La communauté haïtienne de Montréal se mobilise en réaction au tremblement de terre

La communauté haïtienne du Québec se mobilise en réaction au puissant séisme qui a secoué la Perle des Antilles, samedi. Une cellule de crise a été formée et des services de soutien seront offerts aux gens qui en ressentent le besoin.
Le député de Viau, Frantz Benjamin, a réuni plusieurs intervenants de la communauté dans son bureau de circonscription, samedi, pour mettre sur pied cette cellule de crise.
En conférence de presse en fin de journée, M. Benjamin qui est lui-même d’origine haïtienne, a déclaré qu’il s’agit d’« un drame de trop qui s’abat sur Haïti ». « Nos coeurs saignent », a-t-il ajouté au nom de ses collègues de la cellule de crise.
« C’est pour appeler à la solidarité, mais aussi pour voir comment les membres de la diaspora haïtienne peuvent mettre l’épaule à la roue pour venir en aide aux membres de la communauté », indique au Devoir Frantz Benjamin, qui pilote cette cellule de crise.
Directrice générale de la Maison d’Haïti, Marjorie Villefranche a invité toute personne qui souhaite verser un don pour l’aide d’urgence de s’adresser à trois organismes, soit la Croix-Rouge, Médecins du monde et Médecins sans frontières.
« À notre avis, ce sont les trois organismes les plus capables d’intervenir en termes d’urgence », a-t-elle soutenu.
Édouard Staco, président du Fonds 1804 qui soutient la persévérance scolaire, est natif de Les Cayes, dans le sud d’Haïti. Une région particulièrement éprouvée par le séisme de magnitude 7,2 sur l’échelle de Richter.
Pour le moment, on n’a pas de confirmation de la présence de Québécois parmi les victimes, mais de nombreux membres de la diaspora haïtienne à Montréal ont des liens familiaux avec la région sinistrée. D’ailleurs, Les Cayes célébrait ce week-end la fête patronale de la ville. Un événement fort couru qui rassemble normalement beaucoup de monde.
M. Staco a annoncé qu’une ligne téléphonique de soutien serait mise en fonction sous peu pour diriger les gens vers les bonnes ressources en cas de besoin. Il a notamment invité les victimes du séisme dévastateur de 2010, qui seraient replongées dans le traumatisme vécu, à ne pas hésiter à demander de l’aide.
À ce sujet, le Dr Jean-Félix Duval a souligné que de nombreuses personnes vivent toujours avec les séquelles psychologiques de la précédente catastrophe naturelle. Plusieurs victimes du séisme avaient été accueillies à Montréal à titre de réfugiés.
« On va s’adresser aux gens compétents et essayer de trouver un endroit où appeler pour leur offrir l’aide psychologique qu’il faut dans les circonstances », a-t-il expliqué.
Soutien de la communauté politique
Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, de même que la mairesse de Montréal, Valérie Plante, ont d’ailleurs fait part de leur support samedi à la communauté haïtienne.
« Toutes les personnes touchées par le tremblement de terre dévastateur en Haïti sont dans les pensées des Canadiens. Nous sommes de tout cœur avec ceux qui ont perdu des proches et ceux qui sont blessés et nous sommes prêts à apporter notre aide de toutes les façons possible », a réagi M. Trudeau, via Twitter.
Plus tôt, la cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade, qui a perdu ses deux parents dans le séisme dévastateur de 2010, en Haïti, avait exprimé sa peine.
« L’horreur frappe. Je suis de tout cœur avec les Haïtiens dans le sud du pays », a affirmé la leader du Parti libéral du Québec (PLQ) dans un message sur le réseau social Twitter samedi matin.
Valérie Plante a, pour sa part, assuré que « Montréal participera financièrement aux efforts internationaux », notamment par le biais de la Croix-Rouge.
« Mes pensées vont au peuple haïtien qui doit encore subir une telle tragédie. Le Québec est avec vous. Mes condoléances aux proches des victimes », a quant à lui écrit sur le réseau social le premier ministre du Québec, François Legault.
Le député libéral Frantz Benjamin a voulu remercier la population qui a rapidement témoigné de sa sympathie envers la diaspora haïtienne.
« C’est un baume qui vient nous aider », a-t-il dit.
Rejoindre les proches
« C’est à se demander si on peut avoir un moment de répit. Ça ne fait aucun sens […] On ne pourrait pas avoir la paix ? », lance au Devoir la présidente de la Ligue des Noirs nouvelle génération, Anastasia Marcelin. Comme plusieurs membres de la communauté haïtienne de Montréal et des régions voisines, elle s’inquiète pour les membres de sa famille et ses amis qui demeurent en Haïti.
« Je n’ai pas encore de nouvelles de membres de ma famille. J’ai essayé de faire des appels, mais sans pouvoir les contacter. C’est sûr que ça crée une onde de choc. Ça nous rappelle l’horreur d’il y a une dizaine d’années », soulève Frantz Benjamin, qui est né à Port-au-Prince.
« Est-ce que lignes sont coupées ? Est-ce que les gens manquent à l’appel ? C’est ça qui est inquiétant, surtout pour ceux qui ont parenté dans le sud du pays », renchérit le sociologue d’origine haïtienne Frédéric Boisrond.
Plusieurs membres de la communauté haïtienne craignent d’ailleurs que cette tragédie ait pour effet de retarder de nouveau la tenue d’élections en Haïti, fragilisant encore davantage sa situation politique.
Ainsi, ce tremblement de terre survient « à un moment où le pays est en crise politique, sociale, économique et sanitaire causée par la COVID-19 », énumère M. Boisrond, qui demeure à Laval. « Il y aura d’énormes blessures à panser », constate-t-il.
Dans ce contexte, comment peut-on acheminer de l’aide à Haïti en ayant la conviction qu’elle se rendra à bon port ? « La majeure partie des efforts devrait aller à aider les gens qui sont dans les décombres », estime M. Staco. « On a besoin de bras », réclame également Alientes Cherubin, un résident de Laval d’origine haïtienne.
« On a vu ce qui s’est passé en 2010. Maintenant, ce qui a changé, c’est qu’onze ans plus tard, on peut avoir la mémoire de nos erreurs. Et la priorité, c’est de sauver des vies et d’éviter que des gens meurent par manque d’eau et de nourriture », ajoute M. Staco.
« Quand il y a une catastrophe, toute la communauté doit se mobiliser », réclame également Sacha-Wilky Merazil, qui peinait samedi, comme plusieurs autres, à rejoindre ses proches en Haïti.
Avec Zacharie Goudreault - Le Devoir