Les commerçants d’Ottawa en ont marre des klaxons

L’odeur du diesel et le tintamarre des klaxons étaient toujours omniprésents pour quiconque s’aventurait sur les principaux axes du centre-ville d’Ottawa menant à la colline parlementaire
Photo: Adrian Wyld La Presse canadienne L’odeur du diesel et le tintamarre des klaxons étaient toujours omniprésents pour quiconque s’aventurait sur les principaux axes du centre-ville d’Ottawa menant à la colline parlementaire

Après le premier ministre du Canada et le maire d’Ottawa, le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, a à son tour exhorté les camionneurs opposés aux mesures sanitaires à quitter la capitale canadienne, par souci pour les résidents et les commerçants locaux excédés. Ces appels n’avaient toujours pas eu d’effets mesurables sur le terrain, mardi en début de soirée.

« Je comprends, je vous entends, mais on doit laisser les gens d’Ottawa vivre leur vie », a déclaré M. Ford à l’attention ​des centaines de camionneurs toujours présents dans les rues environnantes du parlement fédéral pour une cinquième journée, mardi.

L’odeur du diesel et le tintamarre des klaxons étaient toujours omniprésents pour quiconque s’aventurait sur les principaux axes du centre-ville d’Ottawa menant à la colline parlementaire. La plupart des intersections étaient stratégiquement obstruées par la police, souvent à l’aide de chasse-neige ou de camions des travaux publics municipaux.

Durant la journée, les manifestants étaient dispersés en petits regroupements, le long des files de véhicules immobilisés qui n’ont pratiquement pas bougé depuis des jours. Devant l’édifice de la Cour suprême, une partie de hockey-balle impromptue a été organisée. Sur l’avenue Laurier, de la pizza était cuite dans un four portatif pour nourrir les manifestants, de bonne humeur et visiblement déterminés à rester sur place encore longtemps.

« Aucun client »

La restauratrice Lili Huang n’avait pas, elle, le cœur à rire. Son restaurant, situé sur la rue Kent, en plein centre-ville, a dû fermer ses portes durant quatre jours, vu les perturbations causées par les manifestations. Il n’a finalement pu ouvrir que mardi.

« La situation est moins mauvaise [que durant la fin de semaine], dit-elle. Mais le commerce est mort. Seuls des locaux viennent nous encourager. » La femme précise ne pas chercher de problèmes avec ceux qui occupent sa rue.

« Je crois qu’il y a de meilleures manières [pour les camionneurs] de faire passer leur message. C’est dur d’appuyer quelqu’un qui bloque votre entreprise », se désole Diana Su, gérante du restaurant Sansotei Ramen, situé sur la rue Bank. Devant son commerce vide, des manifestants faisaient cuire de la viande sur des barbecues installés à même le trottoir.

« Les chauffeurs Uber ne peuvent pas venir, et en ce moment, on n’a aucun client. Ils ne se préoccupent pas de la quiétude le soir. Ils bloquent les rues, il y a des personnes âgées qui vivent dans le quartier, qui ne peuvent pas passer », a-t-elle indiqué au Devoir.

Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Marco Mendicino, s’est dit mardi « de plus en plus préoccupé » par les « perturbations importantes » que connaît Ottawa. « L’utilisation des forces de l’ordre est toujours un dernier recours, et c’est pourquoi c’est si important, les tentatives de désescalade de la situation », a-t-il évoqué, en référence à la stratégie utilisée depuis la fin de semaine par la police d’Ottawa.

La forte présence policière visible au centre-ville n’avait toujours pas été mise à contribution pour forcer les camionneurs stationnés à se déplacer, en début de soirée mardi. Les autorités feront le point sur la question mercredi. Entre-temps, le Service de protection parlementaire, responsable de la sécurité du Parlement, contrôlait un large périmètre inaccessible au public autour des édifices.

À l’intérieur de la Chambre des communes, d’autres élus conservateurs ont affiché leur soutien au « convoi de la liberté » lors de la période de questions de mardi. Le député albertain Glen Motz a dit que ces manifestants « donnent une voix aux millions de Canadiens qui veulent ravoir leur pays, ravoir leur vie, et veulent préserver leurs libertés ». L’Ontarienne Cheryl Gallant a demandé au premier ministre et au gouvernement de mettre fin à « toutes les obligations [”mandates”] » en lien avec la crise sanitaire, l’une des revendications principales du convoi.

Deux manifestants arrêtés par la police d'Ottawa

Le Service de police d'Ottawa a annoncé en soirée mardi avoir procédé à l'arrestation de deux hommes en lien avec la manifestation contre les mesures sanitaires. L'un d'entre eux était armé. D'après le communiqué publié par les autorités, Andre J. Lacasse, un résident d'Ottawa de 37 ans, a été accusé de port d’arme à une assemblée publique, ce qui contrevient à l'article 89(1) du Code criminel. Il aurait été interpellé le 30 janvier.

Un deuxième individu, Matthew Dorken, 29 ans, a été accusé de méfaits de moins de 5000 $ à la suite d'un incident qui serait survenu le 29 janvier. Les policiers ont précisé qu'ils n'avaient pas procédé à son arrestation au moment des faits afin de ne pas envenimer la situation.

Par ailleurs, toujours selon le Service de police d'Ottawa, 13 enquêtes sont en cours et huit plaintes ont été reçues dont trois qui ont été confiées à l'unité spécialisée en crimes haineux.

La Presse canadienne



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