Des aires de jeux nouveau genre pour enfants

Les parents le savent : trouver des activités pour les petits pendant la belle saison sans dépenser une fortune n’est pas toujours simple. Heureusement, il y a les aires de jeux dans les parcs, capables d’occuper pendant des heures la progéniture remuante. Mais comme dans tout autre domaine, il existe des tendances, s’éloignant ici des simples balançoires et des glissoires classiques. Incursion dans cet univers du jeu et de la découverte tout près de chez vous.

Depuis vendredi dernier, un nouveau parc pour enfants est accessible dans Le Plateau-Mont-Royal. Le parc des Compagnons-de-Saint-Laurent a été complètement réaménagé. Un ancien stationnement a fait place à une aire de jeux pour les 2 à 12 ans. Une maisonnette accueille les petits, et des billots de bois d’aspect naturel invitent les plus grands à grimper.

Les aménagements ressemblent à une piste d’hébertisme, reconnaît Marie-Ève Parent, architecte paysagiste chez Lemay, la firme à qui l’arrondissement de Plateau a confié le réaménagement du parc. « Ce sont des jeux qui s’intègrent mieux à l’environnement et qui sont moins directifs pour l’enfant. Celui-ci est libre d’escalader ce module par où il veut », dit-elle. Le site comprend également des jeux d’eau et une zone d’entraînement que les adultes peuvent utiliser.

Photo: Adil Boukind Le Devoir Dans l’aménagement de terrains de jeu, la sécurité arrive bien sûr au premier rang des préoccupations. 

Les parents croisés sur place mercredi disaient apprécier le nouveau terrain de jeu. « C’est joli et c’est différent des autres parcs », a indiqué Fanny, venue avec ses deux filles. Une autre mère soulignait cependant que sa plus jeune s’était vite lassée des équipements pour les 2-5 ans.

Non loin de là, le pôle famille au parc La Fontaine prend forme. Le chantier n’est pas terminé et le site est clôturé, mais les modules de jeux sont déjà installés, avec une glissoire tubulaire et un parcours de câbles.

Des jeux plus sécuritaires

 

Les structures en bois, comme celles du parc des Compagnons-de-Saint-Laurent, gagnent en popularité depuis quelques années en raison de leurs qualités esthétiques et de leur capacité à s’harmoniser au paysage, mais elles comportent certains inconvénients, selon Michèle Dupuis, directrice de projets chez ABC Récréation, une entreprise spécialisée de Laval. « C’est super beau, mais il y a de l’entretien à faire. Comme on ne peut pas utiliser de bois traité, ça amène à un autre niveau de défi pour l’entretien », explique-t-elle en évoquant les possibilités d’échardes. « Les villes n’ont pas toujours le temps et l’argent pour les entretenir. » C’est pourquoi les structures en plastique, en aluminium ou en acier sont souvent privilégiées.

Dans l’aménagement de terrains de jeu, la sécurité arrive bien sûr au premier rang des préoccupations. Au cours du dernier siècle, les terrains de jeu ont bien changé. L’ère des tourniquets en acier des années 1970, des balançoires « tape-cul » et autres engins favorisant les commotions cérébrales est maintenant révolue. Aujourd’hui, les modules colorés, pensés en fonction de la sécurité et moins dangereux, ont pris le relais.

Photo: Adil Boukind Le Devoir Structure en bois pour hébertisme dans le parc des Compagnons-de-Saint-Laurent, dans le Plateau-Mont-Royal.

Dans huit cas sur dix, les blessures surviennent lors d’une chute au sol plutôt que dans les modules eux-mêmes. De là l’importance de s’assurer de la bonne capacité d’absorption des surfaces de jeu. « Les bras cassés, ça va toujours arriver, mais les traumatismes crâniens et les blessures permanentes, c’est ça qu’on essaie d’empêcher quand on met une surface en dessous d’un jeu », souligne Mme Dupuis.

Quels modules choisir ? Des structures pour se suspendre ou sauter, mais aussi des jeux qui tiennent compte d’autres aspects du développement de l’enfant. « On s’assure qu’il y a quelque chose pour chaque sous-groupe d’âge. […] On y va avec des défis faciles, modérés à experts. On va aussi s’assurer du développement cognitif avec des panneaux de jeux et des jeux interactifs », indique Marie-France Tessier, p.-d.g. de Tessier Récréo-Parc.

Elle fait valoir que les adolescents ne devraient pas être oubliés. « C’est important de leur faire une place pour qu’ils puissent s’amuser et “chiller” », dit-elle, tout en reconnaissant que les villes ne permettent pas toutes de réaliser des espaces pour ados.

Les bras cassés, ça va toujours arriver, mais les traumatismes crâniens et les blessures permanentes, c’est ça qu’on essaie d’empêcher quand on met une surface en dessous d’un jeu

La grande majorité des clients d’ABC Récréation et de Tessier Récréo-Parc sont des municipalités. « Les villes recherchent l’originalité, quelque chose qui est différent », avance Michèle Dupuis. « Si j’ai deux parcs dans un rayon d’un ou deux kilomètres, on essaie que ce soit différent, parce que les familles partent à vélo la fin de semaine et font la tournée des parcs. »

Accessibilité universelle

 

De plus en plus d’aires de jeux pour enfants sont accessibles universellement, mais les progrès sont lents. « Tous les parcs devraient être inclusifs, soutient Michèle Dupuis. On est en retard là-dessus. Je tape sur le clou depuis plus de 10 ans. »

Marie-France Tessier abonde dans le même sens et reconnaît qu’il y a encore beaucoup de sensibilisation à faire, mais elle dit voir davantage d’appels d’offres prévoyant une accessibilité universelle et des budgets plus importants pour y parvenir.

À cet égard, les revêtements lisses tels que le caoutchouc sont à privilégier pour que les enfants à mobilité réduite puissent accéder aux modules. Certains paillis peuvent aussi convenir pour de courtes distances, mais le sable est à proscrire, d’autant qu’en plus d’empêcher les déplacements en fauteuil roulant ou en marchette, il peut attirer les chats qui y voient une litière géante.

Photo: Adil Boukind Le Devoir Les revêtements lisses tels que le caoutchouc sont à privilégier pour que les enfants à mobilité réduite puissent accéder aux modules. C’est le matériau choisi pour la nouvelle aire de jeux du parc Julie-Hamelin, dans le quartier Saint-Michel.

Reste que dans certains cas, les villes planifient des aires de jeux accessibles, mais omettent les aménagements adéquats aux abords du site en conservant, par exemple, un escalier à franchir pour atteindre les lieux.

La techno s’invite dans les parcs

Les technologies commencent aussi à investir les parcs pour enfants. En 2020, la municipalité de Salaberry-de-Valleyfield a installé au parc Lionel-Groulx une arche dotée d’un jeu électronique interactif destiné à faire bouger les jeunes. « Ce qui est intéressant avec les jeux électroniques, c’est que le choix est infini », souligne Marie-France Tessier, dont l’entreprise a piloté le projet. Elle assure que ce genre d’équipements peut résister aux conditions hivernales.

Ces équipements sont encore rares, mais pourraient se multiplier au cours des prochaines années, prédit-elle. Comme quoi, même les terrains de jeu s’adaptent à l’ère technologique.

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