Faux numéro d’enregistrement, vraie annonce sur Airbnb

Lionel Bonaventure Agence France-Presse La semaine dernière, Airbnb a annoncé que toutes les annonces de locations à court terme illégales au Québec sur sa plateforme seraient supprimées.

Cinq minutes. C’est le temps qu’il a fallu au Devoir pour publier son annonce sur la plateforme de location à court terme Airbnb, en utilisant un numéro d’enregistrement de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ) inventé de toutes pièces.

La semaine dernière, Airbnb a annoncé que toutes les annonces de locations à court terme illégales seraient supprimées de sa plateforme ce mardi. Afin de rendre leurs offres légitimes, les hôtes doivent, en théorie, obtenir un numéro d’enregistrement auprès de la CITQ, qui certifie que leur logement répond aux critères de Québec en ce qui concerne l’hébergement touristique.

Or, Le Devoir a créé en quelques clics mercredi une offre sur cette plateforme en inscrivant un faux numéro d’enregistrement à la CITQ. Le lendemain, deux demandes de réservation ont été effectuées pour ce logement fictif de la part de touristes souhaitant y demeurer quelques nuits en avril et en juillet.

Une tactique répandue

Les hôtes sont d’ailleurs nombreux à avoir usé de la même tactique pour continuer d’utiliser la plateforme ou encore pour créer de nouvelles annonces sur celle-ci.

Ainsi, en un peu plus d’une heure de recherche, Le Devoir a trouvé une quinzaine d’annonces de logements à louer sur la plateforme Airbnb dans différents secteurs de Montréal, et dont le numéro d’enregistrement était fictif. Ces logements entiers se trouvent notamment au centre-ville, mais aussi dans les arrondissements du Plateau-Mont-Royal, de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve et de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension.

« On trouve ça déplorable. Il va falloir, avec le durcissement de la loi [annoncé par la ministre du Tourisme, Caroline Proulx], s’assurer qu’il y a un lien direct qui se fasse avec les numéros d’enregistrement de la CITQ », a réagi au Devoir la p.-d.g. de l’Association Hôtellerie Québec, Véronyque Tremblay. Elle faisait ainsi référence à l’engagement pris par le gouvernement Legault plus tôt ce mois-ci d’adopter un projet de loi s’attaquant aux locations illégales sur les plateformes de type Airbnb.

« On veut que les gens agissent légalement », s’enregistrent et obtiennent l’accord des municipalités où elles opèrent, insiste Mme Tremblay, qui souligne l’importance d’avoir une « saine concurrence » entre les hôtels traditionnels et les logements loués en ligne à court terme. « Si Airbnb accepte de faux numéros, on n’est pas plus avancés. »

Mme Tremblay insiste également sur l’importance « que ce soit l’ensemble des plateformes qui agissent dans le même sens et qu’elles soient imputables ».

De vrais numéros réutilisés

À Montréal, une propriétaire a, quant à elle, inscrit le numéro d’enregistrement d’un logement situé à Mont-Tremblant, dans les Laurentides, pour une annonce concernant un appartement de l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce.

Dans ce contexte, Véronyque Tremblay souligne l’importance que Revenu Québec dispose de plus d’inspecteurs pour s’assurer du respect de la Loi sur l’hébergement touristique. « Ça prend des inspecteurs, ça prend des gens qui ont le temps et le mandat d’aller sur place et de faire des vérifications », opine également le p.-d.g. de l’Association hôtelière du Grand Montréal, Jean-Sébastien Boudreault.

« C’est la sécurité des gens qui est en jeu », renchérit M. Boudreault, deux semaines après qu’un bâtiment du Vieux-Montréal où des logements étaient loués illégalement sur des plateformes de type Airbnb eut été la proie des flammes.

Joints par Le Devoir, ni Airbnb ni le ministère du Tourisme n’ont répondu à nos questions.



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