Le CRTC demande des explications à Rogers

Le président du CRTC, Ian Scott, a déclaré dans un communiqué que la requête était la première étape que l’agence prenait pour améliorer la résilience du réseau.
Photo: aron Vincent Elkaim La Presse canadienne

Le président du CRTC, Ian Scott, a déclaré dans un communiqué que la requête était la première étape que l’agence prenait pour améliorer la résilience du réseau.

L’organisme de surveillance des télécommunications au Canada ordonne à Rogers de lui expliquer en détail les tenants et aboutissants de la panne généralisée qui a touché des millions de personnes la semaine dernière tout en compliquant l’accès aux services d’urgence et aux transactions bancaires.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a déclaré mardi avoir demandé à Rogers de répondre d’ici le 22 juillet aux questions qui ont été envoyées à l’entreprise, notamment sur le « pourquoi » et le « comment » de la panne, et de lui détailler les mesures mises en place pour éviter qu’une telle situation se reproduise.

Le président du CRTC, Ian Scott, a déclaré par communiqué qu’il s’agissait de la première étape que l’agence fédérale prendra pour améliorer la résilience du réseau cellulaire canadien. « Des événements de cette ampleur, qui paralysent des parties de l’économie de notre pays et mettent en péril la sécurité des Canadiens et Canadiennes, sont tout simplement inacceptables. »

Cette demande intervient un jour après que le ministre fédéral de l’Industrie, François-Philippe Champagne, eut annoncé que le CRTC enquêterait sur la panne. Il a rencontré lundi le chef de la direction de Rogers, Tony Staffieri, et les dirigeants de plusieurs autres fournisseurs du domaine des télécommunications.

Lors de cette réunion, M. Champagne a demandé aux entreprises de lui soumettre un plan de crise qui comprend entre autres des accords sur l’itinérance d’urgence, un cadre « d’assistance mutuelle » pendant les pannes et un protocole de communication pour « mieux informer le public et les autorités ».

Quelques inquiétudes

 

Cette exigence pose toutefois le risque que le réseau d’un concurrent soit débordé et que le service soit finalement dégradé, craint un ancien dirigeant des télécommunications.

L’ancien chef des finances de Telus Robert McFarlane a déclaré que bien que concevoir une stratégie pour s’assurer que les téléphones de tout le monde peuvent fonctionner sur d’autres réseaux en cas de panne de service soit « extrêmement logique », les fournisseurs devront être très réfléchis dans leur approche.

Des questions épineuses pourraient émerger, à savoir si un fournisseur devrait ou non favoriser ses propres clients par rapport à ceux qui utilisent ce fournisseur comme remplaçant en situation d’urgence, a-t-il expliqué.

M. McFarlane a également déclaré que si Québecor réussissait à acquérir Freedom Mobile, l’opérateur sans fil appartenant à Shaw, l’entreprise établie à Montréal pourrait accroître sa présence nationale et renforcer ses activités, ce qui ouvrirait la porte à ce que Rogers et Québecor deviennent un réseau de secours l’un pour l’autre.

La date limite pour que Rogers, Shaw et Québecor parviennent à un accord définitif sur la vente de Freedom est le 15 juillet.

Donner plus de pouvoir aux consommateurs

 

Dwayne Winseck, professeur à l’Université Carleton, croit pour sa part que les consommateurs pourraient avoir plus de pouvoir dans les situations d’urgence s’ils avaient la possibilité de passer temporairement à un autre réseau par eux-mêmes. Il estime que le service d’opérateur de réseau virtuel mobile de Google aux États-Unis, Google Fi, qui permet aux gens de changer d’opérateur à l’aide d’une application Web, pourrait valoir la peine d’être reproduit ici au Canada.

« Pour les situations d’urgence, le gouvernement et le CRTC pourraient imposer des frais d’itinérance quotidiens pour les abonnés qui ont sauté sur un autre réseau », a-t-il déclaré.

Le fédéral donne aux entreprises de télécommunications qui ont participé à la réunion de lundi environ deux mois pour élaborer un plan de résilience du réseau clair. Si les fournisseurs ne sont pas en mesure d’en établir un dans ce délai, le professeur pense qu’il existe certains leviers qu’Ottawa pourrait actionner. « Il peut adopter un décret en vertu de l’article 8 de la Loi sur les télécommunications. Il peut également imposer de telles obligations comme conditions de licence lors du prochain cycle d’enchères du spectre », a-t-il suggéré.

Le ministre de l’Industrie pourrait également tenir compte de l’absence d’un plan de résilience complet dans son examen en cours de l’offre d’achat de 26 milliards de dollars déposée par Rogers pour acheter Shaw et, ce faisant, « faire pencher la balance en opposition à l’accord », ajoute le professeur Winseck.

À voir en vidéo