Une Chaire franco-québécoise sur la liberté d’expression est créée

Le gouvernement du Québec investit deux millions de dollars dans la création d’une chaire de recherche franco-québécoise sur la liberté d’expression. Cette chaire est créée conjointement par les Fonds de recherche du Québec (FRQ) et le Centre national de recherche scientifique (CNRS) français. Les travaux de la chaire porteront sur la démocratie et les droits fondamentaux, sur les croyances religieuses et les identités, ainsi que sur la création et la censure.
Cette semaine, les FRQ ont annoncé les noms des quatre cotitulaires québécois de la chaire. Il s’agit de Solange Lefebvre, de l’Université de Montréal, de Pierre Rainville, de l’Université Laval, de Mathilde Barraband, de l’Université du Québec à Trois-Rivières, et de Maryse Potvin, de l’Université du Québec à Montréal. Du côté français, les cotitulaires de la chaire nommés par le CNRS sont Thomas Hochmann, de l’Université Paris Nanterre, Karimi Hanane, de l’Université de Strasbourg, Thibaud Boncourt, de l’Université Panthéon Sorbonne, et Anna Arzoumanov, de Sorbonne Université.
La création de cette chaire survient alors que la liberté d’expression demeure un sujet brûlant d’actualité. On l’a vu au Québec récemment, autant sur le plan de la liberté d’expression des professeurs d’université que lors du débat entourant l’adoption de la loi 21 sur la laïcité ou celui de l’appropriation culturelle et de la liberté sur les réseaux sociaux.
« Je pense que la liberté d’expression est effectivement un sujet qui concerne la vie universitaire, dit Louise Poissant, directrice scientifique du FRQ Société-Culture. Dans beaucoup d’universités, et cela a été hautement médiatisé, les professeurs avaient l’impression de ne pas pouvoir utiliser certains mots, de ne pas pouvoir faire référence à certains textes. Ils devaient se censurer ou bien prendre beaucoup de précautions et, parfois, éliminer des choses de leur cours. Il y a des problèmes vraiment un peu partout, même dans des pays où c’est un principe reconnu et inscrit dans la loi. » En France, un professeur de lycée, Samuel Paty, a été décapité en octobre 2020 après avoir montré à ses élèves des caricatures de Mahomet. Ainsi, le débat sur la liberté d’expression touche les champs social, légal, pédagogique et artistique. On parle, donc, pour la chaire, de porter un regard « scientifique interdisciplinaire » sur ces enjeux.
« Plusieurs aspects de la liberté d’expression questionnent le politique, qui doit faire des lois, poursuit Mme Poissant. C’est la même chose avec les médias sociaux. C’est très complexe. Est-ce qu’on peut dire n’importe quoi sur les médias sociaux ? »
Un comité bilatéral France Québec aura pour mission de « bien cerner les grandes problématiques qui devraient être développées » par la chaire. Celle-ci pourrait d’ailleurs être invitée à faire des recommandations aux gouvernements en matière de législation.
La création de la chaire est le fruit d’une entente entre le premier ministre du Québec, François Legault, et celui de la France, Jean Castex, qui était à ce poste jusqu’en mai 2022. Il a été remplacé depuis par Élisabeth Borne. La rencontre entre premiers ministres a été retardée plusieurs fois, notamment en raison d’élections survenant de part et d’autre de l’Atlantique. On en prévoit présentement une en février.