Des élus doutent de l’engagement envers le français de Michael Rousseau

Le grand patron d’Air Canada, Michael Rousseau, n’a répondu qu’en anglais aux questions lors d’un comité parlementaire.
Mario Beauregard La Presse canadienne Le grand patron d’Air Canada, Michael Rousseau, n’a répondu qu’en anglais aux questions lors d’un comité parlementaire.

Tout en s’excusant d’avoir tenu des propos « insensibles » envers les francophones, le grand patron d’Air Canada, Michael Rousseau, n’est pas parvenu lundi à rassurer les élus fédéraux à qui il a présenté son entreprise comme étant la plus respectueuse du français.

« Je m’excuse encore ici et je prends la responsabilité de mes propos », a laissé tomber le dirigeant lors d’un témoignage virtuel devant le comité fédéral sur les langues officielles, lundi, à Ottawa.

M. Rousseau a créé la controverse en novembre, en marge d’un discours prononcé en anglais devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Il avait notamment affirmé à sa sortie avoir « toujours pu vivre à Montréal sans parler français ». Il se désole maintenant de l’incidence que toute l’affaire a eue « sur [ses] employés, qui servent les clients chaque jour dans les deux langues officielles ».

Même s’il affirme désormais suivre chaque jour des cours de français — il disait à l’automne 2021 que son emploi du temps était trop chargé pour qu’il se le permette —, le Montréalais n’est arrivé qu’à lire quelques phrases dans cette langue durant la rencontre, non sans de laborieux efforts. Il a ensuite répondu exclusivement en anglais aux questions des élus fédéraux.

« Non seulement sa déclaration [d’ouverture] n’est pas à moitié en français, comme elle le devrait, mais aucune de ses réponses » non plus, s’est plainte devant lui la députée Niki Ashton, du Nouveau Parti démocratique, insatisfaite des progrès réalisés.

Championne du français

 

Selon la vision des choses du p.-d.g., le français est respecté au sein d’Air Canada. La langue est déjà parlée par près de la moitié des employés, estime-t-il, mais un programme linguistique interne permettrait en plus à tous d’apprendre une langue seconde. Seule la difficulté de dénicher des personnes bilingues à embaucher freinerait ses efforts.

« Air Canada est la championne des plaintes au commissaire aux langues officielles. Vous trouvez que c’est crédible comme réponse ? » a laissé tomber le député du Bloc québécois Mario Beaulieu devant le dirigeant de la principale compagnie aérienne du pays.

Non seulement sa déclaration [d’ouverture] n’est pas à moitié en français, comme elle le devrait, mais aucune de ses réponses [non plus]

 

Un vice-président de l’entreprise, David Rheault, a vanté les 130 000 heures de cours de français données par Air Canada à ses 10 000 employés. Il a plus tard précisé au député conservateur Jacques Gourde que ce nombre représentait en fait le total des heures données depuis 2015, soit moins de deux heures par année par employé en moyenne, a calculé l’élu québécois.

« Il n’y en a pas, de formation linguistique à Air Canada ! Je suis vraiment estomaqué ! […] C’est une loterie, [suivre] des cours linguistiques à Air Canada ! » a lancé M. Gourde, déchaîné, avant de prendre une petite pause pour se remettre de ses émotions.

Plus de mordant à la Loi

Michael Rousseau voit d’un bon œil que les compagnies aériennes concurrentes se voient imposer des obligations de bilinguisme par la dernière mouture de la Loi sur les langues officielles, présentée par le gouvernement Trudeau en mars. Il s’est par ailleurs désolé que ce même projet de loi puisse aussi exposer son entreprise à des amendes de 25 000 dollars. « On croit dans une culture de continuelle amélioration et non aux pénalités », a expliqué le haut dirigeant.

Air Canada se fait périodiquement taper sur les doigts par le commissaire aux langues officielles du Canada, qui ne dispose pas actuellement du pouvoir d’imposer des pénalités financières. Même si le siège social d’Air Canada se trouve à Montréal, seulement 4 des 12 membres du conseil d’administration peuvent comprendre ou parler le français, a admis Michael Rousseau lundi.

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