Femmes en entrepreneuriat: une lente ascension parsemée d’obstacles

Maïté Belmir
Collaboration spéciale
Selon l’indice entrepreneurial québécois du Réseau Mentorat 2021, le désir de se lancer en affaires est quasi égal chez les hommes et chez les femmes.
Illustration: Amélie Tourangeau Selon l’indice entrepreneurial québécois du Réseau Mentorat 2021, le désir de se lancer en affaires est quasi égal chez les hommes et chez les femmes.

Ce texte fait partie du cahier spécial Leadership au féminin

Le nombre de femmes entrepreneuses continue d’augmenter, mais lentement. C’est ce que révèle la Chaire BMO en diversité et gouvernance de l’Université de Montréal, dont l’objectif est de stimuler la réflexion autour des questions de diversité, d’égalité, d’inclusion et de gouvernance dans les organisations.

En 2020, les femmes représentaient près de 17 % des propriétaires majoritaires de PME au Canada, soit 1,5 % de plus qu’en 2011. Certes, les chiffres progressent, mais ils restent bas. Une tendance que le gouvernement du Canada cherche à accroître avec sa Stratégie pour les femmes en entrepreneuriat, mise en place en 2018 et visant « à améliorer l’accès des entreprises dirigées par des femmes au financement, à des bassins de personnes talentueuses, à des réseaux et à l’expertise dont elles ont besoin pour démarrer, prendre de l’expansion et accéder à de nouveaux marchés ».

Le désir d’entreprendre

« 17 %, ce n’est pas assez ! Les femmes représentent la moitié de la population », déclare Tania Saba, titulaire de la Chaire BMO en diversité et gouvernance et professeure titulaire à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal.

Ce chiffre n’est cependant pas représentatif de la réalité. « Le potentiel de développement est énorme. Les études faites à partir de l’indice entrepreneurial québécois du Réseau Mentorat montrent combien la désirabilité de se lancer en affaires est forte chez les femmes », explique Mme Saba. En effet, l’indice 2021 montre un taux d’intention quasi égal chez les hommes et chez les femmes.

En plus d’être autant attirées par l’entrepreneuriat que les hommes, les femmes représentent presque 38 % des travailleurs autonomes au Canada. « Cela veut dire que les femmes vont lancer leurs propres initiatives ou leurs propres projets professionnels, mais elles n’iront pas jusqu’à développer leur entreprise », détaille la fondatrice de la Chaire BMO.

Les femmes rencontrent des obstacles qui leur sont propres dans le processus d’entrepreneuriat et qui entretiennent cette tendance. Par exemple, elles vont plus souvent investir leur épargne personnelle dans leur projet, alors qu’un homme ira chercher du financement ailleurs, raconte Mme Saba. « Les femmes ont malheureusement intériorisé ces obstacles », déplore-t-elle.

Une des croyances qui contribuent à la lente progression du nombre de femmes entrepreneuses est celle que s’il y a plus de femmes en entrepreneuriat, il y aura moins d’hommes. « Le but n’est pas d’augmenter le nombre de femmes pour réduire le nombre d’hommes. Il faut conserver le nombre d’hommes et augmenter le nombre de femmes ! » répond Mme Saba.

Pour la chercheuse, il faut voir le développement de l’entrepreneuriat chez les femmes comme une occasion, une création de richesse, et non comme un partage de richesse. « Il est important de le voir comme une contribution à l’économie, un potentiel latent qu’il faut exploiter. »

Car les femmes se dirigent vers d’autres types d’entreprises que leurs homologues masculins, avec des projets qui auront un effet sur la communauté, et elles ont une approche parfois plus sociale, notamment dans le développement durable, où les entrepreneuses sont en quelque sorte précurseures. « Ces initiatives ont un impact énorme, mais qui n’est pas forcément quantifié à sa juste valeur par les indicateurs utilisés dans notre société. »

Les femmes et la diversité

Mais les obstacles sont encore plus grands pour les personnes racisées, qui accèdent plus difficilement aux réseaux qui leur permettront de créer leur entreprise. C’est d’ailleurs pour cette raison que la Chaire BMO organise des événements destinés aux femmes qui font face à ces réalités.

Le Pôle Québec et communautés francophones du Canada du Portail de connaissances pour les femmes en entrepreneuriat, la Chaire BMO et le vice-rectorat aux partenariats communautaires et internationaux de l’UdeM ont notamment organisé, en février dernier, le Forum des femmes entrepreneures autochtones francophones au Campus MIL de l’Université de Montréal. « L’événement a rapidement été complet, raconte Tania Saba, d’une voix souriante. Ça a été un très bel événement. » Organisée autour de plusieurs panels, la journée avait pour but de partager les expériences des entrepreneuses autochtones et de présenter l’écosystème et les outils qui le composent.

Le Portail de connaissances pour les femmes en entrepreneuriat cherche à mettre de l’avant toutes les femmes qui ont réussi, quel que soit leur secteur d’activité. Les données qui y sont collectées permettent de concevoir un portrait plus précis du marché, des occasions et, surtout, des freins que rencontrent les entrepreneuses. Ce sont des éléments essentiels pour orienter les efforts et continuer à favoriser l’entrepreneuriat chez les femmes.

Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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