Reconnaître l’apport essentiel du secteur public
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial 33e congrès de la FTQ
Dans le secteur public, les négociations des conventions collectives sont entamées et les demandes syndicales déposées en octobre ont reçu une première proposition du gouvernement le 15 décembre dernier. Ces négociations concernent 420 000 travailleurs et travailleuses représentés par la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) et l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS).
Dans le secteur public, la FTQ représente notamment les employés de soutien, ceux du secteur administratif, ainsi que les préposés aux bénéficiaires, soit plus de 55 000 travailleurs et travailleuses dans les réseaux de la santé et de l’éducation.
Les demandes déposées le 28 octobre par le Front commun concernent en premier lieu les salaires.
« Avec la poussée de l’inflation que nous avons connue en 2022, les augmentations de salaire prévues aux conventions collectives du secteur public, qui sont de l’ordre de 2 %, ne sont vraiment pas suffisantes, soutient Daniel Boyer, président de la FTQ. Notre premier objectif est le maintien du pouvoir d’achat. On a introduit dans nos demandes une clause d’indexation des salaires pour chacune des trois années de la convention collective, équivalente à l’augmentation de l’indice des prix à la consommation. Il y a aussi une clause visant l’enrichissement, qui est de plus 2 %, de plus 3 % et de plus 4 % aux années 1, 2 et 3 de la convention, dans le but de rattraper le retard que les salariés de nos services publics en santé et en éducation subissent depuis fort longtemps par rapport aux autres travailleurs québécois. »
Pour la première année de la convention, le syndicat fait un « clin d’oeil » au Front commun des syndicats de 1972 en demandant que la formule la plus avantageuse soit accordée aux syndiqués, entre une augmentation de 2 % et le montant de 100 $ par semaine. En effet, il y a cinquante ans, le Front commun menait une bataille pour que le salaire soit de 100 $ par semaine.
« Il y a un problème d’attractivité et de rétention dans tous les secteurs d’emploi au Québec, et c’est aussi le cas dans le secteur public, ajoute Daniel Boyer. Si on veut attirer et retenir les gens, il faut bien les payer. »
Exercice d’emploi
Le deuxième volet important des négociations concerne les conditions d’exercice d’emploi.
« On le constatait déjà avant la pandémie, nos réseaux ont besoin d’air. Nos travailleurs et travailleuses ont besoin d’une vraie réorganisation du travail, qui ne reposera pas uniquement sur leurs épaules et qui va faire en sorte que l’on va reconnaître davantage leur travail dans les réseaux de la santé et de l’éducation, où travaillent 80 % de femmes. Elles ont tenu ces réseaux à bout de bras durant la pandémie et elles le font depuis fort longtemps. Si nos grands réseaux nous tiennent à coeur, il faut travailler sur les conditions d’emploi, ce n’est pas juste une question de salaire. »
Mythes et réalité
Aux yeux de la population, les employés du secteur public sont encore perçus comme privilégiés comparativement à l’ensemble des travailleurs. Or, c’est un mythe, explique Daniel Boyer.
« Chaque année, l’Institut de la statistique du Québec fait paraître un rapport et, depuis au moins dix ans, on constate un retard accumulé pour les employés du secteur public, dit le président. On parle d’un retard de 3,9 % qui inclut la rémunération globale, qui tient compte de tous les avantages, tels que les vacances et les assurances collectives. Quand on nous impose des conventions collectives avec un gel salarial, comme ce fut le cas en 2005, l’écart se creuse, et les augmentations de salaire ont souvent été moindres que celles des autres secteurs d’activité au Québec. Il faut se demander quelle sorte de services publics on veut. On voit dans quel état ils sont au moment où l’on se parle. Les années d’austérité où nous n’avons pas investi, ni dans nos infrastructures ni dans le personnel de nos réseaux, ont occasionné des retards. »
Le 15 décembre, le gouvernement a déposé ses offres : une hausse salariale de 9 % sur cinq ans, dont 3 % la première année, à laquelle s’ajoutent un montant forfaitaire de 1000 $ ainsi qu’une augmentation de 2,5 % sur cinq ans pour les « priorités » gouvernementales, comme les équipes de soin de santé et le soutien dans les classes.
Le Front commun a qualifié ces offres de « faméliques » et ajouté qu’elles provoquaient un appauvrissement des travailleurs et travailleuses, puisqu’elles sont inférieures à l’inflation prévue de 6,8 % pour 2022 seulement.
« [Le gouvernement] fait fi de l’inflation stratosphérique actuelle en ne présentant aucune mesure permettant une protection du pouvoir d’achat. Quant au montant forfaitaire proposé de 1000 $, il est insultant pour les femmes et les hommes qui tiennent à bout de bras les services publics, puisque cette somme n’est versée qu’une seule fois et qu’elle n’est pas calculée lorsque vient le temps de comptabiliser les revenus de retraite et les vacances », a fait savoir le Front commun par voie de communiqué.
50e anniversaire du Front commun
En 1972, trois grands syndicats (FTQ, CSN, CEQ — Centrale des enseignants du Québec, qui deviendra la CSQ) s’unissent pour négocier leurs conditions de travail avec le gouvernement de Robert Bourassa. Au coeur de leurs grandes revendications, ils réclament un salaire de 100 $ par semaine. Le 11 avril, une grève générale illimitée est déclenchée. Dix jours plus tard, une loi spéciale décrète le retour forcé au travail et les trois chefs syndicaux (Louis Laberge, Marcel Pepin et Yvon Charbonneau) sont emprisonnés, ce qui aura pour effet de galvaniser les militants et de relancer de plus belle les actions syndicales.
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