Records de mises en chantier d’habitations en 2021, surtout en milieu rural

Photo: Ryan Remiorz (Archives) La Presse canadienne

De nombreux records de mises en chantier d’habitations ont été battus en 2021 au Québec, en particulier dans les régions rurales. Mais un essoufflement commence à se faire sentir, constate la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL).

Pas moins de 67 962 mises en chantier d’habitations ont été lancées dans la province en 2021, soit 26 % de plus que l’année précédente, indiquent des données publiées mardi par l’organisme fédéral. « C’est énorme », résume au Devoir l’économiste Francis Cortellino, de la SCHL.

Une partie de cet écart s’explique par un effet de refoulement à la suite du ralentissement de la construction résidentielle observé pendant le confinement de mars 2020. La tendance à la hausse va toutefois au-delà de ces circonstances exceptionnelles liées à la pandémie. Il faut en effet remonter à 1987 pour recenser autant de mises en chantier en une année, tous types d’habitations confondus, et à 1955 en ce qui concerne les appartements locatifs et résidentiels.

« Ce n’est pas seulement une question de refoulement, confirme M. Cortellino. Il n’y a pas beaucoup d’offre sur le marché, les prix sont à la hausse, et il y a une hausse de la demande pour déménager. Vous avez tous les ingrédients pour avoir des incitatifs à faire de la construction résidentielle. »

C’est ainsi que, malgré les records de nouvelles constructions, la demande continue d’être nettement supérieure à l’offre dans plusieurs régions de la province, où une pénurie de logements se fait sentir.

Le milieu rural a la cote

 

La croissance des mises en chantier l’an dernier a par ailleurs été nettement plus élevée dans les régions rurales, à 56 %, qu’elle ne l’a été dans les régions métropolitaines densément peuplées, où celle-ci s’est plutôt élevée à 21 %, toujours par rapport à 2020. Dans certains secteurs, comme à Sainte-Adèle, à Lachute et à Thetford Mines, des records datant « d’au moins 30 ans » ont ainsi été battus l’an dernier, a indiqué au Devoir le directeur du Service économique de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec, Paul Cardinal, après avoir consulté les données de la SCHL.

Cet écart entre la ville et les régions rurales n’est pas étranger au fait que de nombreux résidents de grands centres, dont Montréal, ont déménagé ailleurs dans la province depuis le début de la pandémie. Selon des données de l’Institut de la statistique du Québec, la population de la métropole a baissé de 46 717 habitants entre le 1er juillet 2020 et le 1er juillet 2021, au profit d’autres villes québécoises. « Ça a favorisé la construction dans les milieux ruraux », explique Francis Cortellino.

La part des mises en chantier dans la province occupée par les régions métropolitaines a ainsi diminué, passant de 79 % à 72 % entre 2019 et 2021. Pendant ce temps, ce pourcentage a doublé dans les régions rurales, passant de 9 % à 16 %, montrent les données de la SCHL. L’organisation se demande d’ailleurs si ce phénomène, stimulé par le recours accru au télétravail dans le contexte de la pandémie, se poursuivra au terme de celle-ci.

« Quand un couple s’assoit à table pour décider où il va vivre, c’est sûr que la réflexion maintenant est prise en considération du fait qu’on peut aller au bureau juste une fois ou deux fois par semaine au lieu de cinq jours, relève M. Cortellino. La pandémie a changé les règles du jeu, donc la réflexion des gens sur l’endroit où ils vont demeurer peut changer. »

M. Cardinal évoque aussi le fait qu’au moment où la valeur des propriétés est en forte augmentation dans les grands centres, de plus en plus de ménages peuvent être attirés par les régions éloignées, où les prix demeurent abordables.

« Ça va être quelque chose à suivre », renchérit M. Cortellino.

Tendance à la baisse

Les mises en chantier commencent toutefois à faire voir une tendance à la baisse. Leur nombre a diminué de 20 % en décembre 2021 au Québec, par rapport au même mois de l’année précédente. Cette diminution se chiffre à 33 % dans la région métropolitaine de Montréal.

« Si on regarde la moyenne des derniers mois, on voit un rythme qui est en diminution dans les mises en chantier au Québec », confirme M. Cortellino. La hausse des coûts de construction pourrait d’ailleurs contribuer à ce ralentissement, entrevoit Paul Cardinal.

La SCHL s’attend ainsi à ce que le rythme de la construction résidentielle, bien que soutenu, soit plus faible cette année qu’il ne l’a été en 2021. « C’est un sommet qu’on n’atteindra pas de sitôt », affirme aussi M. Cardinal.

À voir en vidéo