Le dialogue démocratique, la «base» de la lutte contre le racisme

Le racisme sévit encore au Québec, sous diverses formes.
Photo: Jacques Nadeau archives Le Devoir Le racisme sévit encore au Québec, sous diverses formes.

Le Canada souligne mardi la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale. En entrevue au Devoir, trois expertes tracent les contours d’un débat polarisant.

Qu’on l’appelle systémique ou non, le racisme sévit encore malheureusement au Québec. En quête d’une meilleure écoute de la part du gouvernement sur cet épineux problème, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) organise mardi une conférence dans la métropole, à laquelle participera le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale par la présence de sa vice-présidente, Tina Stavrinaki.

Cet organisme supranational ne vient pas à Montréal pour faire la morale, mais plutôt pour suggérer un « standard », nuance Mme Stavrinaki. « Ce n’est pas le droit international qui vient et qui impose. Il faut mieux comprendre comment la loi internationale peut être un outil par son standard, mais on le met en œuvre au niveau national, au niveau aussi des villes. »

À ses côtés, Roda Muse, secrétaire générale de la Commission canadienne pour l’UNESCO, et Myrlande Pierre, vice-présidente de la CDPDJ, approuvent.

Le besoin est grand au Québec. À la Ville de Montréal, le processus de plaintes pour discrimination raciale conduit à un cul-de-sac a récemment révélé une enquête du Devoir. La solution passe par plusieurs chemins, indique Mme Pierre. « Ce n’est pas à travers une mesure isolée, mais à travers une multiplicité de mesures complémentaires, où chaque interlocuteur joue son rôle et se responsabilise. »

La commission qu’elle copréside le constate ; les décideurs prennent de plus en plus eux-mêmes l’initiative de demander de l’aide pour gérer les questions de diversité à la tête des institutions québécoises. « La commission des droits de la personne est de plus en plus interpellée par les institutions », confirme-t-elle.

Dans celles-ci, moins de 10 % des postes de cadres sont occupés par une personne de minorité visible, selon un récent rapport sur l’accès des minorités visibles à l’emploi dans le secteur public de la province.

Derrière ce problème se cachent cependant bien des avancées. Les municipalités du Québec mènent la charge contre le racisme, soulève Roda Muse. Une centaine de villes canadiennes forment depuis quelque temps une « coalition des municipalités inclusives », et la première à avoir signé cette désignation, c’est Montréal.

« Dialogue ouvert »

Bochra Manaï, la commissaire du Bureau de la lutte contre le racisme et les discriminations systémiques à la Ville de Montréal, participera d’ailleurs à la conférence de mardi.

Malgré la polarisation du débat, il ne faut pas perdre l’espace de « dialogue ouvert », qui inclut la représentation des groupes touchés par le racisme. Sans discussion, point de salut, clament-elles en chœur.

Le « dialogue démocratique » est la « base vers une société juste et inclusive », insiste Roda Muse.

« Cette capacité des peuples de pouvoir exprimer ce qui les dérange, ce qui les blesse, et leur capacité d’engager une discussion avec leur gouvernement, ce dialogue est là. Il se poursuit avec les plus hauts fonctionnaires dans plusieurs domaines. Ça, c’est une très bonne pratique », lance-t-elle.

« La transparence des règles, du dialogue permet à toute belle pratique d’être vraiment efficace, d’avoir des pratiques proches de la communauté. C’est la communauté qui sait le mieux », renchérit Tina Stavrinaki.

La conférence de mardi affiche complet. L’événement sera retransmis en direct sur Internet.


Une version précédente de ce texte, qui indiquait que Gatineau était la première municipalité canadienne à avoir pris la désignation de « municipalité inclusive », a été corrigée.

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