Le fédéral entend protéger le papillon monarque

Le papillon monarque est «en voie de disparition», selon les experts du gouvernement fédéral.
Photo: Alexandre Shields Le Devoir Le papillon monarque est «en voie de disparition», selon les experts du gouvernement fédéral.

Le gouvernement Trudeau compte se porter au secours du papillon monarque. Les scientifiques fédéraux évaluent que cette espèce est carrément en voie de disparition, et Ottawa souhaite utiliser la Loi sur les espèces en péril afin de mieux protéger les habitats jugés essentiels à sa survie, notamment au Québec, a appris Le Devoir.

Au moment où Montréal s’apprête à accueillir la conférence de l’ONU sur la biodiversité (COP15), le fédéral vient de publier dans la Gazette du Canada un « avis d’intention » annonçant une consultation publique de 45 jours qui doit mener au classement du papillon monarque comme espèce « en voie de disparition » selon la loi.

Les libéraux se rangent ainsi finalement à l’avis du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, qui avait recommandé dès 2016 que le lépidoptère reçoive cette désignation, le statut le plus sévère prévu par la Loi sur les espèces en péril avant celui d’espèce « disparue » au pays.

Protéger l’habitat

Selon des informations obtenues par Le Devoir auprès de sources bien au fait du dossier, le gouvernement fédéral a l’intention d’utiliser le nouveau classement du monarque afin de mieux protéger les lieux qu’il fréquente. Le statut qui lui sera accordé impliquera en effet l’élaboration d’un plan de rétablissement et la désignation de l’« habitat essentiel » pour assurer sa survie au pays.

Plusieurs habitats pourraient être désignés au Québec, dont possiblement le « Champ des monarques », un terrain appartenant à Aéroports de Montréal et situé tout près de l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau. L’organisme Technoparc Oiseaux milite d’ailleurs depuis plusieurs années pour la protection du secteur, qui a fait l’objet de coupes ayant fauché de nombreux plants d’asclépiades l’été dernier.

Une source gouvernementale a par ailleurs souligné que le fédéral entend mieux protéger les milieux naturels importants pour les espèces en péril, et que la préservation du monarque s’inscrit dans cette volonté. En entrevue à La Presse canadienne, le ministre canadien de l’Environnement, Steven Guilbeault, a récemment averti les municipalités et les provinces qu’il n’y aura plus de tolérance en matière de destruction des habitats abritant des espèces menacées.

Nécessaire collaboration internationale

 

Aux yeux du directeur général de la Société pour la nature et les parcs du Québec, Alain Branchaud, la protection du papillon monarque est évidemment une bonne décision. Il invite toutefois le fédéral à bien identifier les habitats importants de l’insecte et, surtout, à collaborer avec les autorités américaines et mexicaines afin d’assurer sa survie.

Le cycle de vie complexe du papillon signifie que les efforts de protection doivent dépasser les frontières canadiennes en s’étendant aux États-Unis et au Mexique.

Les papillons adultes qui passent l’hiver au Mexique se reproduisent au printemps suivant, et les femelles pondent ensuite sur une espèce de plante précise, l’asclépiade. Les monarques migrent ensuite vers le nord pour arriver au Québec en juin, où ils se reproduisent aussi. Plusieurs générations de monarques peuvent se succéder avant que ces papillons atteignent nos régions.

L’insecte fait donc face à de multiples menaces, dont les impacts des dérèglements du climat. Les chenilles de monarques sont d’ailleurs particulièrement vulnérables aux destructions d’habitats, puisqu’elles se nourrissent uniquement d’asclépiade.

Les populations de monarques se sont effondrées au cours des dernières années en Amérique du Nord. La population de l’Est (qui migre notamment jusqu’au Québec) est passée de 384 millions de papillons en 1996 à environ 60 millions aujourd’hui ; il s’agit d’une chute de 85 %. La situation de la population dite « de l’Ouest » est encore pire : elle est passée de 1,2 million de papillons en 1997 à moins de 30 000 aujourd’hui



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