Un nouveau refuge d’urgence devant la flambée des cas de COVID-19

Le Stade de soccer de Montréal a été transformé en un site destiné aux itinérants atteints de la COVID-19, notamment afin de désengorger les refuges déjà en place. Il pourra accueillir jusqu'à 350 personnes.
Photo: Adil Boukind Le Devoir Le Stade de soccer de Montréal a été transformé en un site destiné aux itinérants atteints de la COVID-19, notamment afin de désengorger les refuges déjà en place. Il pourra accueillir jusqu'à 350 personnes.

Un nouveau refuge d’urgence ouvert jeudi pourra accueillir jusqu’à 350 personnes en situation d’itinérance atteintes de la COVID-19, au moment où le milieu fait face à une flambée des cas positifs inégalée depuis le début de la pandémie et à des vagues de froid qui ont coûté la vie à un sans-abri lundi.

Des données de la Santé publique de Montréal datant du début de la semaine font état d’au moins 500 itinérants dans la métropole qui ont contracté la COVID-19 depuis le début du mois de janvier, soit environ 50 cas positifs par jour. On rapporte par ailleurs 23 éclosions actives dans les refuges de Montréal.

« On n’a jamais vu quelque chose comme ça » depuis le début de la pandémie, a confié au Devoir jeudi matin le président et chef de la direction de la Mission Old Brewery, James Hughes. En comparaison, 260 cas de COVID-19 avaient été recensés en plus de cinq mois l’an dernier dans les ressources destinées aux itinérants de la métropole, soit entre le 1er juillet et le 18 décembre. « On vit des temps très difficiles », a soupiré M. Hughes.

Photo: Adil Boukind Le Devoir «On n’a jamais vu quelque chose comme ça » depuis le début de la pandémie, a confié le président et chef de la direction de la Mission Old Brewery, James Hughes.

Devant cette flambée de cas marquée par la montée du variant Omicron, la Santé publique de Montréal a demandé vendredi dernier à la Ville l’autorisation de transformer le Stade de soccer de Montréal en un site destiné aux itinérants atteints de la COVID-19, notamment afin de désengorger les refuges déjà en place.

« C’est très important parce que, lorsqu’une personne contaminée va dans un refuge, elle risque de contaminer l’ensemble, et ça vient complètement déstructurer le milieu », a indiqué jeudi matin la mairesse de Montréal, Valérie Plante, lors d’une visite du site en compagnie notamment de la ministre responsable de la métropole, Chantal Rouleau.

Ce nouveau refuge permettra aussi de libérer les urgences de certains sans-abri atteints de la COVID-19, mais dont les symptômes sont légers, a quant à elle souligné la présidente-directrice générale du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, Sonia Bélanger.

Répondre à la demande

L’immense établissement de l’arrondissement de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension, qui avait déjà été réquisitionné l’hiver dernier, a ainsi été transformé dans les derniers jours afin d’accueillir quelques centaines de lits de fortune fournis par la Croix-Rouge. À côté de ceux-ci se trouvent des prises électriques pour permettre aux itinérants de charger la batterie de leur téléphone cellulaire, au besoin.

« On est bien contents pour les usagers, parce que sinon, ça devient un défi de charger l’équipement », a expliqué la directrice des services d’urgence à la Mission Old Brewery, Émilie Fortier, pendant la visite des lieux.

Photo: Adil Boukind Le Devoir

L’endroit, qui accueillera des sans-abri dès jeudi soir, comprend notamment une cafétéria et des télévisions afin de pouvoir nourrir et distraire les occupants pendant leur période d’isolement de quelques jours. Une zone est aussi réservée aux femmes, et des cubicules ont été aménagés pour offrir des soins de base aux sans-abri.

La création de ce site permet d’ailleurs de garder en dormance le refuge aménagé temporairement dans l’hôtel Chrome, au centre-ville. Cet établissement n’accueillera donc de nouveau des sans-abri que si la demande le justifie. « On croise les doigts que ça va être assez », a soulevé M. Hughes.

« Un constat d’échec »

L’ouverture de ce refuge survient trois jours après le décès, lundi soir, d’un homme de 74 ans en situation d’itinérance, retrouvé mort sous un viaduc en pleine vague de froid, rappelant le décès en janvier 2021 de Raphaël André dans les rues de Montréal. « Dans notre domaine, quand ça arrive, c’est un échec complet », a glissé M. Hughes jeudi, en entrevue devant le Stade de soccer de Montréal.

Quand on lui a demandé si ce second décès aurait pu être évité, Mme Plante a insisté sur la responsabilité partagée entre le gouvernement du Québec, le réseau de la santé et la Ville, en ce qui concerne l’itinérance.

« Concernant la mort tragique de cet homme, qui était dans son abri de fortune, c’est vraiment une démonstration tragique comme quoi dormir sous une tente ou avoir un abri de fortune, ça ne fonctionne pas. Donc, ça prend des solutions comme plus de refuges, évidemment, mais n’oublions pas que ce sont des solutions à court terme », a ajouté Mme Plante lors d’une mêlée de presse. Elle a alors de nouveau interpellé le gouvernement du Québec afin qu’il augmente le financement destiné à la construction de logements sociaux dans la province.

Photo: Adil Boukind Le Devoir « Concernant la mort tragique de cet homme, qui était dans son abri de fortune, c’est vraiment une démonstration tragique comme quoi dormir sous une tente ou avoir un abri de fortune, ça ne fonctionne pas », s'est exprimé la mairesse Valérie Plante. 

La mairesse a par ailleurs insisté sur le fait que la Ville a des commandes du réseau de la santé pour la création de ressources additionnelles. « Nous, si on nous demande des lieux, il y en a […] Mais il n’en demeure pas moins que si le besoin est plus grand, on a besoin d’avoir un message en ce sens-là », a-t-elle dit. « Le travail de collaboration, il est essentiel », a-t-elle ajouté.

Le porte-parole du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, Jean-Nicolas Aubé, a pour sa part rappelé au Devoir qu’il est actuellement difficile pour le réseau de la santé de prévoir adéquatement les besoins des personnes en situation d’itinérance, en raison du contexte actuel de la pandémie qui évolue rapidement. « Jusqu’à la semaine dernière, nos refuges répondaient à la demande », mais les grands froids des derniers jours ont changé la donne, a-t-il dit. Dans ce contexte, « c’est un véritable tour de force » qui a été réalisé, en ouvrant ce centre en un temps record. Il assure d’ailleurs que le réseau de la santé « continuera de s’ajuster » pour répondre à la demande, si celle-ci devait continuer à croître dans les prochaines semaines.

Ce nouveau centre d’urgence porte à plus de 1800 le nombre de places disponibles pour les itinérants dans la métropole, soit davantage que l’hiver dernier.

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