La gastronomie d’ici en plein essor, mais fragilisée par le manque de main-d’oeuvre

Selon le rapport, 44 % des restaurateurs sondés ont dû réduire leurs heures d’ouverture «en raison de la pénurie de main-d’oeuvre».
iStockphoto Selon le rapport, 44 % des restaurateurs sondés ont dû réduire leurs heures d’ouverture «en raison de la pénurie de main-d’oeuvre».

La gastronomie québécoise a le vent dans les voiles. Non seulement les restaurants d’ici sont-ils portés par une nouvelle génération dynamique de femmes et de personnes racisées, mais ils s’avèrent aussi parmi les meilleurs promoteurs de produits locaux. Sans surprise, leur vitalité demeure toutefois compromise par la pénurie de main-d’oeuvre, exacerbée depuis la pandémie.

Telles sont les conclusions d’une nouvelle étude menée par le collectif La table ronde, qui rassemble près d’une centaine d’entrepreneurs issus du milieu québécois de la gastronomie. Parmi eux, certains des plus illustres chefs de la province, dont Normand Laprise, Daniel Vézina ou encore Colombe St-Pierre. Leur Portrait statistique des restaurants gastronomiques du Québec a été dévoilé dimanche après-midi, en présence des ministres Pierre Fitzgibbon et Caroline Proulx.

« Les résultats préliminaires de l’étude que nous dévoilons aujourd’hui confirment l’importance stratégique du secteur de la gastronomie pour le développement du Québec, tant par rapport au rayonnement international de la capitale nationale et de la métropole que pour l’attractivité et le dynamisme des régions », a déclaré par voie de communiqué Félix-Antoine Joli-Coeur, secrétaire général de La table ronde.

Valoriser les aliments du Québec

 

Selon l’étude menée auprès de 65 restaurants membres de La table ronde par le cabinet IdéesFx, les deux tiers de leurs menus seraient composés d’aliments du Québec, comparativement à un tiers parmi les assiettes du grand public québécois. La table ronde rapporte également que 15 % des vins qui sont vendus chez ses membres sont québécois, par rapport à un maigre 0,35 % à la SAQ.

C’est pourquoi le collectif vante aussi la « forte présence médiatique » de ses membres, ce qui leur permet de « représenter la culture culinaire québécoise et les grands courants sociaux ». L’étude souligne donc « l’influence structurante auprès de la population » que peuvent avoir certains chefs. Elle cite en exemple Normand Laprise, propriétaire du Toqué !, qui aurait « rejoint le mouvement revendiquant un meilleur encadrement du gaspillage alimentaire ».

En outre, La table ronde estime que « la gastronomie connaît actuellement une renaissance grâce au rôle accru des jeunes, des femmes et des personnes racisées ». Dans le rapport, on apprend que 31 % des chefs en région sont des femmes, que 16 % de tout le personnel de cuisine est racisé (par rapport à 16,8 % dans la population québécoise, qualifiant les équipes de cuisine de « représentatives ») et que 55 % des propriétaires de restaurants ont ouvert un établissement au cours des cinq dernières années, la majorité d’entre eux ayant moins de 35 ans.

Tous ces éléments ont contribué à la réussite des membres de La table ronde, soutient le collectif. Ce dernier prétend injecter annuellement 40 millions de dollars dans le marché des produits fins québécois et générer des revenus touristiques de 74 millions de dollars.

Pénurie de main-d’oeuvre

C’est bien connu, la gastronomie québécoise souffre cependant d’un important manque de main-d’oeuvre qui s’aggrave avec les années, tout comme plusieurs secteurs de l’industrie touristique d’ici. Ainsi, 44 % des restaurateurs sondés ont notamment dû réduire leurs heures d’ouverture « en raison de la pénurie de main-d’oeuvre », soutient le rapport.

La table ronde somme donc le gouvernement de contribuer à « modifier » le modèle d’affaires des restaurants, « puisque les frais fixes demeurent les mêmes, malgré une diminution de la clientèle potentielle ». Le collectif plaide également pour une formation accrue des travailleurs du milieu, déplorant que 59 % du personnel de service et 54 % du personnel de cuisine soient « non formé ».

Le rassemblement de dimanche était le deuxième de l’histoire du collectif, qui a bénéficié l’an dernier d’une aide financière de Québec de 900 000 $ pour appuyer la réalisation de son projet évalué à 1,43 million de dollars sur deux ans. « Avec comme objectif de consolider l’écosystème de production et de distribution des produits fins du terroir, le projet du collectif de la gastronomie québécoise a le potentiel de faire rayonner davantage les producteurs et les produits d’ici, en plus de contribuer à la vitalité économique de tout le Québec », avait alors déclaré le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

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