L’UMQ veut plus de candidatures féminines

Jean-François Venne
Collaboration spéciale
En 2014, Maude Laberge est devenue la première mairesse de l’histoire de Sainte-Martine.
Photo: Michel Beaudin En 2014, Maude Laberge est devenue la première mairesse de l’histoire de Sainte-Martine.

Ce texte fait partie du cahier spécial Journée internationale des femmes

D’élection en élection, la parité conquiert du terrain en politique municipale, mais à un rythme modéré. L’Union des municipalités du Québec (UMQ) intensifie donc ses efforts pour susciter davantage de candidatures féminines. À travers sa campagne D’Elles à Élues, l’organisme aspire à aller chercher des élues inspirantes.

Les femmes occupent un tiers des sièges des conseils municipaux et un cinquième des postes de maire au Québec depuis les élections municipales de 2017. Chez les 45 ans et moins, la proportion de femmes élues grimpe à 40,5 %. Ce portrait reflète presque exactement les proportions d’hommes et de femmes qui ont présenté leur candidature cette année-là. « L’augmentation du nombre de candidatures féminines en politique municipale se traduit très directement par une hausse des élues »,souligne Maude Laberge, mairesse de Sainte-Martine, en Montérégie. Elle préside également la Commission femmes et gouvernance de l’UMQ.

En 2017, un tiers des candidats au poste de conseiller étaient des femmes, tout comme 20 % de ceux qui convoitaient la mairie. Il s’agit de progressions respectives de sept et cinq points de pourcentage depuis les élections de 2005. En guise de comparaison, les dernières élections provinciales proposaient 40 % de candidates. La Coalition avenir Québec, Québec solidaire et le Parti vert du Québec comptaient plus de femmes que d’hommes dans leurs troupes. Au final, un peu plus de 40 % des sièges de députés sont aujourd’hui occupés par des femmes.

La force du nombre

 

En remportant une élection municipale contre une autre candidate en 2014, Maude Laberge est devenue la première mairesse de l’histoire de Sainte-Martine. Elle y siégeait comme conseillère municipale depuis 2009. « Jusque-là, il n’y avait eu que deux femmes conseillères municipales à Sainte-Martine au total, qui s’étaient partagé un mandat de quatre ans, donc mon arrivée a soulevé quelques questions, raconte-t-elle. Les réflexes et l’humour de boys’ club étaient bel et bien présents au conseil, et en tant que jeune femme, j’ai dû faire ma place. »

La crainte de se retrouver dans un milieu très majoritairement masculin ferait reculer certaines femmes, tout comme la perspective de devenir une personnalité publique à l’ère des médias sociaux. La conciliation travail-famille représente aussi un obstacle. Par ailleurs, dans plusieurs petites municipalités, on ne trouve aucun parti politique. Les candidats indépendants ne bénéficient que de peu de soutien. Les statistiques de l’UMQ indiquent que les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes à se présenter au sein d’une équipe, mais moins nombreuses à concourir en tant qu’indépendantes.

 Les réflexes et l’humour de boys’ club étaient bel et bien présents au conseil, et en tant que jeune femme, j’ai dû faire ma place 

 

Julie Bourdon, conseillère municipale à Granby depuis 2015 et actuelle candidate à la mairie, croit que plus il y aura de femmes dans les conseils municipaux et mieux ceux-ci pourront remplir leur mission. « La parité entre les hommes et les femmes dans les conseils permet de représenter l’ensemble de la population et de prendre de meilleures décisions », précise-t-elle. Elle est elle-même engagée dans la Commission femmes et gouvernance et dans la Commission des assises annuelles de l’UMQ.

Une campagne virtuelle

 

Julie Bourdon ajoute que pour encourager des femmes à se lancer en politique, il faut montrer des modèles de politiciennes qui aiment cet engagement. « Elles doivent voir le plaisir qu’on peut trouver à œuvrer en politique et constater qu’on peut réellement faire changer des choses en tant que conseillère municipale », dit-elle.

Depuis 2004, l’UMQ s’efforce de susciter des candidatures féminines aux élections municipales. Cette année, sa campagne se mène sur le thème D’Elles à Élues. « Nous présentons des femmes qui ont été élue sen 2017 comme mairesses ou conseillères et qui racontent leur expérience, explique Maude Laberge. Elles montrent des profils différents et viennent de diverses régions, ce qui offre un intéressant bouquet de témoignages. »

L’UMQ propose aussi des événements virtuels (pandémie oblige), dont un en novembre dernier a été particulièrement couru. Il mettait en vedette Pauline Marois, première femme élue au poste de premier ministre du Québec. Elle y a discuté de l’apprentissage du pouvoir avec l’ancienne députée Marie Grégoire. « Pour les femmes, c’est également une occasion de rencontrer d’autres femmes intéressées par la politique et d’agrandir leur réseau », poursuit Maude Laberge.

La pandémie pourrait venir compliquer les efforts de l’UMQ. La crise sanitaire a alourdi la charge familiale des parents, dans un contexte où elle continue d’affecter davantage les femmes que les hommes. Le déroulement de la campagne risque aussi d’être inédit. « La politique municipale, c’est une politique de proximité et les élections se gagnent beaucoup au porte-à-porte, rappelle Julie Bourdon. Nous devrons trouver de nouvelles approches cette année. »

En guerre contre l’intimidation

En mai 2020, une élue de Saint-Jean-sur-Richelieu a abandonné son poste de mairesse par intérim après seulement une dizaine de jours, effrayée par des menaces à son endroit proférées sur les réseaux sociaux. Quelques mois plus tard, c’est au tour du maire de Pierreville de renoncer à la mairie en raison de propos homophobes dirigés contre lui, encore une fois sur les médias sociaux.

Julie Bourdon admet qu’elle a vu certaines de ses collègues recevoir des commentaires très déplacés. « Cela peut faire hésiter certaines femmes qui aimeraient s’engager politiquement, c’est sûr, soutient-elle. Les femmes sont souvent très investies dans des organismes, mais la visibilité associée au pouvoir politique en rebute plusieurs. » Sans compter que cela peut jouer dur aussi à l’intérieur des conseils municipaux, notamment lorsque les relations entre l’équipe dirigeante et l’opposition se tendent.

L’UMQ souhaite s’attaquer à ces formes d’intimidation envers les élus avec sa nouvelle campagne « La démocratie dans le respect, par respect pour la démocratie ». L’UMQ invite les municipalités du Québec à adopter formellement une déclaration d’engagement en faveur d’un débat démocratique plus sain et lesté de l’intimidation et des agressions verbales et écrites.

« C’est un sujet qui nous rejoint beaucoup à la Commission femmes et gouvernance, puisque nous constatons depuis quelques années que les commentaires sur les réseaux sociaux sont souvent plus durs et virulents envers les femmes, confie Maude Laberge. Cela pousse même des élues à la démission. Ce n’est pas normal et nous devons décourager ces agissements. »

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.



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