Un système professionnel à rénover
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Métiers, professions et carrières
Le Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ) réclame un grand chantier de modernisation de nos lois professionnelles et du système qui les régit. Le cadre actuel empêcherait de nombreux ordres professionnels de répondre aux défis de notre époque.
Le Code des professions fête ses 50 ans cette année et les lois qui régissent certaines professions remontent à plus loin encore. Cela limite, selon le CIQ, la capacité des ordres professionnels à affronter de manière efficace des défis comme le virage numérique et la pénurie de main-d’oeuvre.
« Les professions ont beaucoup évolué depuis 1973 et elles sont aussi devenues plus nombreuses, rappelle la présidente du CIQ, Danielle Boué. Mais la structure d’encadrement, elle, reste la même depuis 50 ans. Il n’y a pas eu les changements nécessaires pour s’assurer que le système conserve son agilité du début. »
Le Québec compte actuellement 46 ordres professionnels, qui rassemblent plus de 415 000 membres exerçant 55 professions. Ce secteur représente tout de même 10 % de la population active et il génère environ 6 % du PIB québécois, soit à peu près l’équivalent des secteurs de la construction et du commerce de détail.
Cure de jeunesse
« Nous voulons à la fois une modernisation des professions et une actualisation du système professionnel lui-même », précise Danielle Boué. Certaines lois sont effectivement très anciennes. Celle qui encadre les chiropraticiens date de 1973 et celle qui régit les chimistes professionnels n’a pas été mise à jour depuis 1964, pour ne citer que ces deux exemples.
La vétusté de ces lois compliquerait la capacité des professionnels à répondre à des défis posés par l’évolution des technologies — marquée notamment par la montée de l’intelligence artificielle —, les changements climatiques, la pénurie de main-d’oeuvre ou encore le vieillissement de la population.
Certes, le gouvernement a révisé certaines lois au fil du temps, mais toujours de manière très restreinte. Par exemple, en 2002, il a modernisé certaines lois qui encadrent 11 professions en santé, avant de récidiver 10 ans plus tard avec une loi visant une dizaine de professions en santé mentale et en relations humaines. Plusieurs autres ordres professionnels attendent toujours leur tour.
Le CIQ souhaite aussi une refonte du système professionnel lui-même. Il réclame une réforme de l’Office des professions du Québec, dont le rôle consiste à s’assurer que chaque ordre protège bien le public. C’est notamment l’Office qui conseille le gouvernement sur les orientations visant à améliorer le système professionnel et à adapter son encadrement juridique. Or, le CIQ le juge paralysé par des structures et des processus trop lourds, qui freinent les efforts d’innovation des ordres.
Selon le Conseil, l’Office devrait donc être transformé en ministère du système professionnel et le gouvernement devrait nommer un ministre délégué chargé de la modernisation des lois professionnelles. Le Conseil estime qu’un ministre serait plus comptable que l’Office et aurait plus d’influence sur le gouvernement, puisqu’il siégerait au Conseil des ministres. Il pourrait ainsi porter plus efficacement le projet de modernisation.
Le CIQ propose aussi la création d’un secrétariat à la modernisation des lois professionnelles, qui fournirait une trajectoire législative simple, structurée, prévisible et indépendante, et qui aurait l’expertise pour suggérer des changements législatifs et réglementaires.
Avancer par étapes
Le CIQ a échangé en janvier avec la ministre Sonia LeBel, qui a la responsabilité de l’application du Code des professions et des lois constituant les ordres professionnels. Une « très belle rencontre », selon Danielle Boué, qui admet que le CIQ ne s’attend pas à ce que tout le système soit transformé en un temps record.
« Nous devons d’abord déterminer les éléments les plus importants, qui doivent être modernisés le plus rapidement possible, en se concentrant sur les professions qui en ont le plus besoin », précise-t-elle. Des consultations récentes du CIQ indiquent que près des deux tiers des ordres professionnels souhaitent des changements à leur loi ou à leur champ d’exercice (ou les deux).
Le Conseil s’attend à tout le moins à ce qu’une démarche de réforme soit mise en branle, afin que toutes les parties prenantes (ordres professionnels, gouvernement, CIQ, notamment) puissent commencer le travail. Danielle Boué se dit consciente que ce sera long et qu’il n’y a pas de remède miracle. Mais elle souligne que les ordres répondent toujours présents lorsque l’État le demande.
« Ce fut le cas notamment dans la campagne de vaccination contre la COVID-19, à laquelle plusieurs professionnels de divers ordres ont contribué, rappelle-t-elle. Nous souhaitons poursuivre cet élan de collaboration entre les ordres et avec le gouvernement pour réussir ce grand chantier de modernisation. »
Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.