L'année a été marquée par le retour des câlins intergénérationnels

Si Omicron assombrit la fin d’année au Québec et dans le monde, 2021 nous a réservé des éclaircies. Pour donner un peu de réconfort, Le Devoir plonge dans cette série sur des moments ou des habitudes qu’on a pu vivre ou retrouver. Premier souvenir : les relations intergénérationnelles, qui ont parfois été renforcées cette année.
Quand Viviane Arsenault, Daniel Bizier et leurs trois petits-enfants ont su qu’ils ne pourraient pas se voir pour Noël, ils ont presque tous fondu en larmes.
« On avait les jambes sciées », se rappelle Mme Arsenault, lors d’une entrevue par Zoom avec Flavie, Charles-Hugo et Mathis. Comme leur père venait de contracter la COVID-19, lesplans des Fêtes venaient de tomber à l’eau.
Malgré tout, 2021 a été une bonne année pour la petite famille. Meilleure, en tout cas, que 2020. De septembre 2020 à juin 2021, le grand-père était fragile en raison de traitements pour un cancer de la prostate. Ils devaient donc éviter tout contact en personne, même quand leur fille, Marie-Pierre, s’est fait opérer aux deux hanches. La seule exception fut en décembre 2020, quand ils se sont échangé des cadeaux dans le stationnement de la halte routière Madrid 2.0, qui se trouve sur le chemin entre leurs deux domiciles.
« Les petits m’ont donné un appui assez formidable pendant cette période-là, estime tout de même M. Bizier, qui va aujourd’hui beaucoup mieux. Ils m’ont fait des dessins, on a pu communiquer ensemble sur FaceTime. Ils ont pris ça à cœur et ça m’a encouragé. »
L’été dernier, les grands-parents, les parents et les enfants ont enfin pu refaire des activités ensemble : jouer au badminton, faire des ateliers de peinture, manger des crêpes, passer des vacances en Gaspésie.
« J’aime faire de la peinture avec grand-maman, j’aime quand mon grand-papa me raconte des histoires drôles et aussi quand on va se promener dans le champ en arrière, rapporte Flavie, 11 ans. Ils sont vraiment à l’écoute quand on a besoin d’eux, ils sont vraiment généreux. »
« Grand-papa, c’est Spiderman, assure quant à lui Mathis, 6 ans. Il me dit tout le temps que son déguisement est en bas, mais qu’il ne veut pas me le montrer, parce qu’il est trop gêné. »
Le garçon de première année exhibe ensuite un visage qu’il vient de dessiner sur du papier. « C’est ton dernier ? Il est beau ! Je ramasse tous vos dessins, moi », s’exclame alors Mme Arsenault, qui considère ces enfants comme les personnes les plus importantes de sa vie.
Ces moments privilégiés ont été un baume sur les blessures provoquées par la pandémie et aideront la petite famille unie à tolérer le confinement récemment décrété.
Mme Arsenault est bien consciente que tous les grands-parents n’ont pas cette chance. Elle-même a dû faire des démarches juridiques pour avoir accès à son autre petit-fils, puisque son fils a coupé les ponts avec eux. Elle s’implique au sein de l’Association des grands-parents du Québec afin de soutenir ceux qui sont éloignés malgré eux de leur descendance.
Des câlins sur les jambes
Lucie Gougeon, elle, est allée chercher ses petits-enfants, des jumeaux de 5 ans, à 10 h le 25 décembre. « Ils m’ont demandé qu’on mange de la lasagne », souligne-t-elle en riant.
À la fin de la journée, elle les a ensuite ramenés dans le foyer d’accueil où ils habitent depuis le mois d’août.
« La DPJ [direction de la protection de la jeunesse] tient à ce que je sois présente pour les enfants. L’intervenante dit qu’ils ont besoin de moi dans leur vie, en tant que personne sereine et fiable. Je fais ce que je peux. Je les vois une fois par mois », indique la grand-mère de 65 ans.
Les deux dernières années n’ont pas été un long fleuve tranquille. Alors qu’elle les gardait régulièrement, Mme Gougeon a dû arrêter de les voir au début de la pandémie, sauf par vidéoconférence et à travers des vitres. Jusqu’à ce qu’elle soit vaccinée.
« Mon ex-belle-fille m’a demandé d’aller garder les enfants. J’avais eu ma première dose en avril. Je gardais mon masque à l’intérieur. Les enfants étaient bien informés et ils savaient qu’il y avait un virus. Ils disaient : “Mamie, on n’a pas le droit de te donner des câlins, hein ?” Je disais non, et ils respectaient ça », raconte celle qui travaille à la réception d’une résidence pour aînés.
Maintenant, la grand-mère permet aux enfants de lui donner des câlins sur les jambes. Pas dans les bras.
« Ces enfants, je les adore, c’est ma joie de vivre. On aime nos enfants, mais je pense qu’on aime encore plus nos petits-enfants », admet Mme Gougeon.
Elle a acheté des billets pour le spectacle prévu en mars de Disney on Ice, qu’ils avaient tant aimé avant la pandémie. Devant l’incertitude face à la reprise des spectacles, elle n’a pas encore osé leur en parler, de peur que leurs attentes soient déçues.
« Il faut en profiter »
Drôle, créative, bonne en cuisine… Roméo ne manque pas de bons mots pour dépeindre sa grand-mère, la comédienne Marie-Josée Longchamps.
« C’est important pour moi de passer du temps avec elle. Tu n’as pas toute la vie pour le faire, alors il faut en profiter », philosophe le garçon de 11 ans, assis à côté de son aïeule.
Cette dernière est visiblement émue. « C’est profond ce qu’il vient de dire. La pandémie nous montre qu’on n’a pas toute la vie pour apprécier le moment présent », dit la dynamique septuagénaire montréalaise, qui décrit son petit-fils comme « une merveille ».
Ces enfants, je les adore, c’est ma joie de vivre. On aime nos enfants, mais je pense qu’on aime encore plus nos petits-enfants
Ce 23 décembre, Mme Longchamps a pu profiter de la douceur de sa riche famille. Ses trois enfants et ses cinq petits-enfants ont été réunis autour d’une même table pour la première fois depuis longtemps.
« C’est surtout d’être ensemble, de jouer aux cartes et de souper. Dans la simplicité et l’amour », rapporte celle qui a pu constater l’évolution de ses petits-enfants, dont certains sont maintenant de jeunes adultes.
Ces liens intergénérationnels, tissés depuis leur naissance, sont loin de s’être perdus pendant la pandémie, malgré les restrictions qui leur ont compliqué la vie.