultats d’une autopsie pour déterminer la cause du décès des huit personnes.
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Une autre personne, Casey Oakes, un membre de la communauté mohawk, manque toujours à l’appel. Il a été vu pour la dernière fois mercredi, sur son bateau.
C’est d’ailleurs en partant à la recherche de cet homme que les Forces armées canadiennes et la police d’Akwesasne ont pu repérer les six premiers corps. Son bateau a été retrouvé à proximité des victimes. La police n’a pas précisé s’il y avait un lien entre la disparition de M. Oakes et la macabre découverte. Un homme de 30 ans du nom de Casey Oakes, résidant à Akwesasne, a été accusé l’an dernier de conduite dangereuse et d’agression armée. Le procès n’a pas encore eu lieu.
Les policiers provinciaux du Québec et de l’Ontario, ainsi que la Gendarmerie royale du Canada et les agents frontaliers sont impliqués dans l’enquête sur la découverte des corps.
De passage au Nouveau-Brunswick, le premier ministre, Justin Trudeau, s’est montré troublé par cette affaire, mais a évité de s’avancer sur les circonstances. « Il y a une enquête en cours et je ne veux pas sauter sur les spéculations et les faits non confirmés qui circulent à présent. Il va falloir qu’on comprenne bien ce qui s’est passé pour pouvoir prendre les meilleures mesures pour protéger les gens vulnérables. »
Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Marco Mendicino, s’était dit bouleversé dans un gazouillis publié plus tôt. « Les nouvelles en provenance d’Akwesasne sont bouleversantes. J’ai contacté le grand chef Abram Benedict pour lui exprimer nos condoléances. Dans l’attente de plus amples informations, mes pensées vont aux proches des victimes. »
Déplacements en hausse
Lors d’un point de presse, Lee-Ann O’Brien, cheffe adjointe de la police locale, a indiqué que le service policier avait constaté une augmentation du nombre de personnes qui traversaient le territoire pour se rendre du Canada aux États-Unis. La découverte des corps, a-t-elle dit, n’est pas liée à la fermeture du chemin Roxham, en Montérégie, il y a deux semaines.
Dans un communiqué, en février, la police d’Akwesasne avait fait savoir que le trafic d’êtres humains était en augmentation dans la région. « La nature du trafic d’êtres humains et les récentes conditions météorologiques ont mis en danger nos premiers répondants lors des manoeuvres de sauvetage », a écrit le service policier. Bien que ce trafic soit un problème de sécurité publique, la police a rappelé que les « immigrants illégaux [sont] des êtres humains ».
Le territoire d’Akwesasne est propice au trafic d’êtres humains et de stupéfiants depuis des années puisqu’il chevauche le Québec, l’Ontario et les États-Unis, selon les autorités. En 2010, le département de la Justice des États-Unis rapportait que jusqu’à 20 % du cannabis hautement puissant produit au Canada chaque année entrait aux États-Unis par l’entremise de la réserve St. Regis, sur le territoire d’Akwesasne.
Au cours des années 1990, la police locale ainsi que le Service américain des douanes et de la protection des frontières avaient rapporté plusieurs entrées irrégulières aux États-Unis à partir du Canada. On appelait alors la région la « ruelle des trafiqueurs ». En 1996, un important réseau de trafic d’êtres humains avait été démantelé par les autorités américaines et canadiennes. Des personnes originaires de la province de Fujian, en Chine, s’envolaient pour le Canada, puis passaient par Cornwall pour se rendre aux États-Unis.
Avec Sarah R. Champagne, Stéphanie Marin et La Presse canadienne
Ce reportage bénéficie du soutien de l’Initiative de journalisme local, financée par le gouvernement du Canada.