La planification des chantiers laisse à désirer à Montréal, selon la VG

Si les Montréalais ont l’impression que leur ville se transforme chaque année en dédales de chantiers qui rendent les déplacements compliqués, ils n’ont pas tout à fait tort. Dans son rapport annuel déposé lundi, la vérificatrice générale (VG) de la Ville de Montréal, Michèle Galipeau, relève de nombreuses lacunes dans la planification des travaux dans la métropole.
Deux divisions du Service des infrastructures du réseau routier (SIRR) de la Ville travaillent à coordonner les travaux et à prévenir les entraves trop importantes à la fluidité de la circulation. Mais, comme l’a constaté la VG, il y a du sable dans l’engrenage.
La division Assistance à la gestion des interventions dans la rue (AGIR) doit notamment établir le calendrier des chantiers. L’équipe de coordination opérationnelle (COP) doit pour sa part coordonner les entraves potentielles et proposer des mesures d’atténuation de manière à prévoir un séquençage des chantiers.
La vérificatrice générale a donc voulu savoir si les méthodes utilisées par la Ville étaient efficaces. Pour ce faire, elle a porté une attention particulière aux travaux effectués entre le 1er janvier 2019 et le 30 septembre 2021, en s’attardant à quatre arrondissements, soit Ville-Marie, Rosemont–La Petite-Patrie, Le Sud-Ouest et Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce.
Michèle Galipeau a cependant constaté que les échanges d’informations entre les deux divisions de la Ville ne sont pas toujours très fluides. Même les arrondissements audités ne partagent pas leur planification des travaux avec AGIR, bien qu’ils inscrivent leurs chantiers à venir dans un répertoire de travaux auquel AGIR a accès. De plus, AGIR n’est pas informée des chantiers réalisés par des promoteurs privés et en connaît l’existence seulement après l’octroi d’un permis d’occupation temporaire du domaine public.
Et comme si ce n’était pas suffisant, AGIR n’est pas alertée de certains chantiers pilotés par la ville-centre, comme ce fut le cas en 2021 pour le complexe aquatique de Rosemont — pourtant annoncé en 2019 —, qui a nécessité la fermeture complète d’un tronçon de la rue Bellechasse.
Michèle Galipeau conclut que toutes ces lacunes ne permettent pas à la Ville d’avoir une vue d’ensemble de ses chantiers qui sont susceptibles d’avoir un effet sur la circulation automobile. Elle recommande notamment au SIRR de mettre en place un mécanisme qui lui permettrait de recenser tous les chantiers et de se doter d’indicateurs de performance.
L’entretien des arbres
Un chapitre du rapport est consacré à l’application de la Politique de l’arbre, adoptée par la Ville en 2005. La VG y décrit le fossé qui persiste entre les objectifs d’entretien de la canopée et le travail réalisé sur le terrain. Les pratiques d’entretien des arbres sont disparates à travers le territoire et compromettent l’espérance de vie de ceux-ci, indique-t-elle.
Entre 2012 et 2020, Montréal aurait planté quelque 100 000 arbres, mais en raison des ravages de l’agrile du frêne et de l’abattage d’arbres effectué au fil des ans, la métropole compterait plutôt 30 146 arbres de plus sur son territoire.
Huit arrondissements ont fait partie de l’audit mené par la VG. La plupart d’entre eux ont un inventaire de leurs arbres publics, mais le suivi de l’état des arbres est jugé incomplet. Seul l’arrondissement de Saint-Laurent a des données à jour à ce sujet, souligne le rapport. À l’exception de cet arrondissement et de celui de Rosemont–La Petite-Patrie, les interventions menées par les équipes locales sur le terrain ne sont pas documentées de façon satisfaisante, estime Michèle Galipeau.
La VG signale d’ailleurs qu’entre 2017 et 2021, la Ville a dû débourser près de 2,2 millions de dollars à la suite de réclamations faites par des citoyens en lien avec la chute d’arbres.
La mortalité des arbres est aussi peu documentée. La Ville ne dispose pas d’une plateforme informatique unique pour l’inventaire des arbres publics ni de guide de gestion destiné aux arrondissements, comme le prévoyait la Politique de 2005. Les interventions effectuées en matière d’entretien sont davantage axées sur la réaction que sur la prévention, et l’arrosage des jeunes arbres est généralement limité à moins de quatre ans.
« En somme, contrairement aux attentes de la Politique, les données disponibles sur les arbres publics au sein des arrondissements sont incomplètes, non mises à jour, voire inexistantes. Ainsi, la Ville n’a pas connaissance de la composition et de l’état des arbres publics, ce qui est un obstacle à une gestion globale de la forêt urbaine de la Ville », affirme Michèle Galipeau.
Ce constat incite la VG à formuler une série de recommandations pour l’implantation de programmes d’entretien destinés aux arrondissements et l’attribution de budgets propres à ces activités.
Aide aux entreprises
La VG s’est aussi intéressée à la gestion du programme d’aide aux entreprises dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Dans la foulée d’une entente de 150 millions conclue avec le gouvernement du Québec, la Ville a délégué aux six organismes sans but lucratif de PME MTL répartis sur le territoire le mandat de gérer l’octroi d’aide financière aux entreprises affectées par le ralentissement de leurs activités.
Le rapport souligne toutefois que 19 % des dossiers examinés ne respectaient pas au moins un critère d’admissibilité. Dans certains cas, les demandes étaient incomplètes, alors que dans d’autres dossiers, aucune preuve de l’incidence de la pandémie sur les problèmes financiers des entreprises n’a été fournie. L’évaluation de la capacité de plusieurs entreprises à rembourser leur prêt laissait aussi à désirer, estime Michèle Galipeau. « Pour les trois pôles de PME MTL audités, les commentaires justifiant l’analyse financière sont à géométrie variable et ne permettent pas toujours de bien [saisir] le risque de l’entreprise et d’appuyer l’octroi du prêt », souligne la VG, qui recommande notamment au Service du développement économique de mettre en place des mécanismes de surveillance adéquats.