La juge Rondeau veut faire invalider un article de la Charte de la langue française

L’article 12 de la Charte de la langue française serait inconstitutionnel, selon la requête déposée par la juge en chef de la Cour du Québec.
Photo: Getty Images iStockphoto L’article 12 de la Charte de la langue française serait inconstitutionnel, selon la requête déposée par la juge en chef de la Cour du Québec.

Un nouveau chapitre s’ajoute à la saga opposant le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, et la juge en chef de la Cour du Québec, Lucie Rondeau. Cette dernière a déposé une poursuite civile afin d’invalider l’article de la Charte de la langue française qui empêche d’exiger systématiquement le bilinguisme auprès des candidats à la magistrature.

L’article 12 de la Charte de la langue française serait inconstitutionnel, selon la requête déposée le 9 août dernier, au Palais de justice de Montréal.

« Il contrevient aux principes de l’indépendance judiciaire en autorisant, d’une part, l’ingérence du ministre dans l’administration de la Cour et d’autre part, en soumettant la gestion de celle-ci à sa propre évaluation », peut-on lire dans le document.

La juge Rondeau soutient aussi que l’article est inconstitutionnel, car « il enfreint l’accès à la justice ». Dans certaines régions où l’anglais est fréquemment utilisé, un juge qui ne maîtrise pas cette langue « pourrait très difficilement se voir confier plusieurs types de dossiers […] pourtant essentiels au fonctionnement de la Cour du Québec », écrit-elle.

Ce magistrat serait « la source, bien malgré lui, de délais, remises et problématiques de gestion affectant directement les justiciables », lit-on dans le document.

Questionné au sujet de la poursuite déposée, le cabinet du ministre Simon Jolin-Barrette a rétorqué que le fait de ne pas maîtriser l’anglais « ne devrait pas constituer d’office une barrière pour devenir juge au Québec ». De plus, l’adoption du projet de loi 96 reflète « la volonté des Québécois d’assurer l’accès à une justice en français au Québec », écrit-on.

Un bras de fer qui se poursuit

 

Dans sa requête, Lucie Rondeau estime que Simon Jolin-Barrette, aussi ministre de la Langue française, essaie de contourner la décision rendue en février dernier par le juge Christian Immer de la Cour supérieure du Québec.

Le magistrat Immer avait affirmé que la demanderesse, la juge Rondeau, pouvait bel et bien exiger le bilinguisme dans le processus de nomination des juges, sans consulter le ministre de la Justice. Ce dernier « ne jouit d’aucun pouvoir quant à la rédaction des avis de sélection des candidats à la fonction de juge à la Cour du Québec », avait-il écrit.

Simon Jolin-Barrette n’avait toutefois pas porté en appel cette décision. Il avait plutôt choisi d’amender l’ancien projet de loi 96, devenu la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, afin d’interdire à la Cour du Québec d’exiger systématiquement le bilinguisme auprès des futurs juges.

Avec Jean-Louis Bordeleau

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